Amélie Veille : Fille de lumière
Amélie Veille ne manque pas de causette. À tout propos, la rayonnante jeune femme partage de bon cœur ses réflexions, de même qu’elle prête à ses jolies chansons la plume franche et sensible d’une artiste dans la fleur de l’art.
Il suffit de l’interroger sur sa fascination envers cette drôle de bestiole humaine pour qu’Amélie Veille glousse de plaisir et vous livre le fin fond de sa pensée, les yeux pétillants et le verbe fluide. "Ça, j’aime ça ces questions-là", livre-t-elle, ne sachant trop par où commencer. On s’en doutait un peu. Car sur son premier album éponyme (Passeport, 2003), l’auteure-compositrice-interprète et guitariste de 23 ans explore la question sous bon nombre de ses coutures. "Quand on regarde le monde aller ou quand on se regarde juste nous-mêmes, il n’y a pas de fin à ce qu’on peut découvrir, expose-t-elle. Les gens sont complètement imprévisibles, et les événements aussi. Quand on pense qu’il va arriver quelque chose, il n’arrive jamais ce qu’on croyait. C’est vraiment rempli de surprises! Les émotions humaines sont tellement paradoxales; lorsqu’on cherche à comprendre, il y a un paquet de pistes de réflexion… On n’a pas fini de faire des chansons qui touchent aux émotions! Il y a huit notes dans la gamme, il y a je ne sais combien de mots de disponibles, il y a tellement de tounes qui ont été écrites sur différents sujets et un paquet de chemins distincts qui ont été empruntés; on est encore loin d’avoir fait le tour! J’ai l’impression que c’est inépuisable…"
LA PLUME ENCHANTÉE
Si les sources d’inspiration pullulent, une dose appréciable de discipline s’avère nécessaire pour en traduire le sens, en extraire l’essence. Mais trop vouloir forcer la plume peut compromettre la pleine gestation d’un texte, croit-elle. "J’écris encore tous les jours, c’est sûr, mais j’ai "slaqué" un peu, parce que je me suis rendu compte que je pressais beaucoup trop le citron, confie-t-elle. Je m’astreignais à une période de deux heures par jour, tous les matins, et un moment donné, j’ai eu l’impression qu’il y avait des choses qui devaient se vivre à l’intérieur. Comme un bébé. Ça prend neuf mois à se faire dans le ventre puis si t’accouches trop tôt, il ne sera pas formé. Il faut laisser le temps aux choses de s’installer en dedans", explique-t-elle, ajoutant que certains champs émotifs sont plus difficiles à dépeindre que d’autres. "C’est plus difficile d’écrire sur le bonheur, je pense", risque-t-elle. Pourquoi? "Je ne sais pas. On dirait que c’est… pas intéressant", laisse-t-elle échapper dans un nouvel éclat de rire. "En fait, je pense qu’une chanson c’est là pour bien des choses, mais surtout pour soigner ou apaiser une certaine forme de souffrance. Alors il y a beaucoup plus de chansons qui vont parler de trucs douloureux… Mais moi, je n’écris pas dans la tristesse, par exemple. Pas sur le coup. Je vais écrire, mais juste un amas de mots qui ne voudra rien dire. La poussière retombe, puis après, on dirait que ça sort mieux. Ça me prend du recul…"
Parmi cette vaste palette de sentiments, l’amour et ses tortueux dédales ont toujours conservé une place privilégiée chez les créateurs. La native de Saint-Georges de Beauce, installée à Montréal depuis maintenant quatre ans, n’y échappe pas: plus de la moitié des 12 pièces de son album y sont consacrées. Cela pourrait-il découler de son "penchant pour les indésirables", tel qu’évoqué sur la piste cachée? "Le lien est intéressant, s’esclaffe-t-elle. Sûrement!.. C’est vrai que je parle d’amour pas mal, parce qu’on avait quand même un grand choix de chansons pour l’album, puis on en a choisi beaucoup qui traitaient de ça… La difficulté d’aimer, c’est vraiment un fléau aujourd’hui. Il y a beaucoup de couples qui éclatent. Autour de moi, ça revole souvent, et ça m’a inspirée beaucoup pour l’album", poursuit-elle. Concédant un modeste vécu dans le domaine, elle apporte néanmoins son avis quant à l’ingrédient primordial au bon succès de la recette. "Ça prend une communication très, très forte pour être capable de s’harmoniser. Mais aujourd’hui, c’est drôle parce qu’on vit dans un monde chargé d’ondes; avec les téléphones cellulaires et Internet, on a plus que jamais accès aux moyens de communication, et pourtant, est-ce que la communication entre les humains s’en porte mieux? Je trouve que c’est une contradiction intéressante…"
PARTIE DE PLAISIR
Toutes ces préoccupations, elle les condense en musique et poésie. Puis, c’est avec fébrilité et ravissement qu’elle vient présenter un spectacle tout frais, entourée de ses nouveaux complices Mario "Toyo" Chagnon (direction musicale, guitares), Éric Maheu (basse) et Bertil Schulrabe (batterie). "J’ai plus de ressources que j’en ai jamais eu et je me sens vraiment bien entourée!" dit-elle du concert mis en scène par François Léveillée. "Avec une batterie et des guitares électriques, je peux me permettre de rocker, ce que je ne pouvais pas faire avant, et quand on fait des chansons, on réussit à créer des ambiances avec des plus belles textures. La conception sonore et l’éclairage (Pierre Desrochers) sont beaucoup plus étoffés, alors j’ai l’impression que je vais pouvoir être mise en valeur davantage. Je me sens mieux sur scène et en confiance avec l’équipe, alors j’ai encore plus de plaisir à jouer. Je pense que ça transparaît…"
Le 18 novembre, 20h
À la salle Jean-Despréz