Allan Lewis : Histoire de famille
Allan Lewis, nouveau chef invité de l’Orchestre des Grands Ballets Canadiens de Montréal, dirigera la musique de Tchaïkovski pour la 41e édition du traditionnel Casse-Noisette.
On estime que près de deux millions de spectateurs ont assisté à des représentations du Casse-Noisette des Grands Ballets Canadiens de Montréal depuis 40 ans. L’histoire ne dit pas combien l’ont vu étant enfant et y emmènent aujourd’hui les leurs, mais ils pourraient être nombreux à vouloir revoir la chorégraphie que Fernand Nault a imaginée en 1963 pour constater qu’aujourd’hui encore, la magie du tandem Nault/Tchaïkovski opère et que l’œuvre n’a rien perdu de sa fraîcheur. Une fraîcheur bien entretenue d’ailleurs, puisque les GBCM dépensent chaque année 150 000 $ pour revamper les différents décors et les costumes des 150 personnages. Le roulement parmi les 90 danseurs et danseuses assure aussi à l’œuvre un renouvellement perpétuel. Et il y aura cette année un changement à un autre poste important: celui de chef d’orchestre.
C’est le chef américain Allan Lewis qui a été choisi pour diriger l’orchestre lors des productions qui en réclament un (généralement deux par saison), après que Jacques Lacombe eut laissé la place qu’il occupait depuis 1991. Lewis a débuté avec les Grands Ballets la saison dernière dans Pureté Balanchine, avec Beethoven et Webern, et a ouvert cette saison avec la musique de Prokofiev pour Roméo et Juliette.
Ce n’est pas le premier venu que l’on est allé chercher pour le poste. Allan Lewis, avec qui je me suis entretenu lors de son passage à Montréal en octobre dernier, a en effet une longue expérience du travail dans la fosse d’orchestre, ayant été directeur musical du Joffrey Ballet de Chicago durant plus de 20 ans. "J’ai débuté comme assistant pour Jean Morel, qui était mon professeur à Juilliard et qui dirigeait au Metropolitan Opera. Il y avait un programme de danse à Juilliard et c’est là que j’ai dirigé un orchestre pour la danse pour la première fois, et que j’ai compris que j’aimais ça." Il y a bien sûr une bonne différence entre diriger un orchestre sur scène, sous les feux de la rampe, et dans la fosse, loin des regards du public. Lewis poursuit: "Il y a surtout une grande différence d’attitude de la part du chef, qui doit vraiment être à l’aise avec l’idée de collaboration. Le spectacle sur scène, danse ou opéra, est un lieu de collaboration. On y travaille en interaction avec beaucoup de gens pour l’atteinte d’un but commun. Mais c’est difficile, parce que le chef est, comme chez Goldoni dans Arlequin serviteur de deux maîtres, au service de la musique, mais aussi au service du but commun." Le chef dans la fosse ne peut pas, autant que pourrait le faire celui qui est sur le podium, offrir "son" interprétation d’une œuvre. "C’est vrai, acquiesce le chef, mais on peut tout de même le faire à l’intérieur de certaines limites; les couleurs et les ambiances que distille l’orchestre ont toujours une grande importance, mais dans un cas elles sont inspirées par ce que font les danseurs. Si l’on est incapable de se plier aux règles de la collaboration et que l’on doit être le centre d’intérêt, évidemment, la fosse n’est pas le bon endroit… Mais un bon chef, quelle que soit la situation, doit au moins rechercher la collaboration de l’orchestre!"
Allan Lewis dirigera Casse-Noisette 15 fois avec les GBCM: "Oh, vous savez, je l’ai déjà dirigé une centaine de fois, mais j’en dirige un à la fois! C’est une œuvre particulière parce que, généralement, les musiciens la connaissent bien, alors je n’ai pas grand-chose à leur apprendre, mais le défi est de maintenir la qualité. C’est le facteur humain. Je commence toujours Casse-Noisette par un petit "discours de motivation" aux musiciens, parce que nous l’avons tous joué des dizaines de fois, mais il y a au moins un enfant dans la salle pour qui ce sera la première fois. Et ça, c’est très important."
Du 12 au 30 décembre
À la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts
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