The Kills : À la recherche du wow perdu
Musique

The Kills : À la recherche du wow perdu

L’électrisant duo The Kills amène sur scène son punk clash minimaliste aux élans "bluesés", dégoulinant de sueur et exhalant la chair.

PRÉLIMINAIRES

L’histoire veut que tout ait débuté par un timide échange de coordonnées lors d’une soirée londonienne. Une violente et incontrôlable attraction s’opère dès lors entre l’Anglais Jamie Hince (alias Hotel, ex-Scarfo) et l’Américaine Alison Mosshart (alias VV, ex-Discount), tous deux déjà vétérans de la scène alternative, mais dont les projets respectifs battent de l’aile. De vieux quatre pistes sont rafistolés, des récepteurs de téléphone périmés se métamorphosent en micros de fortune, et de nombreuses cassettes font l’aller-retour au-dessus de l’Atlantique. Jusqu’à ce que les trop longs délais de création poussent VV à s’envoler pour Londres rejoindre son alter ego.

LE PLONGEON

Carburant à la simplicité, à l’instinct et à la liberté, le duo se cuisine quelques morceaux et organise par ses propres moyens une première tournée de deux mois et demi aux États-Unis, sans même avoir de nom ou d’album à présenter. Une cinquantaine de concerts et plusieurs contraventions plus tard, Hotel (guitare, voix, boîte à rythmes) et VV (voix) font paraître en 2002 leur premier Ep, Black Rooster, suivi un an plus tard du microsillon Keep On Your Mean Side. En plus du son cru et de ses singulières références blues, électro, punk, voire disco, l’impénétrable complicité de la paire combinée à la forte tension sexuelle émanant de la scène alimentent un intérêt croissant pour The Kills. "Je crois que c’est tout simplement ce qui se produit lorsqu’un gars et une fille se retrouvent sur une même scène", risque VV, précisant ne pas être en couple avec son complice. "Tout est question de nerfs et d’adrénaline; c’est ce qui guide la performance et permet de t’y consacrer à fond le moment venu. On fait seulement ce qu’on veut et ce qu’on ressent; ce n’est pas réfléchi", ajoute celle qui entretient aussi une étrange relation avec le trac. "Je déteste être nerveuse, mais en même temps, j’adore ça ", confie-t-elle. " On se sent bien, et un peu malade aussi; on devient rapidement accro à cette sensation. C’est très grisant parce que t’as une trouille immonde et tout d’un coup, tu n’as plus peur du tout. Ça ne prend qu’une seconde! Puis l’adrénaline s’en mêle. C’est extraordinaire tout ce qu’on peut faire sur l’adrénaline…"

LA CONCEPTION

L’effroi était également de la partie au moment d’enregistrer No Wow, deuxième essai du groupe paru début mars. Assez pour qu’une expérience s’avère nécessaire. "Le premier disque, on a pris près d’un an et demi à l’écrire. En fait, on ne l’a jamais vraiment écrit; il est simplement venu comme ça, et tout s’est passé assez facilement en studio, comme on jouait ces pièces sur scène depuis très longtemps. Cette fois-ci, nous avions été en tournée perpétuelle et n’avions pas eu la chance d’écrire une seule nouvelle chanson pendant ce temps-là. Et ça peut être très angoissant de ne rien écrire sur une si longue période, puisque t’en viens à te demander si tu seras encore capable de le faire… Alors, nous avons décidé d’aller nous perdre au milieu de nulle part dans un endroit appelé Benton Harbor et on a commencé à travailler, sans avoir aucun matériel en banque. On a beaucoup discuté, essayé toutes sortes d’idées, puis en trois semaines et demie, on a fait 17 chansons, parmi lesquelles on a choisi les 11 du disque, qu’on est allé enregistrer à New-York quelques jours plus tard. Ça s’est vraiment fait en un coup de vent!…"

L’EXPULSION

Dès les premières inquiétantes pulsations de No Wow, la table est mise. Le désir bouillant semble frayer avec la haine profonde, la guitare paraît s’envoyer la boîte à rythme, l’intensité transcende le dépouillement, alors que la voix sulfureuse de VV prévient: you’re gonna have to step over my dead body before you walk out that door… La paire met ainsi à sa disposition tous les ingrédients nécessaires pour optimiser son giclant coup de pinceau au paysage musical actuel, dont le groupe avait jusqu’alors toujours dénoncé l’implacable sclérose. "Il manque de chaos créatif", croit VV. "Tout semble tellement prévisible; il y a trop de confort et de routine. Ça prend plus d’imagination. Mais je trouve qu’en ce moment, il y a beaucoup de groupes fantastiques, et je n’aurais jamais pu dire cela il y a deux ou trois ans", souligne-t-elle, mentionnant au passage son admiration pour LCD Soundsystem, The Fiery Furnaces et Scout Niblett, qui les accompagne pour la présente tournée. "Je pense que le problème vient plutôt de l’industrie du disque qui étouffe toute créativité. Cela se doit d’être un peu plus fou, je crois… (rires)"

Le 8 avril
Au Café Campus

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