Rachid Taha : Vive le rocker algérien libre!
Rachid Taha revient pour une sixième fois à Québec, toujours aussi festif, certes, mais aussi profondément engagé.
L’énergie phénoménale déployée par Rachid Taha en spectacle nous fait parfois oublier que l’homme est également un artiste ayant des idées très arrêtées sur l’ignorance, la peur, la pauvreté, l’engagement humain et politique… Nous avions d’ailleurs pu le mesurer lors de son dernier passage à Québec, en mars, quand il avait lancé une boutade à propos de De Gaulle pendant son spectacle. Il faut savoir que le général est allé un jour dire aux Algériens: "Je vous ai compris", pavant ainsi la voie à leur indépendance, qui surviendrait par voie de référendum le 1er juillet 1962. "Tout le monde, Arabes compris, croit que ce geste est pro-Arabes, car la France avait les moyens militaires de gagner la guerre contre l’Algérie. Mais De Gaulle, qui était un politicien visionnaire, avait imaginé ce qui se passe aujourd’hui: il s’était rendu compte que si l’Algérie demeurait française, les Algériens seraient un jour européens et influenceraient trop la politique européenne! Ça a été ça, son brillant calcul!"
L’entrevue – très sympa, il faut le dire – avec Taha a été effectuée à la veille de la Saint-Jean-Baptiste. Curieux, il demande pourquoi les Québécois ont refusé deux fois leur indépendance. Et sans attendre la réponse, il ajoute: "Vous savez, contrairement à ce que l’on croit, devenir indépendant est un mouvement qui mène à l’ouverture aux autres. Les gens qui ne sont pas libres sont refermés sur eux-mêmes et font des crises de foie! (rires)" Lorsqu’on lui demande ce que l’indépendance a changé en Algérie, il rétorque: "Mais ça a tout changé! Je vais vous raconter une anecdote: un jour, à Oran, ma ville natale, je hèle un taxi et lui demande s’il est libre. Il me répond: "Bien sûr, depuis 1962!" C’est ça, l’indépendance d’un peuple."
Amant de la liberté, Taha s’inquiète de ce qu’il appelle les "extrémités de la démocratie". "Il faut que les Occidentaux comprennent qu’à force d’avoir des lois "si démocratiques", ils tuent la vie! À Londres, d’où j’arrive de tourner, nous n’avons plus le droit de fumer nulle part, les salles de spectacle doivent fermer à 22 h 30, etc. Tout ça au nom du bien commun! Mais moi, quand je suis à Istanbul, en Turquie, je m’amuse beaucoup plus qu’à Londres ou qu’en territoire américain."
Exception faite du Québec, où il dit retrouver "le public le plus proche de [sa] sensibilité libertaire". C’est ce qui explique ses fréquentes apparitions chez nous. "L’ambiance n’est pas la même qu’ailleurs. Je ne sais pas si c’est à cause du climat, mais le contact avec le public est chaleureux ici. Et j’aime bien jouer en plein air au Festival d’été de Québec." Comme Taha ne donne jamais le même concert deux fois, que les fans qui l’ont vu en mars se rassurent: nous aurons droit, entre autres, à de nouvelles chansons de son dernier opus Tékitoi, qu’il a rodées lors de ses tournées européennes. Et Taha se dit en grande forme…
Le 9 juillet à 21 h 30
Sur la scène Molson Dry (Parc de la Francophonie)
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