Joan Jett : Jouer avec le feu
Musique

Joan Jett : Jouer avec le feu

Joan Jett a d’abord rêvé au métier d’actrice. Mais il lui a suffi d’enfiler une guitare électrique pour qu’un tout autre chemin s’impose. Et pour une jeune femme, le sentier rock’n’roll était nettement moins défriché qu’Hollywood  Boulevard.

À vrai dire, on appréhendait un brin l’entretien. Disponibilités nébuleuses, enquête poussée de la gérance, sans compter la réputation féline de la dame en entrevue. Ou peut-être était-ce cette dure image de cuir et de crinière noire… Mais c’est d’une voix généreuse et finement granuleuse que Joan Jett se rappelle sa première guitare électrique, à quelques heures d’un concert au Wisconsin. "Oh oui! Je l’ai eue au Noël de mes 13 ans. Je voulais vraiment faire du bruit!" lance la native de Philadelphie, qui aura 45 ans le 22 septembre. Mais déjà, les embûches se profilaient. "J’ai voulu prendre des cours et apprendre à jouer du rock. Le professeur m’a regardée en voulant dire: "Non, mais t’as perdu la tête?" Alors j’ai suivi un seul cours puis j’ai abandonné", ajoute celle qui a dû se contenter d’une méthode écrite. "Puis j’ai appris à jouer sur mes disques; David Bowie, T-Rex ou Black Sabbath, tout ce qui avait des accords bien gras et des riffs pesants…"

C’est armée de ces ingrédients, du haut de ses 15 ans, qu’elle se joint aux Runaways, quintette punk-glam rock au féminin, qui comptera entre autres Lita Ford (guitare) et Michael Steele (voix), plus tard des Bangles. Mais une bande de filles aux grasses guitares, à la fin des années 70, ça ne courait pas les clubs. Managers, grands ducs de l’industrie, techniciens, confrères mâles et médias se cloîtraient dans le scepticisme. "Les gens ne nous prenaient pas au sérieux; on se faisait traiter de tous les noms! Et ça me mettait vraiment en colère. J’ai l’impression que c’est parce que le rock’n’roll a quelque chose de très sexuel", estime celle qui ne note guère d’amélioration sur ce point depuis 20 ans. "Cela en dérange plusieurs de voir sur scène des femmes assumer leur sexualité de la sorte; ils se sentent menacés et ça les rend agressifs. Ça peut être frustrant, mais aussi très énergisant!"

Boudées par les radios américaines mais louangées au Japon, The Runaways en viennent à la séparation en 1979. "On ne voyait plus les choses de la même façon, musicalement." C’est tout juste deux ans plus tard, après son premier album, Bad Reputation, que Jett (née Larkin) s’entourera des Blackhearts pour enregistrer le fameux b-side des Arrows, I Love Rock’n’Roll. Oui, elle aime toujours autant le rock aujourd’hui, mais trouve le terme quelque peu galvaudé. "Je suis peut-être un peu une snob du rock’n’roll, mais je trouve que plusieurs s’emportent à tout qualifier de rock, de nos jours. Quand je vois des titres de presse comme "Hilary Duff rocks!", j’ai de la difficulté à comprendre; ce n’est pas ça! Tout le monde rocke, maintenant…" C’est pour sa part flanquée des Blackhearts Thommy Price (batterie), Doug Needles (guitare) et Enzo (basse) que la rockeuse compte bien soulever la foule de Woodstock en Beauce. "Ça a l’air vraiment super! Je suis certaine que je vais bien m’y amuser. J’espère avoir le temps de visiter les alentours, profiter des paysages, des gens, puis de la musique aussi! J’ai bien hâte, car ça fait longtemps qu’on n’a pas joué dans ce coin-là…"

Le 2 juillet à 21 h
À Woodstock en Beauce