Loco Locass : L’heure Hip-hop
Loco Locass pète le feu, crève l’écran et chauffe les planches. Depuis le lancement de leur dernier opus, Amour oral, les trois compères sont plus loquaces que jamais. Jasette avec Biz.
Amour oral
est sorti au début de novembre dernier. Depuis, ça roule à cent milles à l’heure pour le trio hip-hop au top de sa gloire. "L’album a été lancé le 2 novembre et depuis, ce qu’on fait, c’est qu’on en vend des copies! On est rendus à 25 000 disques vendus, ce qui est dans notre cas aussi inespéré qu’inattendu parce que, pour nous, ça représente de très très gros chiffres", confie le rappeur en évoquant le fait que le monde du hip-hop soit encore à défricher au Québec et que les sujets politiques et sociaux peuvent toujours en rebuter plusieurs. "Un groupe comme les Cowboys (Fringants), qui draine à peu près le même type de message que nous, est plus populaire que nous à cause du fond folk-country-rock qu’à peu près tous les Québécois ont en eux." Best seller, donc, pour les Loco, qui se réjouissent évidemment de l’ouverture des Québécois, de leur curiosité naissante pour cette forme de musique et de leur engouement pour ce genre de message. "Je pense que c’est un signe, effectivement, analyse Biz. Pour les Québécois, peut-être, parce qu’ils n’écoutent plus les politiciens, qu’ils n’écoutent plus les profs et que les médias ne sont pas crédibles non plus à leurs yeux. Les artistes demeurent à peu près les seuls gens en qui ils ont confiance pour faire lever les enjeux sociaux."
TOUT LE MONDE EN PARLE
Puisqu’on jase de popularité, la conversation s’engage ensuite naturellement vers le passage remarqué (c’est un euphémisme) des trois artistes à Tout le monde en parle à la fin de l’automne. "Pour nous, c’est comme la naissance du Christ, décrit Biz. C’est l’an zéro. Il y a un avant et un après Tout le monde en parle. Dans la carrière de Loco Locass, quand on va écrire notre histoire dans 10 ans, on va dire que c’est à partir de Tout le monde en parle qu’on a basculé dans le grand public. Les gens ont bien vu que les rappeurs ne sont pas juste des imbéciles avec des culottes aux genoux qui font peur aux petites filles et qui veulent les sacoches!" Le contact avec les 2 millions de téléspectateurs de la populaire émission dominicale a été si fulgurant qu’on peut presque parler d’un coup de foudre. Le Québec jeune et vieux les a connus, les a aimés et est allé acheter le disque. Conscients qu’ils risquaient gros, pouvant tout aussi bien tuer le groupe en direct, Biz, Batlam et Chafiik avaient élaboré leur plan de match avant la joute: "Être intègres, être vrais, s’amuser et faire du rap. C’est exactement ce qu’on a fait, et ça a marché vraiment au-delà de nos espérances."
TOUT LE MONDE DANSE
Toutes les cartes mises en place, le trio réalise ces temps-ci la tournée Amour oral qui le portera partout au Québec pendant "au moins deux ans!". Les rappeurs ont une hâte contagieuse de rencontrer leurs fans et ils promettent toute une fête à ceux qui se seront déplacés pour se déchaîner avec eux. "Notre spectacle est extraordinairement festif et énergique. Et en même temps, il y a des moments plus intimes où il y a juste de l’a capella, des mots, juste de la poésie. Donc c’est quelque chose de très global, comme une espèce de célébration du verbe." Le mot d’ordre du groupe: ne jamais décevoir ceux qui ont investi pour eux temps et énergie. (Éléonore Côté)
Le 24 mars
Au Maquisart
OOO
LE RAP À QUI?
Pourquoi le rap? "On ne s’est jamais posé la question… On chantait mal, on avait du beat, on fait du rap", lance Chafiik en riant. "On en a tous beaucoup écouté. À une époque, tout ce qu’on avait, c’était Le Pape du rap et Le Rap à Billy, se souvient Biz. On se disait: "Si c’est ça le rap en français, c’est de l’esti de marde, ça se fera jamais." MC Solaar nous a montré que c’était possible." Avec des textes aussi chargés, il est vrai que le rap s’imposait comme un canal privilégié où diriger un tel condensé de paroles. "Sans compter que c’est une belle forme pour manifester, ajoute Chafiik. Quand tu rappes, tu parles. Ça se rapproche parfois du discours politique." (Marie Hélène Poitras)