André Hamel : Pas mal spatial
Musique

André Hamel : Pas mal spatial

André Hamel et ses collègues d’Espaces sonores illimités ouvrent le FIMAV avec leur musique très spatiale. Gros plan.

On a pu entendre la musique d’André Hamel l’année dernière alors que La Nef interprétait sa vision de la musique des Urnossiens, un peuple qui aurait vécu il y a 5 000 ans. On peut d’ailleurs entendre des extraits de ce travail jusqu’au 20 mai à la Galerie Renée-Blain, où ils servent de trame sonore à une installation photographique de Louise Néron. Hamel compte parmi les fondateurs, en 1985, de la Société des concerts alternatifs du Québec (devenu Codes d’accès) et sa démarche générale vise toujours à élargir la notion de "concert" en faisant éclater l’image sonore frontale que propose l’habituel concert "à l’italienne" (c’est-à-dire les musiciens sur scène devant le public, comme c’est la norme).

Un peu comme on le fait avec les haut-parleurs dans les concerts de musique électroacoustique, le compositeur aime disperser les musiciens dans la salle, afin de créer un image sonore tridimensionnelle. "L’intérêt est le même, explique-t-il, et ça me préoccupe depuis longtemps. Ça apporte une dimension supplémentaire à la musique et ce n’est pas qu’un gadget, mais ça participe aussi au contenu du discours musical. Après tout, nous vivons dans un environnement sonore qui est en trois dimensions, la "spatialisation" de la musique favorise donc une écoute qui est plus naturelle."

La spatialisation de la musique, certains musiciens étant placés devant l’auditeur, d’autres derrière, puis à gauche et à droite, rend aussi le discours musical plus clair, chaque source sonore étant plus aisée à localiser. "En ce qui concerne ma démarche de compositeur, poursuit André Hamel, j’aime superposer des réalités sonores qui, de prime abord, ne semblent pas être faites pour aller ensemble, un peu comme le faisait Charles Ives, par exemple. J’appelle ça la polyréalité, et c’est, encore une fois, comme dans la "vraie vie"; on entend toujours différents événements sonores simultanément et, quelquefois, il y a de beaux hasards!"

VITESSE DU SON

André Hamel forme, avec ses collègues compositeurs Alain Dauphinais et Alain Lalonde, le collectif Espaces sonores illimités (E.S.I.), qui se consacre précisément à la composition d’œuvres spatialisées. On a déjà pu entendre leur musique durant la 11e édition du Festival de musique actuelle de Victoriaville (FIMAV) en 1994, alors que les musiciens de l’Ensemble contemporain de Montréal étaient dispersés dans tous les coins d’une église pour interpréter leurs Musiques en espace sacré. E.S.I. est de retour cette année au FIMAV pour offrir le concert d’ouverture du festival. Augmenté à quatre avec la participation du compositeur Claude St-Jean, le collectif a composé une œuvre qui sera interprétée par l’Orkestre des Pas Perdus, la Fanfare Pourpour et l’Orchestre de rue de Victoriaville! Une cinquantaine de musiciens qui empliront tous les recoins du Colisée des Bois-francs d’une masse sonore mouvante. "Il n’y aura pas d’amplification générale, puisque ça gâcherait le concept de spatialisation. Certains musiciens auront leur propre amplification, et certains ne bougeront pas du tout en raison de l’instrument dont ils jouent, mais ceux qui peuvent être mobiles le seront!"

On pourra entendre la veille de cette création à Victoriaville une autre œuvre d’André Hamel, à Montréal cette fois-ci, et interprétée par deux quatuors de saxophones. Le quatuor montréalais Quasar s’allie en effet à son alter ego suisse, le quatuor Arte, pour un concert au cours duquel on pourra entendre trois créations (de Vincent Collard et José Evangelista, pour huit saxophones, et de Michel Frigon, pour quatuor). La pièce d’André Hamel À huit a été créée à la SMCQ en 2001, et c’est encore dans un concert présenté par la SMCQ qu’on la réentendra. "C’est aussi une œuvre spatialisée, explique Hamel, et pour laquelle les saxophonistes sont "cachés"". Bref, de l’acousmatique acoustique! Quasar et Arte enregistreront l’œuvre dans les jours qui viennent et on devrait pouvoir l’entendre sur un disque regroupant plusieurs œuvres d’André Hamel, chez ATMA, à l’automne.

Quasar + Arte: le 18 mai, à la Salle Pierre-Mercure
Espaces sonores illimités: le 19 mai, au FIMAV (www.fimav.qc.ca)

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