Blonde Redhead : L'insoutenable légèreté
Musique

Blonde Redhead : L’insoutenable légèreté

Blonde Redhead revient nous montrer que la beauté est fatale mais que la misère est un papillon via ses mélodies mélancoliques et virevoltantes. Parce que la catastrophe a son charme.

On a beau écouter et réécouter Misery is a Butterfly, dernier album du trio italo-japonais paru au printemps, on cherche encore comment naît cette alchimie du fatal et du délicat, ce fragile équilibre qui origine dans la rencontre entre la catastrophe et la grâce, cette impression de couleur vert-de-gris qui s’attache à la musique de Blonde Redhead, vert jade et translucide à la lumière mais gris-mauve opaque une fois le jour tombé. Et on en vient à soupçonner ces gens-là de savoir où vont mourir les papillons.

Formé à New York en 1993 à l’issue d’une rencontre d’étudiants en arts, le groupe fut rapidement repéré par Steve Shelley, batteur de Sonic Youth, qui produisit leur premier album après avoir été contaminé par la musique douce-amère et le romantisme rentré du quartette devenu trio depuis. "À trois, c’est parfois plus difficile. Lorsque nous sortons, il y en a toujours un qui, inévitablement, se retrouve seul. L’équilibre est plus ardu à atteindre en ce sens", raconte Amedeo Pace, la voix masculine/androgyne que l’on entend sur quelques pièces.

Souvent associé au son new-yorkais bien que ni Amedeo ni Simone (son jumeau de frère), venus d’Italie, pas plus que la Japonaise Kazu Makino n’en soient originaires, Blonde Redhead est parfois rapproché de Sonic Youth dans ses premières années. Certains y ont vu une parenté avec Goldfrapp, et même une filiation à la culture française. "Nous avons grandi entourés de musique française, mes parents en écoutaient beaucoup à la maison. Quant à Kazu, les sensibilités française et japonaise sont très différentes mais elles se rejoignent dans la délicatesse. Nous aimons beaucoup Serge Gainsbourg, cet artiste spécialement moderne et ouvert d’esprit", précise Amedeo, qui connaît aussi très bien Montréal pour y avoir habité durant sept ans.

UN CERTAIN SENS DE LA TRAGÉDIE

Collant parfaitement à la musique, les textes de Blonde Redhead – nommé ainsi en écho à une chanson du groupe de la scène "no wave" DNA – méritent une lecture attentive. Un homme qui apprend à tomber et apprivoise l’art de la chute (Falling Man), la femme-éléphant nous entretenant de ses tourments et tristesses (Elephant Woman), l’histoire très belle d’une fille et de son désir de symbiose avec un cheval (Equus) sont au nombre des rencontres qu’on y fait. À propos d’Equus, Amedeo fait un retour sur les événements tragiques qui se sont abattus sur eux et particulièrement sur Kazu, dont la mâchoire fut fracturée et les dents émiettées à la suite d’un grave accident équestre: "Le cheval était blessé à une patte et personne ne le savait. Kazu se dirigeait sur un obstacle. C’est à l’atterrissage que ça a mal tourné: le cheval s’est immobilisé et elle est tombée. Elle voulait écrire sur ce cheval-là et, d’une certaine façon, sur ce qui lui est arrivé, raconte Amedeo Pace, visiblement encore ébranlé par l’accident de son amie. Au moment où nous cherchions un titre pour l’album, Kazu était encore clouée au lit. Quelqu’un lui a donné un livre intitulé La Société secrète des papillons. On s’est mis à le feuilleter et à s’intéresser à toutes ces histoires de papillons. Ce livre a quelque chose à voir avec le titre que nous avons fini par donner à l’album."

Le 23 octobre
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