Thomas Hellman : Le flâneur
Musique

Thomas Hellman : Le flâneur

Le Montréalais Thomas Hellman revient en force avec L’Appartement, un second album sur lequel routes, voyages et flâneries se déclinent désormais essentiellement en français, et avec du banjo plein les oreilles.

"Au Québec, il y a beaucoup de choses qui se passent, tant dans les milieux francophone qu’anglophone, la musique d’ici bouillonne, c’est un endroit où il fait bon vivre en ce moment pour les artistes", confie Thomas Hellman, attablé à une terrasse près de chez lui. Un paquet de Gauloises sur la table, les mains tremblantes (trop de café), il semble tout à la fois ravi et fier de son nouvel album et angoissé par la réception qu’il obtiendra. Trois ans ont passé depuis l’acclamé Stories From Oscar’s Old Café, un recueil de chansons principalement anglophones qui rappelaient les belles heures de Leonard Cohen et de Tom Waits, ses premières amours, de celles qui pèsent lourd: "C’était une époque où je me cherchais; d’ailleurs, ça parle beaucoup de voyages entre New York et Montréal, d’avions, de trains. C’est devenu presque un cliché chez les jeunes: on ne sait pas ce qu’on veut faire, alors on voyage. Mais je crois qu’à un moment donné, il faut s’asseoir et se chercher dans un endroit précis. Et justement, avec L’Appartement, j’ai l’impression que je suis plus moi-même, que je vais plus loin dans la sincérité."

Chose certaine, les fantômes ne font plus d’ombre à Hellman, qui s’est forgé un style unique, atemporel, seul au Québec avec son folk-blues terreux: "Avec ce disque-là, on voulait aller vers un son plus américain, c’est pour ça que je suis très content de l’avoir fait à Montréal, avec des musiciens d’ici, parce que c’est de la chanson française mais avec un côté roots américain." Et c’est en mélangeant les deux cultures, la francophone et l’anglophone, qu’il obtient ce son si singulier, si beau, dans une langue toujours imagée et malicieuse: "Ma grand-mère américaine, qui est une vraie Texane, boit du whisky au petit-déjeuner et fume des cigares. C’est elle qui m’a appris le banjo; à l’époque de Stories, je ne me sentais pas assez à l’aise pour l’intégrer, mais maintenant oui, de plus en plus. J’adore le banjo, ça donne une couleur vraiment particulière." Nous aussi on adore. Ça repose des disques bidouillés dans les home studios. Hellman a choisi de tout enregistrer en direct, afin qu’on ressente l’osmose et l’énergie entre les musiciens triés sur le volet.

Le jeune trentenaire, qui a fait une maîtrise en littérature à McGill, avait depuis longtemps une idée nette quant au concept de l’album: "Comme pour le premier album, je voulais faire un recueil de nouvelles. Chacune des chansons raconte son histoire propre, mais dans l’ensemble, elles tournent toutes autour d’un même univers très circonscrit: l’appartement, que ce soit à l’intérieur ou sur le trottoir. Est-ce le même personnage qui revient d’une chanson à l’autre? C’est aux gens de l’interpréter comme ils le veulent. Il y a aussi une histoire d’amour qui revient. J’ai voulu faire un album qui se tienne dans son ensemble, j’ai souhaité qu’à chaque écoute, on puisse découvrir des couches supplémentaires."

En plus du vieux folk américain, Hellman avoue sa passion de toujours pour les chansons d’Aznavour, de Renaud et de Brel (qu’il reprend sur L’Appartement avec une Mathilde bilingue). Parmi les artistes d’aujourd’hui, il dit apprécier Jérôme Minière, Beck, et surtout Dominique A dont il chérit la démarche: "Une exigence, une recherche, une pureté tant musicale que textuelle, sans concession."

Les albums de Hellman ont un charme suranné mais entêtant. Il y a du magnétisme dans ses chansons, une force, on y revient sans pouvoir s’expliquer pourquoi, sans pouvoir percer leur mystère.

Le 24 septembre à 20 h
Au Théâtre Centennial