Daniel Russo Garrido : Histoire de rap
Musique

Daniel Russo Garrido : Histoire de rap

Daniel Russo Garrido est devenu, à 25 ans, le nouvel enfant chéri du rap québécois avec la parution de son premier album, Tristes & belles histoires. Sincère tête forte.

"Le concert de vendredi m’excite, car tous ceux qui croient que le hip-hop est un monde de gangsters tomberont en bas de leur chaise, rigole Daniel Russo Garrido. Ce soir-là, ils découvriront deux formations (les Français de TTC et Garrido en formule groupe) complètement différentes qui n’ont absolument rien des clichés rap."

Bien assis dans la cuisine de son appartement du Mile-End, le rappeur originaire de Québec étonne par son calme, sa lucidité et son franc-parler. Gagnant, au Gala hip-hop Montréal-Underground, des prix Artiste de l’année francophone, Album de l’année francophone (pour Tristes & belles histoires) et Texte de l’année français (pour Le jour où rien n’a changé), celui que l’on surnomme Boogat s’est également imposé en juin au Gala Unistar, remportant le trophée de l’Album de l’année. Vous l’aurez deviné, Garrido jouit d’une crédibilité béton dans le milieu rap, un univers où les injures et les couteaux dans le dos sont quasi monnaie courante (pour reprendre les mots de la rue, le rap laisse place au "talk-shit").

"Dans ce milieu, pour garder la tête haute, il faut être sûr de soi. Il est très important de réfléchir avant d’agir pour ne pas faire de conneries. Il faut aussi être sincère. Avec la sortie de mon album et de celui d’Accrophone, qui vient aussi de Québec, le milieu s’étonne de la scène rap de cette ville. Nous n’avons rien en commun avec les gangsters. Pour être respecté dans notre milieu, tu ne peux pas te fabriquer une image. Ton identité, c’est ton bagage de vie."

Et le vécu de Daniel se retrouve justement sur son premier compact: Tristes & belles histoires. Sur un rap aux accents latins parsemé de guitares acoustiques, ce bachelier en histoire né d’une mère mexicaine et d’un père paraguayen témoigne d’une crise existentielle traversée au début de la vingtaine. Imaginez le topo: issu d’une famille bourgeoise (économiquement et non mentalement, précise Daniel), le jeune vivait une passion pour le rap alors que ses parents tenaient mordicus à ce qu’il termine ses études.

Avec la popularité croissante du rap québécois, des M.C. comme Damien et les Catburglaz ont pu signer des contrats lucratifs qui leur permettront de mieux vivre de leur art. Toutes les distinctions amassées par Boogat n’ont évidemment pas laissé l’industrie indifférente au rappeur. "Avant de lancer mon album avec l’étiquette HLM, je l’avais envoyé à presque toutes les compagnies de disques de la province. Personne ne s’intéressait à ce que je faisais. Aujourd’hui, il arrive que ces mêmes labels me téléphonent, m’offrant de racheter mon contrat avec HLM. Qu’ils courent toujours. Avec les prix que j’ai gagnés, je risque de recevoir assez de subventions pour autoproduire mon deuxième album. Idéalement, j’aimerais acquérir une assez bonne notoriété pour un jour arriver chez un label et dire: "Voici mon prochain disque, c’est à prendre ou à laisser." J’estime les rappeurs qui signent un contrat en espérant vivre de leur musique, mais personnellement, je ne supporterais pas qu’un directeur artistique me demande de changer un refrain pour passer à la radio." Respect.

Le 29 juillet avec TTC
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