Vieux Clocher : Bonne fête, Vieux Clocher!
Musique

Vieux Clocher : Bonne fête, Vieux Clocher!

En 30 ans, le Vieux Clocher de Magog est devenu une institution incontournable dans le monde du spectacle québécois. Rencontre avec le proprio de la place, Bernard Caza.

L’histoire du Vieux Clocher est intimement liée à celle de Bernard Caza. Si l’homme d’affaires n’a pas créé l’institution de la rue Merry, on peut dire qu’il l’a mise au monde en lui donnant une vocation unique au Québec: celle d’une salle où l’on présente, en grande partie, des nouveaux spectacles.

Le Vieux Clocher est reconnu à travers la province comme salle de rodage. Depuis 30 ans, une quantité impressionnante d’artistes y ont fait leur baptême des planches professionnelles. Que l’on pense aux Patrick Huard, Rock et Belles Oreilles, Michel Courtemanche, Jean-Michel Anctil et François Morency, pour ne nommer que ceux-là. Bon nombre d’artistes comme Richard Desjardins, Claude Dubois et Clémence Desrochers y sont venus pour roder leur spectacle. Un aspect qui n’a rien de péjoratif selon Bernard Caza, au contraire. "La première fois, c’est toujours unique! s’enthousiasme-t-il. Plein de choses ont été expérimentées au Vieux Clocher. Il y a eu beaucoup de naissances ici."

Bernard Caza fait rouler le Vieux Clocher depuis 23 ans. Il a racheté en 1981 l’institution lancée par Jean-Claude Gosselin et la troupe des Baladins. Les choses n’ont pas toujours été faciles. Caza a même dû crécher au Vieux Clocher dans les débuts. "Mais très vite, j’ai compris qu’il fallait faire des choses nouvelles pour se démarquer. Je suis le premier à avoir lancé les séries de spectacles de cinq ou six semaines en été. Dans le temps, il n’y avait que du théâtre d’été", raconte-t-il.

"Presque partout, on propose un spectacle pour une soirée, poursuit le volubile homme d’affaires. Ici, quand t’embarques un artiste pour six semaines, les gens se disent: "Eh! Il doit être bon!" Et le bouche à oreille fait son œuvre."

C’est ainsi que des vedettes sont "nées" au Vieux Clocher. Comme Patrick Huard, qui est venu passer deux mois à Magog en 1994. La salle n’hésite pas non plus à réserver à la relève des soirs de "grandes sorties", comme le dit Caza. Un Julien Tremblay ou une Julie Caron peuvent ainsi tenir l’affiche durant quelques week-ends au Vieux Clocher.

Au total, environ 150 shows sont présentés à Magog durant une année, et tout autant à Sherbrooke, où un second Vieux Clocher est né en 1997. "Le Vieux Clocher a un peu vécu l’histoire des grandes variétés du Québec."

PETITE HISTOIRE DE CAZA

Bernard Caza a occupé différentes fonctions avant de tenir la barre du Vieux Clocher, dont celle de formateur en croissance personnelle. "Mais j’avais le goût de travailler avec des créateurs", raconte-t-il. Il a donc tout lâché et est parti durant un an avec le groupe de jazz Démesure. "Je faisais tout: gérant du groupe, sonorisateur, conducteur du camion…" C’est à son retour qu’il acquiert le Vieux Clocher.

Caza a commencé à développer sa fibre de producteur à l’Université de Sherbrooke. Pendant son baccalauréat en lettres québécoises, il dirige le journal étudiant et en profite pour critiquer vertement la programmation de la "grande salle", comme il appelle la Salle Maurice-O’Bready. "Le directeur de la salle m’a dit: "Si t’es si fin, fais-le!" C’est comme ça que j’ai commencé à faire de la production de spectacles." De 1970 à 1973, il s’occupe donc d’une boîte à chansons logée dans la petite salle du Centre culturel.

Malgré son amour des artistes et son immense respect pour eux, Caza ne serait pas du genre à chanter Le Blues du businessman. Le diffuseur et gérant d’artistes écrit de la poésie, joue de divers instruments, mais "sait aussi faire arriver des chiffres". Un don familial, semble-t-il, puisque son père était comptable et que son frère est à la tête des Biblairies GGC.

Ce don, Bernard Caza le met aussi au service de quelques artistes, car en plus de diriger ses deux salles de spectacle, il gère la carrière de Jean Lapointe, de Julien Tremblay, de Lévesque et Turcotte, de Vincent Vallières et d’un nouveau duo d’humoristes, Louise et Anne. Il s’est aussi occupé de Kevin Parent pendant six ans. Comment décide-il de prendre un artiste sous son aile? "Il faut que j’aime ce qu’il fait et que je sois bien avec lui. Un artiste, c’est comme un enfant de plus que tu as. Ça demande beaucoup d’investissement personnel et financier."

Une des clés du succès de Caza serait son flair. "On a eu du pif en présentant différents spectacles qui correspondaient à un public", souligne celui qui ne veut surtout pas s’attribuer tout le crédit de la réussite de sa boîte. "Le Vieux Clocher, c’est une famille!"

UN WEEK-END À L’IMAGE DU VIEUX CLOCHER

Le premier spectacle au Vieux Clocher a eu lieu le 7 décembre 1974 avec Jean-Guy Moreau. C’est donc l’anniversaire de la fameuse boîte ce week-end. Pour souligner l’événement, Bernard Caza a pensé inviter Luce Dufault, qui présentera son spectacle Bleu. La chanteuse a effectué différents passages au Vieux Clocher durant sa carrière, d’abord à titre de choriste de Dan Bigras et ensuite en solo.

Du côté de Sherbrooke, la programmation fait un beau clin d’œil à l’une des vocations du Vieux Clocher: la relève en humour. Ce samedi, on présente le Gala Découvertes 2 du Grand Rire Bleue avec quatre humoristes encore peu connus: Stéphane Poirier, Dave Richer, Denis Levasseur et Patrik Kuffs. Dans une mise en scène de Jean-Marie Corbeil se succèdent les numéros diversifiés des quatre humoristes: Stéphane fait dans le stand-up, Denis se glisse dans la peau de personnages, Dave parle de sa condition réelle de handicapé et Patrik est magicien mentaliste. "Aussitôt qu’on a été tous ensemble, ç’a été magique, s’exclame Stéphane Poirier. Jean-Marie Corbeil a su créer une ambiance autour de nous. Quelque chose de très l’fun."