Plastic Lite : Complot de robots
Plastic Lite écorche l’éthique humaine en présentant le premier album entièrement écrit et produit par une troupe de robots: Je suis un robot. La mission du groupe: faire accepter les androïdes aux humains et en convertir quelques-uns en chemin… Soyez avertis!
D’emblée, le concept peut paraître loufoque: cinq musiciens entretiennent le mythe d’être des robots malgré leur apparence humaine. Leur historique l’est tout autant. On raconte qu’un certain docteur Brain Goodworth voulait mettre sur pied un modèle de voiture électrique. Le ravitaillement énergétique de ladite voiture devait être assuré par la station-service Plastic Lite, entretenue par cinq "humanotomates" (une sorte d’androïde aux traits identiques à ceux des humains) nommés PL01, PL02, PL03, PL04 et PL05, ainsi que par un ordinateur central positron nommé Trebor. Goodworth rendit l’âme avant que le projet ne prenne vie et les cyborgs, réunis plusieurs années après avoir grandi dans des familles humaines dans la croyance d’être eux-mêmes des humains, décidèrent de se lancer en musique. Leur mission est semblable à celle qu’avait le docteur Goodworth à l’origine: celle qu’un jour, les humains et les robots vivent en harmonie. Biographie peu ordinaire, admettons-le.
C’est ainsi que les membres de ce sextet (si l’on inclut Trebor, présent en spectacle comme sur l’album) firent le coming out du siècle en admettant être des robots. Depuis, l’acceptation par le public est sans borne. "Les gens sont très ouverts aux robots. Ils acceptent de plonger dans l’univers", explique PL05, que certains connaissent sous le faux nom humain de Patrick Guérard. Plus encore, certains fanatiques vont même jusqu’à adhérer au projet en devenant eux-mêmes des robots! Il suffit d’une courte visite sur le site Web du groupe www.plasticlite.com pour appuyer la cause et recevoir son propre matricule.
Voilà maintenant quelque temps que Plastic Lite roule sa bosse de spectacle en spectacle, accumulant les supporteurs, humains comme machines. Les robots musiciens ont d’abord participé à d’innombrables concours pour se mesurer aux humains. "On voulait que les humains nous prouvent qu’ils nous acceptent. Et l’inverse aussi. Après tout, il n’y a aucun règlement qui interdit aux robots de participer aux concours", explique PL05. Habitué aux compétitions dans lesquelles une interprétation est toujours de mise, Plastic Lite perfectionne depuis des mois un remake des plus étranges. On pourrait s’attendre d’un groupe de robots qu’il nous lance une version techno de Roboto le robot, mais Plastic Lite ne se contente pas d’un tel accomplissement. La formation a plutôt ressorti du tiroir des oublis volontaires une pièce qui redéfinit le terme kitsch: Les Larmes de métal du groupe Soupir, dont faisait partie Normand Brathwaite au début des années 80. "On voulait une toune dont tout le monde se souvient mais que personne n’a en disque à la maison. Et en plus, y paraît que lorsque le docteur Goodworth est décédé, Trebor pleurait réellement des larmes de métal", raconte PL05, pince-sans-rire. Une fois de plus, l’acceptation par les hommes est inconditionnelle: Les Larmes de métal sont diffusées dans plusieurs radios universitaires et commerciales.
Mais derrière ce coup monté se cache le double désir de divertir et de passer un message. "C’est très ludique dans la forme, mais dans les textes, quand on s’y arrête, y’a une certaine critique. On est pris comme des clowns robots, mais on essaie de montrer la vision que les robots peuvent avoir des humains", rajoute PL05. Certes. Entrecoupées de sketches étranges et de mises en scène abracadabrantes, les multiples compositions de Je suis un robot révèlent un talent créatif plutôt impressionnant pour des androïdes. Piles vendues séparément.
Je suis un robot
Plastic Lite
(Bros Canteur)