Daniel Taylor : Émotion pure
Musique

Daniel Taylor : Émotion pure

Le contre-ténor Daniel Taylor est de la distribution d’Agrippina, qui fait entrer Haendel dans le répertoire de l’Opéra de Montréal.

Daniel Taylor est un interprète très actif, ici comme ailleurs. On a pu l’entendre plus d’une dizaine de fois depuis un an à Montréal, interprétant ses compositeurs préférés, Bach et Haendel, avec l’Orchestre de chambre McGill, la Bande Montréal Baroque ou son propre ensemble, le Théâtre de musique ancienne (Theatre of Early Music). On a aussi pu l’entendre durant Montréal en lumière, reprenant avec la soprano Suzie LeBlanc les duos d’amour de Haendel, dont l’enregistrement ATMA connaît un immense succès (plus de 30 000 exemplaires vendus).

Rencontré entre deux répétitions avec l’Opéra de Montréal, Daniel Taylor explique ainsi son amour de la musique baroque: "À travers les différentes formes de musique, il me semble que c’est celle qui offre la plus pure expression des sentiments et en particulier de l’adoration. Chez Bach et Haendel, la musique qui soutient la voix nous permet de traduire parfaitement les émotions." L’interprétation de la musique baroque a beaucoup évolué depuis sa "redécouverte" ces 30 dernières années, et elle ne semble pas toujours être un véhicule idéal pour l’expression des sentiments… "Ça dépend surtout des interprètes, précise le chanteur; il y a quelquefois un certain manque de respect envers les œuvres. C’est une des raisons pour lesquelles j’ai fondé mon propre ensemble, qui se spécialise en musique sacrée, afin de vivre moi-même, et de procurer aux auditeurs, des interprétations musicales de haut niveau; faire entendre ces musiques comme jamais auparavant. Nous savons mieux aujourd’hui comment étaient jouées les œuvres de Bach à son époque, et je vois aujourd’hui un peu partout des ensembles qui commencent à les interpréter comme nous le faisons ici à Montréal depuis déjà un certain temps."

C’est partout, en effet, que résonne la voix de Daniel Taylor, grâce à des enregistrements de cantates de Bach avec le Collegium Vocale de Gand (Harmonia Mundi) ou avec le Bach Collegium du Japon (BIS). On trouve un bon nombre de la cinquantaine d’enregistrements auxquels il a participé chez ATMA, mais c’est désormais l’étiquette suédoise BIS qui aura l’exclusivité des enregistrements du Theatre of Early Music. Le premier vient d’ailleurs de paraître et Daniel Taylor y chante, en compagnie du contre-ténor britannique Robin Blaze, les Leçons de ténèbres de François Couperin. "Mais la musique baroque n’est pas un amour exclusif, précise le chanteur, et l’un de mes opéras préférés est… La Bohème!" Cependant, à l’opéra, on l’a surtout vu chez Haendel, depuis ses débuts en 1997 dans le Theodora de Peter Sellar à Glyndebourne, puis dans Rodelinda (enregistré par EMI), Rinaldo (enregistré par Decca), Semele et Giulio Cesare. À l’Opéra de Montréal, où l’opéra baroque n’est pas, loin s’en faut, une spécialité, on l’a vu en avril 2000 incarnant Néron dans L’Incoronazione di Poppea, de Monteverdi, et son deuxième passage à la compagnie le ramène chez Haendel.

Le directeur artistique de l’OdM, Bernard Labadie, dirigera son ensemble, Les Violons du Roy, pour Agrippina. "Il connaît si bien l’esthétique baroque, commente Taylor, et il est si clair dans ses indications, jusque dans les moindres détails, diction, prononciation, phrasé, c’est incroyable. Dans cet opéra, tout le monde trahit Othon, mon personnage, surtout Agrippine, qui est si méchante! Et Lyne Fortin (soprano) joue ce rôle à merveille; c’est vraiment une grande actrice et elle aura beaucoup de succès dans ce rôle. C’est très théâtral, il y a du Shakespeare et du Tchekhov là-dedans! Karina Gauvin (Poppée, soprano), comme chacun sait, est une chanteuse fantastique et je crois aussi que Krisztina Szabó (mezzo-soprano) surprendra dans le rôle de Néron, comme l’Américain Kevin Burdette (Claude, basse), qui est aussi très talentueux. C’est un spectacle de trois heures, il faut le savoir, mais c’est le temps que demande Haendel pour nous offrir ce voyage au cœur de l’émotion."

Les 12, 17, 19, 21 et 23 mars
À la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts

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