Emm Gryner : Sang vert
Musique

Emm Gryner : Sang vert

Emm Gryner joue au guide culturel avec Songs of Love and Death, s’appropriant les musiques contemporaines d’Irlande pour mieux les faire connaître en leur conférant un nouvel éclairage. Des lumières dans la brume.

Emm Gryner

a un sens du timing lamentable. Installée à Montréal depuis quelque temps, l’Ontarienne choisit d’abandonner la métropole au moment même où celle-ci accède à l’enviable statut de nouveau centre glamour de la musique rock en Amérique du Nord. Ce qui revient presque à quitter Seattle dans les semaines suivant la parution du contagieux Nevermind de Nirvana, lui suggère-t-on, à la blague, la boutade provoquant un rire franc, cristallin. "C’est nul, non? Et puis, j’aime tellement cette ville. Mais je me suis trouvé une maison, à la campagne, au bord d’une rivière, et elle est assez grande pour que je puisse y travailler à ma musique et y soutenir les opérations de ma maison de disques aussi; alors, même si Montréal me manque, je reste ici", assure-t-elle.

C’est sur cette modeste étiquette-maison, Dead Daisy Records, que l’auteure-compositrice publiait récemment Songs of Love and Death. Son huitième album (à 29 ans!), mais son second essai consacré aux musiques des autres, ce plus récent disque d’interprétations propose une lancinante relecture de chansons irlandaises contemporaines, originalement gravées par les Corrs, Thin Lizzy, The Thrills, Ash et consorts. "Quand les gens pensent à la musique irlandaise, avance l’ancienne choriste et amie de David Bowie, il ne leur vient habituellement en tête que la musique traditionnelle, ou U2, ou les Cranberries, ce qui, dans ce cas-là, n’est pas nécessairement une bonne chose (rires). Ils ne savent pas ce qui existe d’autre et quand je me suis aperçue que personne n’avait fait cet exercice, rassembler des musiques irlandaises de notre époque sur disque, j’ai trouvé l’idée irrésistible. Et en plus, je suis en partie d’origine irlandaise", clame-t-elle avec la proverbiale fierté de ceux dont le cœur pompe ne serait-ce qu’une fraction de sang vert.

Respectant scrupuleusement la structure comme l’esprit de certaines chansons qu’elle reprend sur Songs of Love and Death, Gryner s’est par ailleurs imposé d’en dénaturer la plupart, conférant à l’ensemble du recueil une indéniable cohésion, dans la grisaille et la tristesse. Mais ce travail de reconstruction, incontestable réussite, peut cependant s’avérer blasphématoire pour le fanatique des versions originales, le changement étant ressenti comme une violente attaque chez les plus intégristes.

Le 24 mars à 21 h
Avec Matthew Barber
À l’Auberge le Mouton noir

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