Alain Lefèvre : Touches magiques

Alain Lefèvre a beaucoup fait parler de lui depuis un an, et d’André Mathieu, dont le Concerto de Québec (1943) enregistré avec l’Orchestre symphonique de Québec et Yoav Talmi pour Analekta a remporté un grand succès. À plus de 30 000 copies vendues et un Félix plus tard, on peut même parler d’un succès inespéré. Il l’a beaucoup joué cette année un peu partout aux États-Unis et a obtenu de très bonnes réponses du public. Rencontré chez lui, il explique: "C’est une aventure qui m’a mené beaucoup plus loin que je l’aurais cru. Je pense que le succès de ce concerto, malgré ses quelques faiblesses (il a quand même été écrit par un enfant de 13 ans!), vient du fait que les gens ont envie d’entendre du nouveau répertoire, des œuvres moins jouées." Le sujet du renouvellement du répertoire lui tient terriblement à cœur: "Je pense qu’il serait temps que les interprètes se donnent le mandat de présenter, par exemple, tous les deux ans une nouvelle pièce… C’est vers ça que je veux aller maintenant; c’est notre mandat, sinon nos compositeurs composeront pour qui?" On peut mesurer la ferveur de Lefèvre à faire connaître d’autres œuvres que celles du sempiternel répertoire que l’on nous sert toujours en l’écoutant présenter des œuvres les samedis matins sur les ondes d’Espace musique. On le verra aussi discuter de cette situation à l’émission de télé Les Francs-tireurs, à Télé-Québec, en février. "Si les gens connaissent si mal la musique classique, poursuit-il, c’est qu’on a mal fait notre job…"

Heureux d’avoir remis au goût du jour la musique de Mathieu, le pianiste persistera sur son prochain disque, à paraître en mars: "J’ai sélectionné une douzaine de pièces qu’il a écrites entre 4 et 22 ans… J’ai aussi demandé à un jeune compositeur, Boris Petrowski, d’écrire une œuvre pour lui rendre hommage; l’album se termine par la Valse de l’asile de Walter Boudreau, écrite pour la pièce L’Asile de la pureté, de Claude Gauvreau, que présentait le TNM l’année dernière. Gauvreau… Un autre génie détruit, parce qu’on est toujours à la remorque de ce qui se fait ailleurs sans rien voir de ce qui se fait chez nous…"

En attendant ces nouvelles œuvres de Mathieu, on pourra voir Alain Lefèvre à l’OSM cette semaine pour l’interprétation du célèbre Concerto pour piano d’Edvard Grieg, qu’il reprendra beaucoup en tournée par la suite. "C’est un cheval de bataille du répertoire pianistique. À partir de là, dois-je absolument le renouveler? Dois-je jouer plus vite ou plus fort que ce qui s’est déjà fait? En regardant la partition, j’ai été étonné par la précision des indications que Grieg y a mises. Visiblement, il avait une très bonne idée de ce qu’il voulait entendre! Dans ces conditions, je pense que la meilleure attitude, c’est de s’en tenir au texte." C’est Franz-Paul Decker, qui fut directeur artistique de l’OSM de 1967 à 1975, qui dirigera l’orchestre (au même programme, la Symphonie alpestre de Richard Strauss). Alain Lefèvre n’a jamais eu le plaisir de partager la scène avec lui: "C’est un homme qui a une carrière fabuleuse. Ce ne sera peut-être pas la version la plus romantique du concerto, mais on tâchera d’en faire une qui soit exacte."

Les 8 et 10 février
À la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts

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À L’AGENDA

Regards croisés

L’ensemble Constantinople est bien connu pour ses interprétations orientalistes de musiques médiévales et de la Renaissance. Cette fois, l’ensemble a fait appel à des compositeurs bien vivants pour créer un dialogue entre le passé et le présent. Au programme, des œuvres de Nicolas Gilbert, Vincent-Olivier Gagnon et Cléo Palacio-Quintin (du Québec) et d’Evrim Demirel (de Turquie). Du 3 au 5 février, au Théâtre La Chapelle. (514) 843-7738.

Passion

Angèle Dubeau et son ensemble à cordes La Pietà présentent un nouveau spectacle basé sur les pièces de leur plus récent album, Passion (Analekta). Au programme, des œuvres d’Enescu, de Manuel de Falla, de Bizet, de Gershwin (arrangé par Vic Vogel) et du compositeur japonais Joe Hisaishi, avec lequel l’ensemble a récemment fait une tournée au Japon. Les 4 et 5 février, à la salle Ludger-Duvernay du Monument-National. (514) 871-2224.

Musique de chambre

La société Pro Musica présente le violoniste Leonidas Kavakos en récital. Le jeune virtuose grec sera accompagné de Denes Varjon au piano. Au programme, des sonates de Bach, Schumann et Enesco, de même que la Rhapsodie no 1 de Bartók. Le 8 février, au Théâtre Maisonneuve. (514) 842-2112.