Oasis : L'interview vérité… ou pas!
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Oasis : L’interview vérité… ou pas!

Alors qu’Oasis entame sa tournée printanière des petites salles, et avant la grande tournée des stades de l’été, Gem Archer, acolyte de longue date des frères Gallagher, nous accorde un entretien surréaliste.

Être un groupe mythique de son vivant, est-ce que cela facilite la créativité?

"Nous ne nous considérons pas comme un groupe mythique mais simplement comme un excellent groupe. À partir de là, notre créativité n’a rien à voir avec ceux qui nous ont apposé ce statut de mythe quelconque. Personne n’est un mythe de son vivant. On le devient a posteriori. C’est dans l’ordre des choses. Si nous l’étions, c’est que le groupe serait déjà mort ou has been. Or, nous sommes bien là et plus vivants que jamais avec la sortie de notre nouvel album…"

Justement, l’album s’appelle Don’t Believe the Truth. Vous éprouvez un si grand problème que cela avec la vérité pour ne pas vouloir la croire?

"Non, pas plus que ça. Cependant, toute vérité n’est pas toujours bonne à dire. Parfois, elle peut sans le vouloir heurter les gens que nous aimons, et ce, juste en se cachant derrière cette idée saugrenue qu’on nous a inculquée dès notre plus tendre enfance. Quelle connerie! De plus, la vérité n’est pas immuable ou universelle. Chacun a les siennes. Dès lors, pourquoi nous évertuer à croire la vérité que les gens parfois les plus mal intentionnés cherchent absolument à nous faire gober?"

Vous est-il déjà arrivé de mentir sciemment à votre public, à vos familles ou de vous mentir entre vous?

"Non, mais à la presse, oui (rires)! Puisque la presse cherche souvent à s’immiscer dans nos vies privées, du moins dans celles de Liam et Noel, on s’amuse souvent à emmener les journalistes vers de fausses pistes… J’adore voir ce jeu de pistes entre eux… C’est même certainement d’ailleurs une des raisons qui nous ont poussés à opter pour ce titre (rires). Par ailleurs, nous voulions aussi expliquer aux fans qu’il ne faut pas croire automatiquement ce qui est écrit dans les journaux ou ce qu’il se dit à la télévision. C’est à chacun de se faire sa propre idée en fonction de ses propres valeurs. Et pour cela, il suffit de s’intéresser par soi-même à différentes choses. Par conséquent, qu’importe ce que dira la presse de notre disque, les fans se feront leur opinion en l’écoutant. Et l’achèteront sans que les critiques des journalistes n’y changent rien!"

Vous défendez ce côté puriste du rock aussi bien dans votre musique que dans votre style de vie. N’est-ce pas déjà votre premier mensonge marketing?

"(Rires). Du tout. Nous aimons le rock et jamais nous ne ferons autre chose que cela. La seule différence avec plein d’autres idiots, c’est que pour nous, le rock n’est pas qu’une musique que nous jouons pour faire plein de fric, c’est aussi notre style de vie. Cela, personne ne peut le contester. Maintenant, que les maisons de disques en fassent une image marketing, ce n’est pas notre problème. Tant qu’elles ne nous font pas passer pour un boys band ou un groupe préfabriqué. Nous sommes un groupe uni qui prend sa véritable dimension sur scène et non à travers la petite lucarne."

Ce qui explique que vous avez protesté contre les émissions de téléréalité qui vendaient des stars en moins de trois mois?

"Nous n’avons pas protesté contre ce phénomène, nous avons simplement dit que nous ne l’aimions pas. Ce n’est pas tout à fait la même chose. La starification ne s’acquiert pas en si peu de temps. Le faire croire aux gamins, c’est les duper. C’est aussi abuser de la confiance qu’ils témoignent en l’adulte. De plus, les médias ne veulent pas admettre qu’ils sont en train de tuer le rêve et l’art. Un artiste ne se fabrique pas, il est artiste. Faire croire que tout le monde peut le devenir du jour au lendemain peut se révéler criminel. À continuer dans cette voie, les médias risquent de causer bien plus de tort à notre profession que le téléchargement qu’ils condamnent. Ils scient eux-mêmes la branche sur laquelle repose leur cul."

