Andrée Watters : Femme ou fille?
Andrée Watters lançait ce mardi son deuxième album, À travers. Un disque plus personnel et d’une plus grande fragilité, selon la jeune femme propulsée au firmament du showbiz québécois il y a deux ans.
En 2003, AW catapulte la carrière d’Andrée Watters alors qu’elle n’a que 20 ans. Forte de l’indéniable succès d’un premier disque auprès d’un public trouvant chez elle un modèle d’équilibre entre force et tendresse, la chanteuse récidive avec À travers, proposant, pour employer un cliché, une certaine continuité dans le changement.
Ainsi, la native de Charlesbourg signe l’essentiel des pièces de son nouvel album, épaulée notamment par Catherine Durand et le réalisateur Nicolas Maranda. "Il y avait ce besoin d’écrire d’une manière plus personnelle, plus profonde, qui s’est fait sentir, confie-t-elle. J’avais envie d’une autre approche, d’aller au fond des choses, d’écrire des textes qui ont plus de fragilité." Dès lors, si les textes de son premier essai faisaient davantage dans l’observation, le second fait office d’acte de bravoure, s’immergeant dans une réflexion plus personnelle, s’alignant sur son propre vécu, sur ses expériences.
Signe d’une certaine évolution, mais laquelle? "C’est dur à expliquer. On évolue avec le temps. On acquiert de l’expérience de vie et de travail. Le métier rentre dans le corps", expose simplement Watters.
SON MONDE
Sur À travers, c’est donc au cœur des préoccupations de l’artiste que l’on saute, abordant notamment le suicide avec la chanson Tu pars. Un sujet qui la touche personnellement, avouera-t-elle, slalomant cependant avec grâce et maturité autour des nombreux écueils de ce genre de thématique. "J’avais envie d’écrire là-dessus, mais sans tomber dans le drame. Pour moi, c’est un défoulement. Nous, on reste. La vie continue. Cette chanson est la réponse de quelqu’un qui reste."
Aussi, elle laissera au public le soin d’interpréter ses pièces comme il le veut bien. Chacun peut y faire ses propres parallèles ou établir ses liens avec ses propres expériences. En ce sens, au premier degré, Tu pars pourrait tout aussi bien traiter d’un amoureux qui vient de quitter une relation.
Une liberté d’interprétation qui perd un peu de sa latitude sur Ma face cachée, coécrite avec Catherine Durand, qui se veut une réflexion sur la célébrité: "[En tant que personnalités publiques], nous sommes toujours observées, note-t-elle. On ne peut pas dire tout ce que l’on pense, de peur de se faire montrer du doigt, alors on se garde une face cachée." Très populaire auprès des adolescentes et des toutes jeunes filles, sent-elle pour autant une obligation de servir de modèle à son public? "Je ne veux pas me mettre de pression. Je suis déjà très exigeante envers moi-même en ce qui a trait à ma vie professionnelle. Je veux toucher les gens, mais je ne fais pas ce métier pour plaire à tout le monde. De toute façon, c’est impossible de plaire à la majorité des gens."
UNE FORCE TRANQUILLE
Pour maintenir une certaine continuité lors de l’enregistrement d’À travers, Andrée Watters s’est entourée de Nicolas Maranda (Coma, Couch Potatoes) à la réalisation. Ce dernier avait coréalisé le premier disque de la chanteuse avec Fred St-Gelais (Hépatite B). Maranda et St-Gelais assumaient aussi les rôles d’hommes-orchestres en jouant de la majeure partie des instruments entendus sur AW. Cette fois, histoire d’assurer un certain changement, Andrée Watters est accompagnée par les musiciens qui se produisent avec elle en spectacle: Martin Héon (guitares), Pat Frazer (claviers, guitares), Styve Bolduc (basse) et Francis Fillion (batterie). "Ils sont avec moi depuis le début. Ils me connaissent. Ils ajoutent aussi une touche plus personnelle à chacun des instruments. C’est une autre approche. On retrouve un peu plus l’esprit de band sur le deuxième disque. Je voulais un album qui se livre très facilement sur scène. Le premier était plus difficile à livrer en spectacle", explique la chanteuse.
François Lalonde (Garou, Céline Dion) assure quant à lui la prise de son et le mixage d’À travers: "L’interprétation est davantage mise en valeur sur le deuxième album. François a ramené de la précision dans la voix (sic). Il a été chercher une touche particulière, une texture, une intensité, une force tranquille", ajoute Watters.
Parlant de force tranquille, à première écoute, le nouvel album de la chanteuse semble un peu plus calme qu’AW. Le premier extrait, Laisse la pluie, est résolument rock. Cependant, sur ce nouvel album, on ne retrouve pas tout à fait l’équivalent de pièces comme Si exceptionnel ou Enfer. À travers semble empreint d’un peu plus de douceur. "C’est peut-être à cause des sujets qui sont abordés, réplique la jeune femme. Le son est encore rock, mais mes interprétations sont plus fragiles, plus enveloppantes. L’intensité est moins mise sur la guitare et plus axée vers d’autres instruments et la voix."
Cette nouvelle galette ne devrait toutefois pas déplaire aux fans de la chanteuse. Andrée Watters a pris de la maturité, certes. Elle aborde de nouveaux horizons, mais sans complètement s’éloigner de certaines thématiques présentes sur son premier album, qui avaient l’heur de "parler" à son public: la réalisation et l’affirmation de soi, l’amour et ses innombrables aléas.
Du changement dans la continuité, donc. Un pas en arrière pour en faire deux vers l’avant.
À travers
Andrée Watters
(Sony)