Festival MNM : Retour de son
Musique

Festival MNM : Retour de son

Le festival MNM laisse beaucoup de souvenirs. Faits saillants.

Disons-le d’entrée de jeu, on n’a pas tout vu: avec une moyenne de deux concerts chaque soir, Montréal/Nouvelles Musiques est un festival épuisant. Certains concerts ont souffert davantage de cette situation, comme celui de François Bayle et Bernard Parmegiani, deux invités de marque qui n’ont commencé leur concert qu’après celui de l’OSM, soit à 23 h… C’est un peu tard pour goûter les subtilités du travail de ces deux pionniers de l’électroacoustique, mais François Bayle, en première partie, a réussi des merveilles dans une salle Pierre-Mercure difficile pour la diffusion acousmatique. Ses œuvres récentes ont prouvé que la poésie et l’imagination ne s’émoussent guère avec le temps! Venant après un entracte débutant à minuit (!), le concert de Parmegiani, l’aîné de la soirée (77 ans!), a été offert à une poignée d’aficionados; un véritable rendez-vous manqué.

D’autres invités ont quand même eu plus de chance. Au concert d’ouverture, donné par le Nouvel Ensemble Moderne dirigé par Lorraine Vaillancourt, la soprano française Donatienne Michel-Dansac a offert une performance époustouflante dans Voi(Rex) de Philippe Leroux, déclenchant d’une main plus d’une centaine d’interventions électroniques tout en chantant une œuvre difficile.

Le chef Pierre-André Valade, venu avec son ensemble Court-Circuit, a également impressionné par une direction tout en finesse et d’une grande précision, à laquelle ses musiciens répondaient avec une virtuosité d’ensemble stupéfiante. Un concert de très haut niveau proposant des œuvres, en première audition chez nous, des Français Philippe Hurel, Martin Matalon et Yan Maresz, du Norvégien Rolf Wallin et de notre John Rea, dont Accident est un véritable bijou. Également programmée par la SMCQ, la musique de John Rea a connu un grand succès à chaque fois, et on ne peut qu’espérer qu’un enregistrement lui sera consacré au plus tôt. Le chef français récidivait au concert de clôture devant les musiciens de l’OSM, visiblement ravis de jouer sous sa direction et dont le plaisir était parfaitement communicatif. Un chef à nous ramener en saison régulière! Sous sa baguette, les tourbillons de clips stylistiques de Jean Lesage étaient tout simplement étourdissants, et la musique de Marc-André Dalbavie, compositeur-vedette du festival parisien Présences, en février, resplendissait littéralement.

Parmi les musiciens de chez nous, ceux de l’Ensemble contemporain de Montréal, dirigé par Véronique Lacroix, ont également offert une excellente prestation, et devant une salle Pierre-Mercure très bien remplie. On en vient malheureusement, après quatre pièces, à se lasser des sonorités du gamelan javanais de l’Evergreen Club, invité par l’ECM, ce qui finit par jouer contre les compositeurs dont chacune des œuvres a ses qualités propres. C’est cependant avec Les Oiseaux exotiques (1956) d’Olivier Messiaen que l’ensemble aura atteint l’inoubliable. Appuyé par la pianiste Louise Bessette, éblouissante, l’ECM a offert ici une de ses plus belles prestations.

La SMCQ avait aussi invité le gamelan torontois, mais pour une seule pièce, de Walter Boudreau, qui dirigeait sa musique, comme il le faisait aussi le mois dernier à Paris. Transformant l’ensemble en gamelan spectral par l’ajout de deux harpes, de cloches tubulaires, contrebasse, cor et ondes Martenot (magnifique Geneviève Grenier), Le Matin des magiciens renouvelle avec bonheur le répertoire pour cet étrange orchestre de métal. C’est cependant un autre "ancien" qui a soulevé la foule ce soir-là: Les Noces de Stravinski, dans leur version originale revisitée par René Bosc, qui dirigeait, ont enflammé un public nombreux, qui en aurait repris sans problème.

Il est réjouissant que l’on n’ait pas de place à consacrer ici aux deux ou trois déceptions rencontrées. Soulignons cependant le sauvetage du concert de l’Esprit Orchestra effectué de main de maître par le codirecteur du festival, Denys Bouliane, qui a dirigé la création montréalaise de son œuvre La neige est blanche mais l’eau est noire, une musique tout en contrastes secs, vive et intelligente. À reprendre!

En allant chercher 50 % plus d’entrées qu’à sa première édition, ce deuxième festival MNM a prouvé sa pertinence et sa nécessité. Bouliane et Boudreau peuvent être satisfaits. On s’y reverra en 2007!