Les Cowboys Fringants : Nouveau western
Les Cowboys Fringants reviennent enhardis de leur grand Break syndical et sont fin prêts à célébrer La Grand-Messe. Veuillez vous lever…
RETOUR EN SELLE
À peine un mois et des poussières après leur mémorable assaut du Centre Bell, la cow-girl et les quatre plus fringants cow-boys de la province se retrouvaient dans un chalet loué à Saint-Charles-de-Mandeville, dans la belle région de Lanaudière. Au programme: ressourcement et repos bien mérité après la paire d’années effrénées ayant suivi la parution de Break syndical (La Tribu, 2002), mais aussi, et surtout, lancée des premières bases de son successeur tant attendu, miraculeusement apparu près de six mois avant l’échéance fixée. "Ç’a tellement bien été; c’est l’enfer!" s’exclame Marie-Annick Lépine (cordes et claviers multiples, flûtes, voix et arrangements des cordes), ne cachant pas sa fébrilité à moins de 24 heures du lancement de La Grand-Messe. "Parce que nous autres, on pensait le sortir au printemps, et finalement, je ne sais pas trop ce qui s’est passé; même le gars qui nous enregistrait (Robert Langlois) n’en revenait pas de voir à quel point on s’était améliorés depuis Break syndical… Mais veux, veux pas, quand tu fais 170 shows en deux ans, tu apprends à bien connaître ton instrument. On est donc arrivés prêts en studio et ç’a roulé très vite…"
Même scénario en matière d’écriture, raconte Jean-François Pauzé (guitares, voix, boîte à rythmes et harmonica), auteur et compositeur de la grande majorité des 16 nouvelles pièces. "J’avais une bonne banque de mélodies et les textes me sont venus assez rapidement; ç’a n’a pas été une torture, contrairement à l’album précédent, qui avait été beaucoup plus difficile… Puis Marie-Annick, de son côté, a travaillé très fort sur les arrangements, chez elle, poursuit-il. Je pense qu’elle a joué à peu près de 15 instruments différents sur cet album-là; elle a fait un travail énorme. On avait envie de faire un disque un peu plus étoffé et plusieurs des chansons s’y prêtaient bien…" Cordes, cuivres et interludes transitoires polis rehaussent en effet ces 62 minutes d’agrément sonore qui, entre chevauchées trad-rock débridées et poignantes ballades country-folk, restent fidèles à l’esprit du groupe, se permettant aussi quelques tournoiements de lasso vers l’est de l’Europe ou certaines contrées latino-alternatives pouvant évoquer Manu Chao.
LA VERTE CAUSE
S’ils maintiennent fermement dans leur ligne de mire les politiciens fallacieux, les inégalités sociales toujours grandissantes, l’implacable logique du profit, l’apathie endémique d’un trop grand nombre de citoyens et la funeste société de surconsommation (ayant d’ailleurs inspiré le titre de l’album), les verveux cavaliers font de la protection de l’environnement leur principal cheval de bataille sur La Grand-Messe. "C’est un sujet qui nous préoccupe énormément, confirme Jean-François. On s’est impliqués pas mal dernièrement, avec la Coalition Québec Vert Kyoto, Stop Bennett et tout ça; on s’est liés d’amitié avec des gens qui militent dans des conditions souvent pas évidentes, qui n’ont jamais une cenne, ni l’appui des médias de masse… C’est vraiment ce qui nous touche le plus ces temps-ci, et je pense que ça va de soi. Le monde peut dire: "Ah! Les Cowboys endossent des causes pour lesquelles tout le monde va être d’accord, puis l’environnement, c’est plutôt à la mode par les temps qui courent…" Mais en même temps, tu ne peux pas être contre ces valeurs-là, qui sont de plus en plus importantes et nécessaires dans l’époque où l’on vit. Il en va quand même de notre avenir", ajoute-t-il, se réjouissant néanmoins de l’intérêt croissant que semblent porter les Québécois à la question. "On se réveille tranquillement, mais ça ne fait pas longtemps. En France, ça fait plusieurs années qu’ils militent pour l’environnement; en Amérique, ça commence tout juste. On en parle de plus en plus. Puis, écoute, ils ont reculé pour le Suroît, en tout cas pour l’instant, grâce entre autres à Québec Vert Kyoto et à toutes les manifestations… Plus la population est conscientisée, plus je crois qu’on va aller dans la bonne direction. J’ai l’impression qu’il y a encore de l’espoir, mais il est comme vraiment temps de se réveiller; c’est pour ça qu’on a emboîté le pas nous aussi…"
LÂCHER LA BRIDE
Mine de rien, la populaire formation complétée par Karl Tremblay (voix), Jérôme Dupras (basse, contrebasse, guitares et chœurs) et Dominique Lebeau (batterie, percussions, boîte à rythmes, claviers, guitares et chœurs) est à l’œuvre depuis déjà 10 ans. Et plusieurs de ses membres approchent lentement mais sûrement de l’énigmatique trentaine. "C’est sûr qu’il y a des petites remises en question quand t’arrives à 30 ans, confie Jean-François. J’embarquerai pas dans les détails parce que c’est plus personnel, mais on a des petites crises de trentaine qui commencent à arriver dans le groupe, et peut-être des petits changements sur le plan de nos vies privées…" "Sur cet album-là, je pense qu’il y a une maturité assez évidente dans l’écriture de Jean-François, note Marie-Annick. Il parle plus de la vie. Il y a un petit peu moins de personnages, et il traite beaucoup plus de choses personnelles… Je pense que les gens vont encore se retrouver là-dedans parce que ça ne parle pas de choses vagues, mais plutôt de trucs bien terre à terre, avec les mots simples du quotidien…" Souhaitant ardemment satisfaire leur vaste public avec ce nouvel album et la grande tournée qui s’étirera jusqu’en mai prochain, Les Cowboys Fringants servent leur traditionnelle ration d’humour lorsqu’on leur demande où ils imaginent le groupe dans 10 ou 15 ans. Karl: "On pense peut-être faire des remix techno de nos vieilles chansons, avec des DJ…" J.-F.: "Puis on va faire un opéra rock…" Karl: "Avec des vestons pastel à épaulettes, puis des queues de cheval assorties à nos calvities prononcées…" J.-F.: "Avec des pantalons bouffants… Puis on pourrait aussi ressortir nos vieux suits!" Ça promet.
Les Cowboys Fringants
La Grand-Messe
(La Tribu/Select)