Scissor Sisters : Célébration pop
Musique

Scissor Sisters : Célébration pop

L’objectif des Scissor Sisters: redorer le blason de la musique pop en lui restituant son véritable sens. Jusqu’à maintenant, le groupe new-yorkais peut parler d’une mission accomplie.

Selon le guitariste Del Marquis, de nos jours, rares sont les groupes pop capables d’écrire eux-mêmes leurs chansons ou de jouer d’un instrument de musique: "C’est drôle à dire, mais pour bien des gens, ça semble même terriblement étrange de voir sur scène des musiciens jouer des morceaux pop. Les nombreux groupes de musique populaire que j’ai eu la chance d’observer en grandissant ont depuis longtemps été remplacés par des figures de la pop. C’est-à-dire qu’on donne à une personne des chansons, on l’habille d’une certaine façon, puis on la fait monter sur scène. Le résultat est souvent décevant, les consommateurs sont déçus lorsqu’ils comprennent que l’artiste qu’ils voient sur scène ne représente pas véritablement le contenu de l’album qu’ils ont acheté", explique le guitariste en choisissant soigneusement ses mots. Tout ce qui se fait aujourd’hui n’est pas pour autant mauvais, souligne-t-il toutefois: "Certaines chansons sont très entraînantes. Mon seul regret, c’est que ceux qui les interprètent manquent souvent de profondeur, parce qu’ils ne s’interrogent pas sur ce qu’ils font", estime-t-il.

De toute évidence, les Scissor Sisters n’ont pas perdu de vue un fait essentiel: si la musique se veut parfois contestataire, elle est aussi un objet de réjouissance. "Des groupes comme Devo, B-52’s et Dee-Lite possédaient cette part de fantaisie qu’on retrouve dans notre univers", affirme Del Marquis. Sur disque, la folie des Scissor Sisters se traduit par un mélange des genres aussi foisonnant que festif. Le glam rock côtoie sans honte la musique pop et dance, tandis que sur scène, le sextuor composé des chanteurs Jake Shears et Ana Matronic, du bassiste/claviériste Babydaddy, du batteur Paddy Boom et des guitaristes Derek G et Del Marquis propose une performance alliant le burlesque, la grandiloquence des drag queens et l’énergie d’un concert rock. Un mélange qui semble au premier abord hétéroclite, mais qui prend tout son sens lorsqu’on voit un vidéoclip comme celui de la chanson Filthy/Gorgeous, qui a d’ailleurs failli être banni en Grande-Bretagne, à la grande surprise de Del Marquis: "Je pourrais, à la limite, comprendre qu’il soit diffusé seulement en soirée, mais je ne considère pas son contenu plus choquant que la violence qu’on voit parfois à la télévision", fait remarquer le guitariste, mal à l’aise. Il préfère visiblement s’en tenir à des sujets moins glissants, comme le succès retentissant du premier album des Scissor Sisters en Grande-Bretagne. "On ne s’attendait pas à être leur meilleur vendeur en 2004 (1,5 million d’albums vendus). Ça veut dire qu’environ 3 % de la population a acheté notre disque", s’exclame-t-il. À son avis, l’engouement des Britanniques pour Scissor Sisters s’explique facilement: "Ils sont plus ouverts musicalement. Contrairement aux Américains, ils n’hésitent pas à faire un détour de plusieurs centaines de kilomètres pour assister à un festival. Aux États-Unis, les amateurs de musique sont plus paresseux. Ils se contentent d’acheter ce que la radio leur propose", déplore le guitariste, qui se rappelle que dans les années 80, il n’était pas nécessaire de changer de chaîne pour entendre les succès de Dolly Parton, Hall & Oates, Michael Jackson et The Cure. "À l’époque, ce qui comptait, c’était la qualité, peu importe le style", conclut Del Marquis.

Au Spectrum
Le 16 janvier

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