Pourtant, certains ne s’en sortent pas si mal?

"Je ne te dis pas que le procédé n’est qu’une duperie totale. Si quelques-uns durent dans ce métier, c’est qu’à la base, ils avaient de la graine de star, c’est tout. Alors, les émissions comme Pop Idol (le Star Académie british) permettent de découvrir parfois une exception, mais le reste du temps, les producteurs se gavent financièrement sur le dos d’une jeunesse désabusée. Je trouve cela honteux!"

Le rock business serait-il l’une des rares chapelles artistiques à être protégées contre cela?

"Nous sommes des musiciens avant tout et nous vivons pour et par notre art. Nous n’avons jamais désiré devenir des artistes médiatiques. Lorsque nous jouions dans notre cave, nous rêvions de remplir les stades et de jouer devant une foule qui aime le rock autant que nous. Jamais l’idée de vouloir à tout prix faire la une des journaux n’a été le moteur pour n’importe qui d’entre nous. Donc, si nous considérons que l’univers du rock, ou du rap d’ailleurs, n’est investi que par des puristes, alors, oui, nous sommes bien protégés contre toutes ces conneries de stars jetables de la téléréalité."

Parmi les 11 chansons du nouvel album, 9 sont signées par Noel ou Liam. Existe-t-il un diktat Gallagher dans Oasis?

"Nullement. La réponse est très simple. Nous avons composé plus de 200 chansons à nous quatre et nous ne pouvions sortir un disque avec autant de titres. Il nous a donc fallu choisir les meilleures. Il s’avère que seules une des miennes et une de Andy Bell se révélaient mieux que le wagon qu’avait composé la famille Gallagher. Maintenant, sur les neuf titres composés par les frères, nous avons aussi apporté nos idées sur leur travail, tout comme eux l’ont fait sur le nôtre. Il faut par conséquent arrêter de croire que ce sont les hooligans du rock. Ils sont juste perfectionnistes et savent parfaitement ce qu’ils désirent."

Justement, les frères Gallagher sont des fous du foot et votre dernier opus comporte 11 chansons. Existe-t-il une cause à effet dans ce parallèle?

"(Éclats de rire). Il faudrait leur demander, mais leur passion pour le foot peut en effet les avoir conduits à ce genre d’ineptie…! En tout cas, je vais leur demander car du coup, je suis en train de m’interroger sur cela."

Comme lors de la dernière tournée, vous allez jouer cet été dans les stades à travers le monde, mais auparavant vous allez vous rendre dans des clubs. Pourquoi ce choix?

"Nous avons envie de rendre notre musique humaine en la diffusant dans des petites salles pour voir si nous avons fait le bon choix dans la tracklist. Ensuite, si notre choix se révèle exact, une fois devant plus de 60 000 personnes, l’intensité de ce que nous avons connu dans les clubs ne pourra qu’être plus jouissive. Cela nous permet aussi de rester humbles et de ne jamais oublier que du jour au lendemain, nous pouvons nous retrouver que dans les clubs."

Alors, avec une telle promotion pour l’arrivée d’un nouvel opus qui clame qu’il ne faut pas croire la vérité, qu’est-ce qui me prouve que ce que tu m’as dit est la réalité, la vérité, du moins la tienne?

"Rien, bien entendu. J’ai fait avec toi de la promo et le but de cela, n’est-ce pas de faire parler de notre actualité? Donc, c’est ce que j’ai fait et rien de plus. Ma vérité du moment n’est que celle de l’instant et elle demeure mienne. À ma prochaine interview, je peux ne plus être ce que je suis avec toi. C’est aussi cela la magie de la vie et la réalité de l’existence. Nous évoluons tous, n’est-ce pas?"

Oasis
Don’t Believe the Truth
(Sony)