Bruce Springsteen : La beauté du diable
Nouvel album sombre et dépouillé narrant les perversions de l’Amérique et tournée solo attendue pour l’un des plus grands auteurs-compositeurs d’Amérique. Brève rencontre avec The Boss.
Il y a trois mois, Springsteen lançait son nouvel album studio minimaliste, Devils and Dust, et il amorçait une tournée en solo.
"Ce n’est pas comme jouer avec le E Street Band, c’est même le contraire", dit-il à propos de son deuxième album solo. Enregistré sans les E Streeters, Devils réunit des chansons murmurées qui racontent des histoires, et des airs rock minimalistes empreints de country-folk.
Springsteen a enregistré les chansons avec le producteur Brendan O’Brien comme bassiste et Steve Jordan (qui a collaboré avec Keith Richards et Patti Scialfa, l’épouse de Springsteen) comme batteur, et aussi avec Soozie Tyrell, la nouvelle recrue du E Street Band, qui a échantillonné des violons. À plusieurs reprises, l’on entend les cordes, les cuivres, l’orgue et la guitare électrique. Malgré cela, l’effet est sobre et tout en couleurs sépia. "Je voulais préserver un ton brut, affirme Springsteen. À mon avis, c’est ce qui a disparu de la musique country moderne, cette espèce de frisson qui remue l’âme."
Comme avec Joad, bon nombre des chansons ont comme cadre le Sud-Ouest des États-Unis et sont parsemées de phrases en langue espagnole. "La vie de la nouvelle population migrante m’intéressait. Je voulais ressentir l’Ouest et le Sud-Ouest, dans mon imaginaire."
Les chansons étaient presque terminées en 1997, mais furent mises de côté au profit d’une tournée en 1999 en compagnie du E Street Band, tournée qui inspira The Rising en 2002. "C’est ma nouvelle chanson, Devils and Dust, écrite en 2003 au début de la guerre en Irak, qui m’a amené à ressusciter ces chansons", déclare Springsteen. (Cette dernière commence ainsi: "J’ai mon doigt sur la gâchette / Mais je ne sais qui croire…") "C’est une chanson écrite du point de vue des soldats en Irak. Mais elle peut être interprétée de plusieurs autres façons." Springsteen a tenté d’enregistrer la chanson éponyme à la fois comme une chanson rock pleine de colère et une ballade acoustique, mais il fallut la participation du producteur O’Brien – qui avait aussi collaboré à The Rising – pour réconcilier ces deux mondes. "Brendan a trouvé le juste milieu, de sorte que la chanson prend du muscle au fur et à mesure, sur le plan instrumental", déclare Springsteen. O’Brien a d’ailleurs gardé la même approche tout au long de l’album, ce qui a permis à Springsteen de se défaire du son lo-fi et des arrangements minimalistes de Joad, à la faveur d’une sonorité plus riche.
Parmi les chansons mémorables, l’on retrouve Reno, une ballade plutôt troublante à propos d’un homme qui va voir une prostituée, et qui contient une référence explicite au sexe anal, laquelle a valu à l’album un avertissement de "contenu adulte" sur le livret. ("C’était juste une question de feeling, ça marchait dans cette chanson.")
La tournée se concentrera sur le nouvel album, et inclura des chansons de Joad et de l’album Nebraska, sorti en 1982, ainsi que des versions simplifiées de chansons tirées de The Rising. "Il ne faut pas s’attendre à des versions acoustiques de mes succès, ce n’est pas du tout ça, insiste Springsteen. "Je tiens à avertir de potentiels acheteurs de billets: je ne jouerai pas de version acoustique de Thunder Road."
Entre-temps, Springsteen a déjà composé les chansons qui pourraient former le noyau d’un nouvel album avec le E Street Band et d’une éventuelle tournée. "J’ai des airs rock, mais je ne les ai pas encore écoutés, dit-il. Il est indispensable de les écouter une fois, pour savoir s’ils valent quelque chose. Je ne sais vraiment pas si je tiens les prochaines ébauches. Mais on s’y attaquera plus tôt que tard."
Le 13 juillet à 19 h 30
Au Centre Corel
Voir calendrier Rock
Devils and Dust
Bruce Springsteen
Sony