Yes : Retour vers le futur
Dans quelques millénaires, des scientifiques découvriront les vestiges d’une œuvre musicale colossale, héritée d’une tribu de prodigieux instrumentistes nommée Yes. En attendant ce jour lointain, son leader JON ANDERSON lève le voile sur les mystères que les chercheurs du futur risquent d’avoir peine à percer.
"Ce matin, j’écrivais des paroles en m’inspirant d’une musique créée il y a plus de 3000 ans", confie Jon Anderson depuis sa résidence californienne. Entre jardinage et observation d’oiseaux, le musicien qui aura 60 ans le 25 octobre prochain demeure plus que jamais fasciné par tout ce qui touche la musique. "Ils viennent de trouver une tombe, dans le centre de la Chine, avec tout plein d’instruments; comme une espèce de grand orchestre avec des cloches, des kotos, d’étranges spécimens de guitares à deux cordes, des flûtes et des percussions, le tout datant de 3500 ans! Alors je ne peux m’empêcher de me demander: "Quel type de musique pouvait bien exister il y a 3500 ans?""
Le même genre de questions pourrait fort bien refaire surface dans quelques millénaires, lorsqu’on exhumera d’innombrables sphères de vinyle étrangement sillonnées, rangées à l’intérieur d’enveloppes cartonnées multicolores, toutes estampillées des mêmes trois lettres: Yes. Car après plus de 35 ans d’activité, la formation complétée par Steve Howe (guitare), Chris Squire (basse), Rick Wakeman (claviers) et Alan White (batterie) ne cesse d’enthousiasmer ses admirateurs aux quatre coins du globe, tout en conquérant de nouvelles générations de mélomanes à chaque nouveau concert. "Non, je ne comprends toujours pas pourquoi; c’est une merveilleuse énigme! Cette musique semble intemporelle et le public paraît l’apprécier", lance Anderson, ajoutant qu’aucune tournée ne se ressemble. "Les gens veulent maintenant entendre Close to the Edge, et nous la jouerons à Québec; cela faisait quatre ans qu’on ne l’avait pas faite! On va aussi faire Going for the One, puis Awaken, je crois. C’est très excitant! On aime varier chaque fois, ce que l’on peut se permettre grâce à notre assez vaste répertoire."
À l’instar d’Anderson et son cimetière orchestral chinois, les musicologues de l’avenir s’interrogeront sûrement sur le processus de construction de ces étonnantes fresques sonores, dont le groupe perfectionne le façonnement depuis ses débuts en 1968. "C’est comme jouer à un jeu dans lequel tu passes le ballon à tout le monde autour de toi, illustre-t-il. Pendant un moment, tu prends le contrôle, puis tu le passes ensuite à quelqu’un d’autre, et ainsi de suite. On essaie plein de trucs, en jonglant avec les idées; c’est assez spontané… On peut donc se retrouver avec, je ne sais pas, 45 idées différentes toutes imbriquées dans une pièce qui prend 10 minutes à jouer! On est parfois très surpris du résultat!" Et combien de temps, en moyenne, peut être nécessaire à la confection d’une telle composition? "C’est toujours différent. Parfois, on peut travailler jusqu’à une semaine sur un morceau, comme ce fut le cas, par exemple, avec Heart of the Sunrise, et ensuite, prendre un après-midi pour faire Wonderous Stories, ou deux jours pour faire Roundabout. Ça varie", poursuit-il, expliquant éprouver une succulente mixture de plaisir et de défi à travailler la structure de ces longues pièces. "Il faut à tout prix éviter de confondre l’auditeur ou de l’ennuyer, et donc tout faire pour rendre la musique la plus inventive possible…"
Lorsque la caravane Yes se met au neutre, Anderson travaille à la restauration de son studio maison, où il concocte simultanément une panoplie de projets. "Je n’ai rien lancé de solo depuis environ six ans et je prépare en ce moment trois albums en même temps! J’ai aussi fait une tournée en one-man-show un peu plus tôt cette année et j’aimerais bien venir la présenter à Québec le printemps prochain. J’ai tellement d’idées musicales dans ma tête… Je crois profondément devoir faire quelque chose de bien avec ma vie et je dois terminer tout ce travail, ce qui pourrait bien me prendre un autre 20 ou 30 ans! Je ne peux pas dire: "OK, j’en ai assez fait, je prends ma retraite", etc. Non. Je prendrai ma retraite lorsque j’arrêterai de respirer!"
Le 17 août à 19 h, avec Dream Theater
À l’Agora
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