Billy Corgan
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Billy Corgan

De sa chambre d’hôtel parisien, face à la tour Eiffel, Billy Corgan, défroqué des Smashing Pumpkins, parle à cœur ouvert de son nouvel opus The Future Embrace.

Pourquoi reviens-tu avec un album solo, délaissant ainsi définitivement le groupe?

"J’ai toujours eu envie de travailler en solo, même si je suis un artiste de groupe et que je préfère de loin jouer dans un groupe. Bowie ou Lou Reed n’ont jamais été meilleurs qu’avec leur combo. Si tu remontes dans le temps, je travaillais déjà sur des projets en solo lorsque je jouais avec les Smashing Pumpkins… En réalité, chaque nouvelle réalisation se révèle une nouvelle histoire de vie, rien de plus. Ensuite, tu l’interprètes comme elle se présente à toi. Pour celui-ci, au départ, je n’avais aucune idée du résultat final. Je l’ai composé et enregistré presque en temps réel. Je voulais vivre le processus de création et d’enregistrement en même temps."

Tu n’avais pas assez confiance en toi avant pour sortir un disque en solo?

"Absolument pas. J’ai toujours eu assez confiance en mes chansons, en mes talents de compositeur et de réalisateur et surtout en moi. De toute façon, dans ce métier, si tu ne crois pas suffisamment en toi, tu ne réussiras jamais. Le milieu artistique reste une mer de requins qui ne laissent la vie qu’aux gagnants et aux meilleurs…"

As-tu des regrets concernant cet album?

"Je pense que si je l’avais fait avec un groupe, il aurait peut-être été bien meilleur, mais il n’aurait pas été complètement le mien. Un artiste seul dispose de bien moins de références ou de visions, voire de possibilités en général que cinq musiciens ensemble. Enregistrer un opus en solo fut donc un choix de ma part et je ne le regrette pas car il me correspond en tout, de fait, mais je pense que ce disque prendra sa véritable dimension sur scène bien plus que sur la galette."

Quel est l’aspect le plus délicat de ton CD?

"Il se révèle très difficile d’approche. Tu as besoin de le réécouter au moins cinq ou six fois avant de rentrer vraiment dans l’univers que je propose. J’ai eu envie avec ce disque d’explorer davantage que je ne l’avais fait auparavant. Du coup, il apparaît plus complexe aussi. Avec The Future Embrace, j’ai juste dû être moi-même. Ce disque est très différent de ce que vous avez tous écouté dans votre existence, ce qui explique qu’il ne peut être apprécié dès la première écoute. Il demande beaucoup de sacrifices aussi de la part de l’auditeur."

To Love Somebody, une chanson des Bee Gees reprise par Michael Bolton, Nina Simone, Jimmy Somerville… N’est-ce pas un peu risqué de reprendre un tel titre?

"(Rires) Non, du tout. Tu ne la reconnais qu’une fois arrivé au refrain… J’ai adoré ce tube et je dois avouer que je voulais le refaire mais à ma façon. Si je n’avais pu y parvenir, je l’aurais abandonné sans conteste. J’ai modifié la tonalité pour la rendre moins heureuse que ne l’avaient décidé les frères Gibb. Je suis passé d’une clé majeure à une clé mineure pour l’ajuster à mon univers et à ma convenance. Les basic tracks ont été calées en deux heures à l’aide d’une guitare, d’un synthé et d’une boîte à rythmes. Rien de plus, j’ai été à l’essentiel et surtout sans me disperser. C’est donc parce que cette nouvelle version apporte quelque chose de plus aux anciennes que j’ai décidé de l’inclure sur The Future Embrace. Enregistrer une reprise qui ressemble à l’originale, trop peu pour moi. Je laisse cela à ceux qui manquent d’inspiration."

Avec le recul, au regard de l’importance des Smashing Pumpkins, tu n’as pas envie de reformer ce groupe?

"Je ne veux plus appartenir à un groupe dont certains membres se trouvent sous l’emprise d’une quelconque drogue. La vie est trop courte pour cela. Certes, j’en ai pris comme tout le monde dans ce métier, mais ces substances n’ont jamais affecté ma musique. Aujourd’hui, je ne bois plus, je ne me drogue plus, je ne prends même pas d’aspirines ni de sucre; et pour finir, je n’ai même pas besoin de filles. J’ai tout arrêté. Ma musique demeure ma seule drogue et l’eau, ma seule ressource de vie. Je pourrais ainsi vivre dans un désert. (rire)"

Tu n’as pas peur d’avoir une vie ennuyeuse?

"Si, bien sûr, mais c’est surtout parce que je suis moi-même très ennuyeux! Ce que je vis grâce à la musique n’est absolument pas ennuyeux, mais moi, si tu savais! Tu peux emmener un gosse à Disneyland, si l’enfant a un problème en lui, sa vie, malgré le super parc d’attractions, restera ennuyeuse. C’est précisément ce que je vis. J’ai de la difficulté à voir les choses."