La St-Jean selon… Loco Locass : Une Saint-Jean résolument politique
Musique

La St-Jean selon… Loco Locass : Une Saint-Jean résolument politique

nous avons soif de toutes les eaux du monde
nous avons faim de toutes les terres du monde
dans la liberté criée de débris d’embâcle
nos feux de position s’allument vers le large

Gaston Miron

Ça fait trois ans de suite que Loco Locass participe à ce qu’il est convenu d’appeler une Saint-Jean alternative, c’est-à-dire un spectacle payant, à l’initiative des artistes eux-mêmes. En 2003, c’était avec les Zapartistes, au Kola Note. L’année dernière, la fête se déployait au Spectrum, avec ces mêmes Zaps, les Charbonniers de l’enfer et Martin Léon. Cette année, le délire culmine au parc des Îles avec les Cowboys fringants et la joyeuse ribambelle.

Ce spectacle parallèle n’est pas un désaveu du rassemblement organisé au parc Maisonneuve. Ce n’est pas LE spectacle de la Saint-Jean mais UN spectacle de la Saint-Jean. Notre initiative n’est pas une soustraction mais une addition. Nous n’enlevons rien à personne, nous diversifions l’offre parce que nous croyons qu’une certaine proportion de Québécois ne se reconnaît pas dans la formule proposée par les organisateurs officiels. De l’aveu même de ceux-ci, la fête de Maisonneuve se veut la plus rassembleuse possible, ce qui expliquerait un choix d’artistes plus consensuels et l’expulsion du caractère politique de l’événement.

Ainsi, sous prétexte que certains Québécois fédéralistes se sentiraient exclus d’une célébration patriotique, on préfère une fête expurgée de sa raison d’être. Est-ce que la fête du Canada émascule sa dimension politique parce que 50 % des Québécois (qui sont aussi Canadiens jusqu’à nouvel ordre) sont souverainistes? Moi aussi, mes impôts servent à payer le 1er juillet et pourtant, je ne participe à aucune activité ce jour-là. Que ceux qui ne veulent pas fêter restent chez eux.

Puisqu’elle célèbre une nation, toute fête nationale est par définition politique. Il n’y a aucun mal là-dedans. Mais au Québec, notre schizophrénie identitaire relègue la fête d’un peuple au rang de festival de la mouche noire.

Le spectacle au parc des Îles réaffirme la primauté du politique dans la fête nationale des Québécois. Et quoi qu’en pensent certains, son caractère politique en fera un événement rassembleur. Ce sera la célébration de la nation québécoise dans toute sa multiplicité, sa modernité et sa fougue. Et pour ceux que ça inquièterait encore, il ne sera pas question de l’étoffe pure laine mais de la courtepointe québécoise, cette extraordinaire couverture texturée de toutes sortes de textiles, cousus ensemble par la langue française. Où que vous soyez le 24, bonne Saint-Jean!