Aut'Chose : Le trip est fini?
Musique

Aut’Chose : Le trip est fini?

Aut’Chose ressuscite, presque 30 ans après sa mort, et son leader, Lucien Francœur, constate avec émoi que cette musique continue d’exercer la même fascination qu’autrefois. Watch out, rev’là le freak de Montréal.

"J’vas finir comme Rimbaud, j’vas tomber en dehors d’la poésie", prophétisait Lucien Francœur sur Une saison en enfer, chanson issue du second album de son improbable groupe, Aut’Chose. "Et c’est ce qui m’est arrivé, la radio commerciale, ça a été mon Abyssinie", relate aujourd’hui le poète et prof de cégep, tissant des liens entre sa biographie et celle du poète maudit qui, ayant tourné le dos à son œuvre, devint marchand d’armes en Afrique. "Moi, je n’y ai pas perdu une jambe, mais peut-être des morceaux de mon âme."

Des lambeaux qu’il s’est réappropriés en publiant de façon boulimique à la fin de sa flamboyante carrière radiophonique, et qu’il raccommode en reprenant sur disque et sur scène les "chansons d’épouvante" de son défunt groupe, aujourd’hui devenu objet d’un culte plutôt confidentiel.

Presque sombré dans l’abîme de la mémoire collective, Aut’Chose fit pourtant office de spectaculaire ovni dans la scène musicale québécoise du milieu des années 70. À l’époque où trônaient les Beau Dommage et Harmonium, le collectif proposait un rock disloqué sur lequel Francœur déversait une poésie désenchantée, embrassant à pleine bouche une américanité à laquelle d’autres ne présentaient que la joue.

"Ce retour, c’est pas de la nostalgie, se défend cependant l’auteur du Rap à Billy. Je ne me suis pas fait repousser les favoris comme dans le temps. C’est pas une revue musicale de casino, on refait ces chansons-là avec la même folie, la même énergie que dans le temps, […] mais plus rock encore. Sur scène, poursuit-il, j’entre dans un personnage, c’est comme un opéra rock. Et je suis encore en forme, je suis encore capable de faire ça. Ces gars-là, de Grimskunk (Joe Evil), Voïvod (Denis D’Amour, Michel Langevin) et Groovy Aardvark (Vincent Peake), avec qui Jacques [Racine, l’autre membre d’origine d’Aut’Chose] et moi on joue, quand ils m’ont dit qu’ils avaient écouté les albums, et à quel point ils avaient tripé sur cette musique-là, je trouvais ça incroyable. Et à la première répétition, je me suis rendu compte qu’ils prenaient ça au sérieux. Ils avaient appris les chansons, ils me soufflaient même les paroles dont je ne me souvenais plus."

Réintroduit dans l’univers poétique qui l’avait autrefois fait passer de proto-punk à vedette du showbiz, réconciliant sans effort le choquant personnage de scène qu’il fut avec le débatteur de fin de soirée à TQS qu’il incarne aujourd’hui, Francœur constate, non sans plaisir, que si le temps a buriné quelques rides sur son visage, les paroles de chansons des albums-cultes que sont Prends une chance avec moé (1975), Une nuit comme une autre (1975) et Le Cauchemar américain (1976), elles, n’ont rien perdu de leur charme originel. "Il doit y avoir quelque chose d’encore très actuel dans ces chansons-là, parce que je ne compte plus tous les jeunes de 14 à 20 ans qui viennent me voir pour me faire signer leurs albums, des disques qu’ils ont trouvés par hasard, dans la collection de leur mononcle ou de leur beau-père, et ils me parlent de chansons comme Nancy Beaudoin, comme Le Freak de Montréal; ça les touche, encore aujourd’hui."

Le 27 août
À l’Impérial
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