Yannick Nézet-Séguin : Le fabuleux destin de Yannick Nézet-Séguin
Musique

Yannick Nézet-Séguin : Le fabuleux destin de Yannick Nézet-Séguin

Fabuleux destin que celui de YANNICK NÉZET-SÉGUIN. À 25 ans, on lui confiait les rênes de l’Orchestre Métropolitain du Grand Montréal. Et aujourd’hui, alors qu’il n’a pas encore franchi le cap de la trentaine, des orchestres européens le réclament à titre de chef invité. Même s’il est de plus en plus sollicité, le jeune maestro n’a pas hésité à accepter le rôle de porte-parole du Festival des harmonies et orchestres symphoniques du Québec.

Pas évident de fixer un rendez-vous avec le chef d’orchestre de 29 ans. La rencontre téléphonique devait à l’origine se faire lors d’un transit entre Montréal et Québec. L’entretien s’est finalement réalisé le lendemain, à l’heure du lunch. Malgré son emploi du temps chargé, Yannick Nézet-Séguin se fait sympathique et volubile lorsqu’il jase du Festival, de son amour de la musique et de sa fantastique percée dans le domaine de la direction d’orchestre. Extraits choisis.

Pourquoi avoir accepté d’être le porte-parole du Festival?
"J’ai jamais fait partie du Festival des harmonies étant jeune. Comme j’étais pianiste, ça adonnait pas. (…) Mais les buts du Festival rejoignaient les miens, c’est-à-dire de promouvoir la musique classique chez les jeunes, de promouvoir toute la richesse, toute la beauté, et aussi toute l’énergie qu’on peut y trouver, ainsi que la satisfaction de soi. Et puis cet aspect de compétition, mais de compétition pour se dépasser soi-même et non pour vaincre les autres. C’est une chance de se mesurer aux autres pour voir où on est rendu et être inspiré par leur travail. Puis ça se fait dans une atmosphère de gros party. Quand on dit que 9000 jeunes font de la musique ensemble pendant une fin de semaine, c’est extraordinaire!"

Quel sera votre rôle sur place?
"Les gens vont pouvoir me poser des questions et je vais assister aux événements (…) Y’a aussi des musiciens de l’Orchestre Métropolitain qui sont là-bas en tant que juges ou qui sont liés de près ou de loin au Festival. Donc ça va être une occasion de se rencontrer dans un autre contexte. Il y a également Alain Trudel, qui est un grand ami à moi, qui va donner un concert lors du Festival. Ça va être aussi intéressant et enrichissant pour moi que pour les jeunes."

J’imagine que vos journées sont assez chargées parce que vous dirigez l’Orchestre Métropolitain mais aussi d’autres orchestres. Combien de concerts dirigez-vous chaque année?
"Généralement, je suis sur le podium pour des performances, des concerts, des opéras environ 80 soirs par année, en plus des répétitions et de tout le reste. Donc, c’est une cadence assez imposante (rires!). Mais j’aime ça comme ça, je suis capable d’en prendre."

Vous allez faire le saut en Europe en novembre à titre de chef invité (avec l’Orchestre du Capitole de Toulouse).
"Oui, ce sera ma première fois comme chef invité en Europe. (…) Je suis très heureux que ça se concrétise."

Avez-vous un plan de carrière?
"On en a toujours un. (…) Mais la vraie priorité, c’est de rester heureux dans ce que l’on fait. Je pense que c’est un message important à lancer à n’importe quel jeune qui fait de la musique. Tout ça doit venir d’une passion tellement forte qu’on sent qu’on n’a pas d’autre choix que de faire ça dans la vie. Et c’est ça qui va nous mener à travers les embûches de la vie de musicien. Des fois, ça réussit vite, comme dans mon cas; j’ai réussi très rapidement, et ça aurait pu se passer autrement. Et je remercie ma bonne étoile. Mais des fois, ça prend un peu plus de temps avant que ça fonctionne et ce n’est pas grave, parce qu’on est habité par l’amour de la musique."

Avez-vous une routine quotidienne?
"Pas du tout! Les horaires de répétition et de concert font en sorte que rien ne se ressemble. (…) En fait, je travaille un peu tout le temps, mais j’essaie de rendre ça agréable. Y’a des partitions qui traînent partout chez moi. C’est un peu désorganisé, mais pour la bonne chose. La musique, c’est ma vie."

J’ai lu dans un article paru dans Le Devoir en 2001 que vous saviez que vous alliez vivre des revers dans votre carrière. En avez-vous connu depuis?
"Des revers majeurs, non. Mais des petits revers quotidiens, des petites choses qu’on aimerait qui aillent mieux, oui. Mais c’est important comme artiste, surtout pour un chef, car on se développe sur une période tellement longue. Je vais sans doute faire ce métier-là pendant 40 ou 50 ans. Il faut se laisser cette place-là pour l’évolution. (…) Mais jusqu’à maintenant, ça va très bien et je me compte bien chanceux."

Ça revient souvent dans votre discours que vous êtes chanceux, que vous avez une bonne étoile, mais vous y êtes aussi pour quelque chose.
"Oui, je ne le nie pas. Mais il y a beaucoup, beaucoup de musiciens talentueux. Et moi, je considère que j’ai eu d’abord la chance d’avoir des parents qui ont cru en ce que j’allais faire. Ça, c’est rare et c’est une chance. Y’a aussi eu mon professeur de piano au Conservatoire qui a cru en moi et qui m’a donné une discipline de travail très rigoureuse. J’aurais pu tomber sur un autre professeur qui aurait été moins rigoureux. Ce sont des belles chances dans ma vie qui m’ont outillé pour faire ce que je fais. Y’a eu des gens qui ont cru en moi très tôt, comme à l’Opéra de Montréal et à l’Orchestre métropolitain. Ils n’étaient pas obligés de confier à un jeune de 25 ans les destinées de leur orchestre. C’était un risque et je me considère chanceux qu’ils aient pris ce risque-là. Mais une fois qu’on se fait donner une chance, c’est à nous de prendre cette chance-là, surtout comme jeune musicien. T’as ton orchestre à 25 ans, t’as affaire à ne pas décevoir!"

Que pensez-vous du fait que des gens vous décrivent comme un prodige?
"Moi, je ne me vois pas du tout comme un prodige. Je me vois comme quelqu’un qui, encore là, a eu la chance de savoir très tôt ce qu’il voulait faire, et je l’ai fait. Y’a une partie de moi qui ne croyait pas que ça irait aussi vite. Mais, y’a une partie de moi qui est contente que ça puisse aller vite, puisque ça fait longtemps que je travaille pour ce qui se passe présentement. Je sais que ça vient du travail, je sais aussi que j’ai reçu un don pour faire de la musique en groupe avec les autres et j’essaie de faire ça du mieux que je peux."

Le Festival des harmonies et orchestres symphoniques du Québec
Du 20 au 23 mai