Ghislain Poirier : Beats inc.
Ghislain Poirier, confectionneur de gros rythmes bien gras et d’ambiances sophistiquées, se donne maintenant comme mission de faire bouncer les masses. Rencontre avec un Montréalais qui ne chôme pas.
"J’ai pas la prétention de me considérer comme un vrai rappeur. Dans mon cas, je trouve ça un peu fort comme terme", laisse tomber d’entrée de jeu Ghislain Poirier, de sa voix grave. Affichant une barbe de quelques jours, les traits un peu tirés mais le regard vif et le verbe facile, le Montréalais vient de vivre quelques semaines plutôt chargées. Après s’être retrouvé aux commandes d’un set de D.J. aux FrancoFolies, il a remixé une pièce de Millimetrik, en plus d’assurer la première partie de Buck 65 lors du dernier Off-Festival d’été de Québec. "Il avait de la difficulté à croire que c’était notre premier show en trio car il nous trouvait vraiment tight", affirme-t-il, visiblement satisfait de l’expérience.
De l’électro minimaliste ambiante au hip-hop, bien peu d’artistes locaux ratissent aussi large que Poirier. À la croisée des styles, son cinquième album, Breakupdown, verra le jour d’ici les prochains mois sous le label américain Chocolate Industries. Angles ragga prononcés, racines jamaïcaines, effusions hip-hop et même une escapade en territoire folk-hop sont à prévoir sur ce nouveau-né promettant des rythmes à l’avant-plan. "L’idée de départ, c’était de ne pas me censurer et de mettre des beats. Si ça groove, moi ça me va!" raconte-t-il. Et même s’il considère que la scène électro a perdu de sa vitalité au cours des derniers mois, il tenait à conserver une portion ambiante. "Mais toujours avec une rythmique lourde qui flotte au-dessus de l’ensemble", tient-il à préciser.
Conçue sur un laptop dans son studio maison, cette nouvelle galette largement instrumentale réunit quelques collaborateurs qui se relaieront au micro. Parmi eux, on retrouve Beans, ex-Antipop Consortium. Habitué des collaborations à distance, des clics de souris et des courriels, Poirier n’avait jamais échangé un mot avec ce dernier qui prête sa voix à la pièce Cold As Hell. "C’était vraiment étrange. Je lui ai envoyé un beat et il a rappé dessus. Puis le label a reçu sa piste et me l’a fait parvenir. Un étonnant jeu de ricochet."
Lors de sa prochaine prestation au Main Hall, en première partie de l’Américain Bluebird, l’amoureux de hip-hop sera accompagné par Vander (ex-Colocs) à la basse pour un son bien rond et dub à souhait, alors que Christian Olson se retrouvera derrière la batterie. La bande d’Omnikrom, pour qui Ghislain a trouvé le temps de pondre un rythme figurant sur leur premier maxi, sera aussi au rendez-vous, de même que Sixtoo. Et ne soyez pas surpris d’une future association entre le bassiste d’origine française et le prolifique bidouilleur. "Ce serait très envisageable, à moyen terme, de faire un maxi, mais on n’est pas pressés", avance prudemment le nouveau résidant du Mile-End.
Ainsi, l’automne s’annonce chargé pour le beatmaster qui, en plus de participer en septembre au populaire CMJ de New York, est invité à un festival de Chicago organisé par le magazine Wire. L’instigateur du projet Bounce le gros est-il satisfait de ses deux premières soirées au Zoobizarre? "C’est de la musique fuckée que je fais jouer mais la vibe est incroyable. Les gens dansent pendant des heures et ressortent de là le t-shirt complètement mouillé! Je suis privilégié." Défricheur de nouveaux talents, le D.J. considère-t-il qu’il y a un marché rentable pour le grime et le crunk? "C’est plein dans les salles alors la demande est là. La musique, c’est pour tout le monde. Même si tu ne connais rien à ça, c’est pas grave. Si tu es prêt à recevoir, à groover et curieux de nature, tu es le bienvenu."
Le 19 août
Avec Bluebird
Au Main Hall
Voir calendrier Hip-hop / Funk
Le 27 août
Avec Vander
Au Quai des Brumes