Ensemble Romulo Larrea : Le Québec sauce tango
L’Ensemble Romulo Larrea et la chanteuse Veronica Larc donnent à des joyaux de la chanson québécoise les couleurs et l’énergie du tango.
Dans son Uruguay natal, à Montevideo, Romulo Larrea naît, pour ainsi dire, un bandonéon entre les mains: "Dans les années 50, on retrouvait un bandonéoniste à tous les coins de rue, dans tous les quartiers. Être bandonéoniste, cela avait quelque chose de prestigieux, comme un joueur de soccer. Les gens savaient qu’il veillait tard." Après avoir longtemps fait carrière par la suite à Buenos Aires, il débarque à Montréal en 1978. Vers la fin des années 80, il travaillera avec Astor Piazzolla en Amérique du Sud. C’est à la suite de cette expérience déterminante qu’il fonde à Montréal, en 1990, l’ensemble qui porte son nom. Il s’agit d’une formation de sept instruments regroupant le trio traditionnel de tango (bandonéon, piano et contrebasse) et un quatuor à cordes classique (violons, alto et violoncelle). Veronica Larc, la fille du maestro, excellente interprète tant à la guitare qu’à la voix, assiste Larrea pour les arrangements.
À l’intérieur du concept "Tango: créateurs de chez nous", l’Ensemble Romulo Larrea a déjà réalisé Le Tango de chez nous, offrant des arrangements originaux d’auteurs-compositeurs-interprètes comme Gilles Bélanger ou encore Richard Séguin (la magnifique Par delà l’océan). En compagnie de Veronica Larc, les musiciens récidivent avec Tango du cœur, composé de 14 pièces, dont 7 chantées: "Ce qui a motivé le choix des chansons, c’est que ça correspondait à des sentiments. Des coups de cœur (la raison du titre). On a un problème aujourd’hui: on fabrique de la relève et, cinq minutes après, c’est fini. On néglige d’explorer des figures de premier plan. Notre choix repose sur les paroles, sur la mélodie, sur des questions de construction."
Le tango semble apte à traduire la mesure du temps qui passe, la quête d’identité, à suggérer comment l’amour et la mort, la création et la destruction sont des couples indissociables. Larrea et Larc ont retenu l’eau comme fil conducteur. Les chansons de Gilles Vigneault (Pendant que), de Claude Gauthier (Le Plus Beau Voyage) et de Sylvain Lelièvre (Le Vent du fleuve) sont traversées par l’eau. "Ce que j’apprécie chez Sylvain, c’est qu’il s’agit d’un auteur, d’un compositeur et d’un poète. C’est peu familier", dira Larrea. Et de renchérir à propos de la chanson de Gauthier: "C’est le rêve d’un Québécois. C’est un moment magique. Il y a un aspect rythmique qui vient de la musique latine. L’interprétation est très intimiste."
Dans la plupart des chansons, la nature agit en contrepoint. L’Ensemble interprète Le Petit Pont suspendu de Félix Leclerc: "Dans l’enregistrement de Félix, dans les années 40, ce dernier dit qu’on chante alors le tango!" Larrea, qui dans les années 80 a travaillé avec Pauline Julien, tenait à avoir une pièce d’elle: "L’Étranger, il n’y a rien qui ressemble plus à notre état d’esprit." L’Ensemble reprend aussi une pièce de Jean-Pierre Ferland, Je reviens chez nous, sous la forme d’une habanera, cette lente danse cubaine qui constitue, avec la milonga et le candombé, une des origines du tango, et qui offre tant de sensualité. Pour la chanson de Daniel Lavoie Ils s’aiment, qui met en scène un "couple qui avance et recule", le tango sert très bien la progression musicale qui débouche sur un cri du cœur.
Le 11 novembre à 20 h
À la Salle Dina-Bélanger