Mike Watt : De longues minutes en enfance
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Mike Watt : De longues minutes en enfance

Mike Watt est devenu au début des années 80 une légende du rock alternatif américain avec le succès des Minutemen. Des épreuves et des maladies ont suivi, et l’homme adhère aujourd’hui à une philosophie bien claire: conserver son esprit de gamin de 8 ans dans le corps d’un homme qui en a 47.

Avec la disparition de Joe Strummer et les Ramones qui tombent un à un, pas évident d’être un vétéran punk-rockeur en ce début de siècle. Il y a bien quelques jeunes loups qui vous citent çà et là en exemple, mais autrement, le poids de l’âge, décuplé par les multiples abus, vous rattrape avant même que vous ayez pu orchestrer votre nostalgique tournée en réunion. Conséquence: le fait de réussir à repousser l’échéance marque un homme au fer rouge.

"C’est un jeune médecin qui m’a regardé droit dans les yeux et m’a dit: "M. Watt, je vais vous sauver la vie"", raconte le bassiste Mike Watt, ex-membre des fiREHOSE et surtout des Minutemen, groupes qui ont marqué la Californie au début des années 80 avec des pièces difficilement catégorisables (disons punk-rock-funk). Si les plus vieux se rappellent de Double Nickels on the Dime, album double en réponse au Zen Arcade d’Hüsker Dü, les plus jeunes connaissent le groupe souvent sans le savoir puisque la pièce Corona a servi de thème à la populaire et controversée série Jackass.

En 2000 donc, Mike est hospitalisé d’urgence à la suite d’une infection au périnée mal diagnostiquée. De fait, une première visite chez le docteur lui avait assuré que ses douleurs s’avéraient mineures. Son état s’est dégradé et Mike a vécu 38 jours de fièvre intense. "Je ne peux pas te dire combien de fois je me suis rendu à l’hôpital et combien de jours j’y ai passés", soupire celui qui a dû aussi négocier jeune avec la mort du chanteur des Minutemen, D. Boon, en 85. "Sans assurance maladie, j’ai tout payé de ma poche. Des années d’économies et de travail y sont passées."

Le dernier-né de Watt, The Secondman’s Middle Stand, fait état de cette période introspective. Les Minutemen ont beau avoir bâti leur réputation avec des pièces dépassant rarement les deux minutes, ce nouveau disque propose neuf titres de punk progressif chaotique pour un total de 53 minutes: l’équivalent d’un disque triple des Minutemen! "Je vois l’album comme un opéra musical. Puisque les thèmes abordés découlent entre autres de la souffrance et des hôpitaux, je me suis dit qu’aucune autre musique que le prog pouvait mieux exprimer cet enfer. Nous avons alors troqué les guitares pour un orgue B3."

L’album amène aussi à réfléchir sur cette crise existentielle qui frappe les hommes dans la quarantaine. "Depuis notre naissance, on nous impose des choix et des valeurs. Cette crise nous éveille à nos propres désirs, ce que ma maladie a accentué. À 47 ans, plusieurs cherchent à revivre leur vingtaine, souvent associée à la liberté. On les voit en décapotable au bras d’une femme plus jeune qu’eux. Moi, je suis revenu directement à l’âge de 8 ans. Mon plaisir consiste à jouer de la basse avec les copains, à faire du kayak et à me promener à vélo. Je prends aussi conscience du temps qui file. J’ai mis sept ans avant de lancer mon dernier disque; dorénavant, je veux produire un album par année." On se téléphone donc dans un an pour discuter de la nouvelle galette? "Entendu!"

Le 11 octobre
Au Centre culturel Mile End
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