[iks] : Iks ça saute!
Pas de demi-mesure avec [iks]. Depuis sept ans qu’il existe dans une espèce d’underground expérimental sans frontières, le quintette avant-gardiste de Montréal a produit cinq albums dont le dernier – un double compact – devrait rester dans les annales. Ne serait-ce que pour sa pochette, un concept graphique inédit, tout en transparence. "Je suis de ceux qui croient que l’art commence au premier contact. Un album, ce n’est pas juste de la musique sur papier qu’on a fini par jouer; c’est une œuvre globale."
Pierre-Alexandre Tremblay, réalisateur et bassiste de session dans le domaine du soul et du hip-hop, a rencontré le guitariste Sylvain Prohu, son bras droit, alors qu’il faisait du funk métal hystérique avec trois saxophonistes.
Trois fois en tournée européenne, trois mois en immersion dans une région désertique du Sénégal, [iks] s’aventure par conviction et endosse le privilège de déclencher les hostilités cette année dans la série Jazz contemporain, au Musée. Une série dont on devine qu’elle a été assidûment fréquentée par les membres du groupe auparavant. Petite salle avec une ambiance; scénographie et qualité d’écoute garantie. "Ça fait des années qu’on rêve de jouer là. Maintenant, c’est notre tour!" jubile Tremblay. Puis il tente de décrire la musique de son groupe: "Contrairement au mythe établi, ce n’est absolument pas souffrant. C’est zen au maximum. C’est méditatif. C’est une espèce de prise de contact avec le présent. Improviser, c’est comme faire une bulle de savon. C’est magnifique… jusqu’à ce que ça pète."
Le dernier album, abstr/cncr (vous aurez deviné que cela signifie "abstrait/concret"), débute par une pièce hard free avec un sax ténor qui rugit et une fille qui hurle. La deuxième plage – ô contraste! – est une ballade au piano que le bassiste et leader du band a écrite pour la naissance de sa fille. "C’est un statement esthétique. On y croit. On est certains que les gens n’ont plus envie d’écouter des albums mièvres où il y a huit fois la même pièce. L’industrie du showbiz les y force. Nous refusons cette culture de la paresse."
Le décloisonnement existe donc. Et pas besoin d’être un spécialiste du free jazz ni d’avoir des connaissances approfondies en musique électroacoustique pour tenter l’expérience. "La majeure partie de notre public n’y connaît rien. Les gens sont tombés dessus par hasard, par du bouche à oreille ou sur Radio-Canada. Ce que le public apprécie le plus, c’est qu’on se promène beaucoup. Quant à ceux qui disent que [iks], c’est de la musique fuckée, ils n’ont jamais entendu de musique fuckée! On est d’une génération englobante, une génération de musique de films."
Le 30 juin
Au Musée d’art contemporain de Montréal / Salle Beverly Webster Rolph