Daniel Lavoie : Poèmes chantés
Daniel Lavoie s’offre deux nouvelles dates au Corona, fort d’un spectacle qui a séduit le public et la critique des deux côtés de l’Atlantique.
À l’écoute du dernier opus de Daniel Lavoie, Comédies humaines, on ne peut s’empêcher d’établir un parallèle avec les disques qu’a consacrés Léo Ferré aux textes de poètes comme Rimbaud, Baudelaire et Aragon: même profondeur dans les mots, même dignité dans l’interprétation, même envergure dans les arrangements. Ainsi, grâce à la réalisation soignée de Jean-François Berger et Philippe Eidel, qui "soumet" la musique à la voix de Lavoie et à la densité des textes de Brice Homs et Patrice Guirao, on a la (très rare) impression qu’une chanson, c’est en fait de la poésie chantée. "Ferré est mon mentor, mon maître à penser. J’admire sa façon de faire résonner la langue française. Il était donc normal que je veuille faire un disque comme Comédies humaines, avec sa poésie et sa sensualité", confie le chanteur.
Un disque aussi très à contre-courant de l’industrie. À 55 ans bien sonnés, après 30 ans de métier et dans un marché difficile pour les "chansons à textes", le Manitobain d’origine avait envie de proposer une alternative à ce que font jouer les radios commerciales. "Et puis, on ne peut pas tous être des Richard Desjardins ou des Pierre Lapointe! Je me suis donc fait plaisir: j’ai fait ce que j’ai voulu tout en sachant que les radios ne toucheraient pas à la majorité de ces nouvelles chansons. J’ai fait un disque qui ne marcherait pas commercialement, mais que je prendrais plaisir à aller défendre devant un public."
Avouant ne pas avoir eu le courage de monter seul sur scène, Lavoie s’est adjoint les services du multi-instrumentiste Francis Covan (accordéon, violon, guitare, bouzouki et mandoline) pour assurer la défense de Comédies humaines. Il a également fait appel au chanteur, cinéaste et vidéaste Néry (La vie, c’est de la viande qui pense, Les Nonnes Troppo, Super Trollop) pour bâtir une mise en scène très théâtrale, qui envoûte progressivement le spectateur. Un pari risqué… qu’il semble avoir gagné, si l’on en juge par l’enthousiasme des critiques et du public: "J’aime faire travailler les gens qui viennent me voir en spectacle. Je veux leur présenter un show qui ne les prend pas pour des cons, je tiens à ce qu’ils s’engagent eux aussi dans l’aventure. Et tout le monde sourit en sortant de la salle, même si je chante des chansons sérieuses."
Chansons sérieuses, certes, parce que la vie apporte chaque jour son lot de petites morts et de laideurs. L’homme en est conscient et sait le dire – et le chanter – avec sérénité. "C’est un peu l’idée qui se cache derrière le concept de la pochette de l’album: mon visage est à la fois serein et troublé (grâce au maquillage inspiré du théâtre japonais kabuki). Cette dualité me fascine depuis toujours. En chacun de nous se terre un bourreau, un assassin. Et dans certaines situations extrêmes, comme une guerre ou un génocide, ce côté sombre prend le dessus. Je me suis toujours demandé comment je réagirais en pareilles circonstances…"
De travailler avec des paroliers de la trempe de Homs et Guirao lui a fait retrouver le goût d’écrire cette humanité. Déjà quelques nouvelles chansons sont en chantier. C’est donc dire que nous n’aurons pas à attendre cinq autres années avant d’entendre la suite de Comédies humaines.
LES 3 ET 4 DÉCEMBRE
AU CORONA
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