Carl Bastien : Homme à tout faire
Musique

Carl Bastien : Homme à tout faire

Carl Bastien, l’intarissable rat de studio et grand manitou de la production musicale québécoise, revient jouer dans ses platebandes natales de Buckingham avec sa formation Stone County Players.

Nul n’arrive à catégoriser officiellement le travail de Carl Bastien: réalisateur, accompagnateur ou compositeur. "Je sais pas!" avoue-t-il lui-même en riant. Une chose est certaine, l’habile touche-à-tout se nourrit beaucoup des diverses facettes de la production musicale qui s’entrecroisent dans sa carrière. "Écrire des tounes, ça apporte beaucoup à la réalisation. Et vice-versa. Tout se verse l’un dans l’autre. Je me considère comme un musicien qui a des skills de studio qui lui permettent de faire de la réalisation."

Cet intérêt amalgamé s’explique par son cheminement. Élevé dans un milieu bilingue à Buckingham (en Outaouais et non au Royaume-Uni), Bastien a grandi au son des Beatles, Donovan, The Who et Pink Floyd. Déjà, très jeune, il se montait des films muets auxquels il composait des trames sonores imaginaires. Étudiant en musique à Trois-Rivières, il a tôt fait de réaliser qu’il n’était pas du type à poursuivre une formation classique. "J’ai de la misère à rester dans un cadre. La musique à l’école, c’est beaucoup de lois, et j’avais de la difficulté à accepter ça", explique l’autodidacte.

C’est plutôt derrière la console que Bastien s’est fait reconnaître au cours des années 90. Après s’être fait remarquer en tant que bassiste de Jean Leloup, il a participé à un bon nombre de bijoux, tous acclamés des critiques, dont le controversé Déflaboxe de Daniel Bélanger ainsi que Rêver mieux, en plus des albums d’Ariane Moffatt, de Dumas (qu’il suit en tournée plus souvent qu’autrement) et de Freeworm, pour ne nommer que ceux-là. Inspiré par la tournée avec Bélanger, il décide, en 2003, de mettre sur pied un premier album pour sa création Stone County Players, projet qu’il caressait depuis des années mais qu’il a peaufiné à temps perdu. "C’est la première affaire à laquelle tu penses quand tu commences à jouer de la musique. L’option numéro un, c’est ça: faire un disque, que ça marche, et partir en tournée", explique le polyvalent Buckinois.

ENFANT CHÉRI

Carl Bastien s’ajoute à la scène musicale florissante à tendance électro-pop qui jaillit depuis le tournant du millénaire avec les Bélanger, Déry, Dumas, Minière, Perreau et compagnie, un milieu qu’il détache de la satiété pop facile menée par une certaine émission grand public et ses produits dérivés. "Des fois, on a tendance à mélanger popularité et talent. J’ai peur un peu de la saturation du marché. Parce qu’on dit que le disque ne va pas bien, mais en même temps, je n’ai jamais vu autant d’artistes signer [avec des compagnies de disques]."

"Ceux qui consomment les trucs de Star Académie et tout ça, je ne m’attends pas à ce qu’ils tripent sur mes affaires. Moi, je fais mes trucs et j’ai des gens qui aiment ça", justifie-t-il le plus naturellement du monde. Mais qui donc sont ces hurluberlus prêts à naviguer dans l’espace planant de Bastien? "Ceux pour qui la musique est un moment, qui sont prêts à s’asseoir devant leurs speakers et à écouter l’album au complet pour ce qu’il est. Des gens mélomanes, en général", décrit le lauréat d’un tout récent Jutra dans la catégorie Meilleure musique de film, pour son projet Les Aimants, avec Dumas.

STONER COUNTRY

Il n’est pas aisé de classer Stone County Players. Le collègue de Bastien Alain Berger le catégorisait au moyen de l’étiquette "stoner country" (enlevez les R et vous trouverez l’inspiration derrière le nom du projet), deux mots qui le décrivent de la façon la plus juste possible. Doté d’une instrumentation efficace et d’une technique de son impeccable, Extra Lovin’ ne fait foi que d’une bribe de ce son particulier qui se dégage en spectacle, mais compense avec une variété de sonorités et d’influences. "Le premier album, c’est le premier, donc ça t’a pris 30 ans à l’écrire, ça t’a pris toute ta vie. T’as eu tout ce temps-là avant, donc ça a tendance à avoir plusieurs saveurs. Tandis que le deuxième, ça va être quelque chose de plus stoner country sur tout l’album", explique Bastien à propos d’un deuxième projet studio qui pourrait voir le jour en 2006.

Et là ne s’arrête pas le layon pour Carl Bastien, qui s’occupe à la fois de ses créations personnelles et de celles des autres. Un album live de huit chansons des Stone County Players devrait arriver sur les tablettes d’ici la fin de la saison estivale. L’alter ego producteur, pour sa part, s’affaire présentement au prochain album d’Ariane Moffatt ainsi qu’à un nouveau Daniel Bélanger. Preuve de quoi on ne manque pas de besogne quand on sait tout faire… et qu’on le fait bien.

Le 14 juillet à 20 h
Au Parc MacLaren

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BUCKINGHAM EN FÊTE
L’événement estival en musique des Buckinois propose une programmation éclatante une fois de plus pour sa 15e édition, au Parc MacLaren, sous le pont Brady à Gatineau (Buckingham). Ouverture en grande avec la formation Stone County Players, suivie du controversé poète populaire Plume Latraverse, le jeudi 14 juillet. On poursuit, le vendredi 15, avec une soirée rock mouvementée mettant en vedette l’éternel festif Hugo Lapointe et l’excentrique Stefie Shock. Un samedi soir des plus rock’n’roll s’ensuit avec l’auteur-compositeur-interprète local Jean-Philippe Barette, Les Respectables et la célèbre formation des années 80 April Wine. La soirée de clôture sera à saveur folklorique avec le groupe acadien célébré partout à travers la francophonie Blou, suivi de Châkidor et du légendaire collectif La Bottine Souriante. De tout pour tous les goûts! (M.-A. Mongrain)
Info: www.buckinghamenfete.qc.ca