My Morning Jacket : Frère de voix
Musique

My Morning Jacket : Frère de voix

Il y a des musiques qui ne peuvent avoir grandi que sur le bitume des villes. Pleines d’attitudes, chaotiques, nerveuses, elles sont à l’image de leur berceau et font le même effet que quatre espressos bien tassés. Puis il y a celles qui respirent. Aérées, elles carburent aux silences, aux ambiances traînantes et donnent envie de compter les étoiles, étendu sur un lit d’herbe fraîche. Si pour vous le bonheur passe par un édifice de cent étages, ou si vous êtes courrier à vélo, évitez donc le Café Campus ce samedi. Pour les autres, il y a un groupe qui s’appelle My Morning Jacket, que vous devriez bien aimer.

Curieusement, on attend toujours des membres d’un groupe plus artisanal gentillesse et générosité, surtout lorsqu’on a affaire au bassiste qui n’a, au surplus, pas composé une seule note de musique sur les disques de son groupe. Simple question d’humilité. Et puis entre vous et moi, My Morning Jacket a beau être une très bonne formation, on ne parle pas ici d’artistes étouffés par la pression des médias et du succès, voire blasés par une redondante routine. Pas tout de suite, s’il vous plaît. Vous aurez donc compris notre surprise (et notre déception) lorsqu’on s’est rendu compte, assez rapidement merci, que notre appel était le cadet des soucis dudit bassiste, Two Tone Tommy, visiblement occupé à de l’entretien ménager. Entre deux soupirs, il a tout de même consenti à nous livrer quelques réflexions sur le parcours ascendant de ce groupe du Kentucky.

L’engouement pour ce quintette de Louisville doit beaucoup au tissu vocal de Jim James. Intense et aérienne, cette voix est pour certains un pastiche de celle de Neil Young (j’en étais), alors que d’autres y voient simplement l’outil exceptionnel d’un chanteur pas comme les autres: "Je ne crois pas que les comparaisons avec Neil Young emmerdent Jim, marmonne le bassiste. Ça fait cinq ans qu’on lui en parle, alors il s’habitue. Bien sûr, nous aimons bien ce que Neil Young chante, mais nous ne piquons pas directement dans sa musique pour créer la nôtre. Il fait simplement partie des nombreuses influences que nous avons…" N’empêche, aux premières écoutes, impossible d’entendre autre chose que cette parenté presque dérangeante. C’est à long terme que la force des compositions et la profondeur des arrangements viennent nous chercher. Et puis comme ce bon vieux Neil, My Morning Jacket alterne également entre les univers acoustiques et électriques, sur fond de rock, de folk et de country.

Mais peu importe ces voisinages, l’important est la masse d’émotions véhiculées par James. Et là-dessus, pas de doute, notre homme sait se servir de ses atouts. Si bien que les chansons du groupe diffusent à la fois tristesse et sérénité, colère et plénitude. À la limite, on pourrait même avancer sans trop se tromper que Jim James représente à lui seul My Morning Jacket. Au fait, notre bon ami Tommy a-t-il déjà craqué simplement à l’écoute des sonorités plaintives de son chanteur sur scène? "En fait, il m’est arrivé de pleurer en les entendant pour la première fois. Lorsque Jim nous les amène pour nous faire entendre sa nouvelle mouture, c’est souvent assez difficile de ne pas être ému. Surtout lorsqu’on écoute ses textes et qu’on connaît le contexte dans lequel ils ont été écrits…" Une expérience scénique qui risque sans doute d’être supérieure à l’expérience téléphonique…

Le 29 mai
Au Café Campus
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