Sheila Jordan : Une vie de jazz
Musique

Sheila Jordan : Une vie de jazz

Sheila Jordan est l’une des plus grandes chanteuses de l’histoire du jazz. Aussi à l’aise dans le swing que dans la ballade, elle sait nous émouvoir avec une rare intensité.

Le parcours de Sheila Jordan est fortement enraciné dans le bop. Dès la fin des années 40, elle transcrit les solos de Charlie Parker et les chante. Elle fera, pour la première fois, l’expérience du duo voix-contrebasse en interprétant Yesterdays avec Charles Mingus à Toledo. C’est ce dernier qui lui fera rencontrer le grand Lennie Tristano. Elle connaît un grand succès à l’époque, mais à la fin des années 70, elle amorce un tournant. Steeplechase, avec le grand contrebassiste norvégien Arild Andersen, est l’un des plus beaux disques de l’histoire du jazz vocal, une référence. Ces 20 ou 30 dernières années, elle s’est souvent produite en concert avec le contrebassiste Harvie Swartz et a enregistré en petite formation, notamment Heart Strings, avec un quatuor à cordes (arrangements de Alan Broadbent ). Depuis le début des années 90, la dame s’est produite à deux reprises au Festival international de jazz de Montréal et autant de fois au Upstairs: "J’ai 76 ans et je n’ai jamais autant travaillé. Je me produis soit en duo, depuis quelques années avec le contrebassiste Cameron Brown (nous venons d’enregistrer un disque live, Celebration, sur High Note), soit en quartet (avec Steve Kuhn, Dave Finck et Billie Drummond)".

L’expérience du duo voix-contrebasse (nécessitant une plus grande écoute, favorisant plus d’intimité) est certes différente de celle en petit combo: "Je suis quelqu’un qui aime prendre des risques. En duo, le répertoire est totalement différent. Nous jouons un medley pour Miles Davis, du Fats Waller, du Charlie Parker, nous rendons hommage à Fred Astaire et à Ginger Rogers. Ce dernier truc suppose beaucoup d’interrelation. Je peux décider où je veux aller. J’y vais par feeling. La voix peut changer de direction. J’aime aussi beaucoup travailler avec le silence. Pour ce qui est des petites formations, je peux dire que j’ai eu la chance de travailler avec de merveilleux pianistes. Je répète aussi, à l’occasion, l’expérience du quatuor à cordes, comme récemment avec Bayayaga à Vancouver."

À la façon de Billie Holiday et de Abbey Lincoln, Sheila Jordan n’est pas une chanteuse de puissance, mais de finesse, d’émotion: "Quand je choisis une chanson, la première chose dont je m’assure, c’est que les paroles veuillent dire quelque chose. Alors, je m’en imprègne totalement. Vous vivez quelque chose, vous le chantez. Vous exprimez de quelle façon vous survivez. Ce sentiment de passer au travers, d’être toujours là. Ce qui me préoccupe, c’est de livrer un message d’espoir, de joie. Prenez The Crossing. J’ai écrit cette pièce après m’être libérée de l’emprise de l’alcool et des drogues afin de livrer un message. J’avais grandi spirituellement. Les termes qui me décriraient le mieux seraient ceux de music messenger."

"J’aimerais avoir de très grands bras pour les serrer contre moi", dit-elle à propos des victimes de La Nouvelle-Orléans. Pour le moment, une grande tournée l’attend (Monterey, l’Italie, le Portugal, les Açores, Taiwan). C’est par ses chansons qu’elle priera pour les naufragés du destin.

Le 14 septembre
Au Upstairs Jazz Bar & Grill
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