The Dears : Montréal vu par…
Musique

The Dears : Montréal vu par…

The Dears rentrent au bercail après une tournée triomphale à travers l’Europe et les États-Unis. Rencontre avec un Murray Lightburn survolté, heureux d’être de nouveau dans ses affaires.

Tout juste rentrés de Los Angeles, les Dears sont de retour à Montréal… pour quelques semaines avant de repartir en direction de Londres, entre autres villes où la formation tient l’affiche, de plus en plus souvent à guichets fermés. No Cities Left, titre de leur album le plus marquant jusqu’à ce jour, apparaît dès lors comme une prémonition, une affirmation auto-hypnotique puisque après avoir écumé la Côte-Ouest américaine, charmé l’Espagne, la France et le Royaume-Uni, Murray Lightburn et les siens se rendront en Australie. Pour l’instant, le leader des Dears se réjouit d’être de retour dans son appartement à flanc de montagne, à la lisière du Plateau et du Mile-End. "On avait tellement hâte de rentrer, on était presque désespérés, on avait tous le mal du pays à la fin de cette tournée! On est arrivés hier soir, on a retrouvé nos amis, on est allés boire un verre et manger de la poutine, c’est le genre de choses qui nous manquent en tournée."

Tous les observateurs de la scène musicale montréalaise et mélomanes fous de musiques indie l’ont noté: il se passe quelque chose à Montréal, maintenant plus que jamais, la preuve en étant ces groupes qui font les choses à leur manière, sans compromis, anciennement confinés aux petites salles obscures de la ville mais qui récoltent désormais beaucoup d’attention, à une échelle plus vaste: The Arcade Fire, Les Georges Leningrad, The Stills, The Unicorns, et The Dears, bien sûr, qui figuraient sur la liste des 10 groupes à surveiller au cours de l’année du magazine Rolling Stone.

Pourquoi ici, pourquoi maintenant? "Je ne sais pas si on peut associer un son, un style à Montréal… Partout où j’ai donné des entrevues, on m’a questionné là-dessus, raconte le chanteur à la voix souple et chaude. En Espagne, tout ce que les gens se rappellent du Canada, en musique, c’est Bryan Adams! Je pense que c’est une question de timing; après la Suède, New York et Seattle, c’est peut-être au tour de Montréal? Je n’ai jamais été du genre patriotique mais ce qu’il y a de très spécial ici, c’est que c’est un endroit exceptionnel pour les artistes. Ça fait huit semaines que j’essaie de me remettre à écrire mais c’est peine perdue, je n’ai pas réussi à gribouiller une ligne; il faut que je sois à la maison pour ça, car mes paroles sont souvent très liées à l’atmosphère qui règne ici. Sans que je puisse expliquer pourquoi, je me sens connecté à la ville."

Plusieurs nouvelles salles ont ouvert au cours des dernières années; outre la Casa del Popolo et la Sala Rossa, on pense au El Salon, au Main Hall et au Salon vert, des endroits sur-stimulants, des lieux de création foisonnants, tous nichés sur l’artère où les différentes cultures qui composent la spécificité cosmopolite de la ville se rejoignent: le boulevard Saint-Laurent. "Je crois aussi que le Festival Pop Montréal a largement contribué à mettre Montréal sur la carte", ajoute le chanteur.

Sur la photo, on aperçoit les membres des Dears sérieux et confiants, le visage inondé de lumière, presque poseurs, plantés devant un ciel plombé, menaçant, qui ne semble pourtant pas les intimider. Et on se dit que cette photo est à l’image de ce que porte la musique des Dears, cette façon étrange d’assumer sa grandiloquence, cette manière d’être romantique sans le défaitisme qui vient souvent avec. Pour un titre aussi noir que The Death of All the Romance, combien de We Can Have It, Don’t Lose the Faith, Never Destroy Us et autres Warm and Sunny Days? "Ce qui s’est passé, c’est qu’on a commencé à écrire ces pièces en septembre 2001, quand le monde menaçait de s’écrouler et qu’on a dû apprendre à "dealer" avec ça. J’avais toutes ces choses en tête et je cherchais un rayon de lumière dans cet amoncellement embrumé. On voulait faire un album fort, optimiste. Des gens disent parfois qu’on est lugubres et sombres; moi je crois qu’il faut reconnaître le problème et le regarder en face si on veut pouvoir proposer des solutions par la suite."

Évitant élégamment le piège de l’ironie post-moderne, le groupe y va de morceaux audacieux, déclinés avec finesse et efficacité, alternant les moments de climax et d’accalmie. "Nous ne tombons jamais dans l’ironie et c’est ce qui fait que certains croient qu’on se prend au sérieux, qu’on est prétentieux. Or, ce n’est pas le cas. Je trouve ça insultant quand les gens nous qualifient de mélodramatiques, comme s’ils nous avaient pris en faute. J’aurais envie de leur dire que si ça leur paraît mélo, c’est peut-être parce qu’ils se sont désensibilisés…"

Les 18 et 19 décembre
À la Sala Rossa

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