Mission of Burma : Tympan d’une paix
Pour Mission of Burma, en 1983, l’heure du glas sonnait…
Vingt ans plus tard, la formation de Boston qui a jeté les bases du post-punk de Pavement et Fugazi revient hanter les salles de concert au détriment de nos tympans.
"À l’époque, nous jouions dans des boîtes à souliers, les amplis dans le tapis. Notre musique s’appuyait sur des sons de guitares possibles seulement à très haut volume. Pas étonnant que le premier épisode de Mission of Burma n’ait duré que trois ans. Nous devenions tous sourds", se remémore Clint Conley, bassiste de la formation punk de Boston qui revit aujourd’hui avec la parution du nouveau disque On Off On.
Assis dans une salle de conférence de la station de télévision affiliée au réseau ABC à Boston, Clint vit maintenant dans la peau d’un producteur télé d’une cinquantaine d’années. Rien ne laisse deviner qu’il a participé jadis à l’aventure Mission of Burma, un quatuor aux décibels si extrêmes qu’ils ont laissé le guitariste Roger Miller victime d’acouphènes. Cause de la conclusion hâtive du groupe en 1983, ces troubles auditifs, Miller les avait développés avec ses groupes précédents, mais tout de même, l’épisode Burma a considérablement aggravé la situation. L’album post-mortem enregistré en concert, The Horrible Truth About Burma (un titre plus qu’éloquent), capte d’ailleurs ce qui s’apparente à une version sonique de la tempête tropicale Jeanne. "En reprenant le collier aujourd’hui, Miller tente un pari avec le diable. Sur scène, toutes les précautions sont prises pour qu’il ménage ses tympans. Les amplis sont placés dans un certain angle, un panneau de plexiglas est érigé devant la batterie et il porte un casque protecteur. Il est donc possible de reproduire les sonorités de Burma sans… saigner des oreilles."
Ces sonorités issues du monde expérimental de Père Ubu et de l’univers proto-punk du Velvet Underground et des Stooges ont servi de base à des groupes comme Pavement, Fugazi et Butthole Surfer. Des artistes aux registres aussi opposés que Moby et REM ont même revisité le répertoire de Mission of Burma. Pourtant, le groupe est passé comme une véritable comète dans le paysage de la musique alternative américaine, ne produisant qu’un album complet en trois ans. Dans son bouquin Our Band Could Be Your Life, où il écrit sur les différentes formations qui ont marqué le rock underground, l’auteur Michael Azenard explique le peu de reconnaissance obtenue par le groupe par une scène non préparée à l’émergence d’une telle intensité. "Lorsque nous jouions à Washington, San Francisco, Boston ou New York, les gens se déplaçaient pour nous voir, mais autrement, les salles se remplissaient rarement, avoue Clint. Notre musique ne ressemblait à aucun autre courant, ce qui s’est révélé être une arme à double tranchant. Le succès n’est pas venu, mais les gens reconnaissent aujourd’hui l’innovation que nous apportions."
Ensemble à nouveau depuis 2002, à la suite d’un concert réunion qui s’est transformé en nouveau disque et en tournée nord-américaine, Clint Conley, Peter Prescott et Roger Miller (Martin Swope a préféré rester chez lui) goûtent enfin aux avantages qui leur étaient dus. "L’esprit qui règne dans le groupe est le même. La seule différence est que dorénavant, on nous paie après les concerts."
Le 3 octobre
Au Cabaret dans le cadre du Pop Montréal
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