Gonzales : Je reviendrai à Montréal
Musique

Gonzales : Je reviendrai à Montréal

Gonzales est ami avec Peaches et Daft Punk, arrangeur méticuleux pour Birkin et Feist, homme-orchestre pour Philippe Katerine, rappeur associé à la scène électro berlinoise. Désormais seul au piano, le Montréalais d’origine donne son premier concert dans la Métropole.

Parce qu’il a d’abord été associé à la scène électro berlinoise aux côtés de son amie la Torontoise salace mieux connue sous le nom de Peaches, larguant quelques albums de hip-hop au deuxième degré avant d’atterrir sur Paris où il travaille désormais avec les Jane Birkin, Philippe Katerine, Feist, Daft Punk et autres Charles Aznavour de ce monde, et qu’il lançait il y a un an un album qui le met en scène seul au piano en élève déférent visitant l’école pianistique française, le Montréalais d’origine / Européen d’adoption Chilly Gonzales nous apparaît d’abord insaisissable et surtout très intrigant. Petite histoire d’un parcours singulier.

"Je suis né à Montréal, à Ville Mont-Royal précisément. On est parti quand j’avais 11 ou 12 ans mais j’y suis revenu poursuivre mes études en musique à l’Université McGill, un diplôme en composition classique et en performance jazz, expose-t-il dans un français sans faille. C’est à ce moment-là que j’ai pris la décision de faire de la musique non pas dans un sens académique, mais plutôt pour toucher les gens de mon âge." Celui que Feist surnomme affectueusement "Gonzo" y découvre alors "plein de trucs intéressants sur la musique, mais en même temps un exemple négatif en ce qui a trait à la pratique de la musique. J’ai su assez vite que je n’avais pas la personnalité pour rester dans un environnement académique, que je voulais être un entertainer avant tout, dans le but de toucher le plus de gens possible, bien que ma musique ne soit pas commerciale. Le concert que je vais donner à Montréal, mon premier dans cette ville, sera futuriste, divertissant, au deuxième degré, pas du tout introverti. Je ne suis pas un musicien qui fait semblant d’être chez lui sur scène, il faut entrer en contact avec les gens… Je suis là pour faire l’amour au public, non pas pour me masturber devant lui".

Petit rappel: celui qui s’exprime ainsi et qu’on a déjà vu rapper (en Europe) en complet de satin rose, ce déconneur drolatique anciennement sous contrat avec l’étiquette allemande Kitty-Yo, label qui célèbre ses 10 ans d’existence cette année, maison mère de Peaches, Jay Haze et Maximilian Hecker, est passé l’automne dernier chez No Format (Universal), un jeune label qui défend la musique éclectique, hors norme, abri d’un Nicolas Repac, par exemple.

Solo Piano, le disque que Gonzales a lancé il y a un an, nous le montre assis seul au piano, d’où le titre, intéressé par les Ravel, Fauré, Debussy et Satie, qu’il aborde d’une façon très personnelle, revisitant leurs œuvres pour les traduire en des miniatures d’environ trois minutes. "La durée des morceaux est justement en continuité avec la musique pop que j’ai faite. Je suis comme les gens de ma génération, c’est-à-dire que je ne supporte pas d’écouter un morceau qui dure plus de quatre minutes. Je sais très bien que les gens mettent leurs trois ou quatre morceaux préférés sur I-Tunes, je le sais parce que c’est ce que je fais moi aussi. Aussi, je crois que j’ai un net avantage sur les autres albums de jazz et de classique qui sortent en ce moment parce que je sais bien comment sont les jeunes, je vis parmi eux, j’ai fait de l’électro, je connais aussi bien les réseaux underground que la tour d’ivoire des musiciens classiques à cause de mes expériences à McGill."

On ne saurait donc trop vous recommander la découverte de ce Solo Piano si ce n’est pas déjà fait, un disque tout en délicatesse et en douceur, minutieux et très personnel, sur lequel s’entendent les mouvements de pédales; 16 courtes pièces qui sont un puissant antidote à l’angoisse, vous savez, ce disque que l’on cherche le dimanche soir, quand on sent que la fin de semaine tire à sa fin et qu’on s’inquiète un tout petit peu. Cet album intemporel qui calme les nerfs révèle aussi la passion de Gonzo pour les mélodies: "Je suis assez old-fashioned dans ma conception de la musique; ce qui m’importe d’abord, ce sont les mélodies, les harmonies et le rythme, qu’on soit en électro, en rap ou en chanson française. Pour moi, la musique, c’est quelque chose qu’on compose dans sa tête, sans instrument, donc à l’ancienne au sens où le morceau existe avant son enregistrement."

Ce qui l’aura mené à Paris, entre autres, c’est sa fascination pour Françoise Hardy. "Malheureusement, j’ai travaillé avec elle depuis – parce qu’ici, je réalise des albums de chanson française avec Renaud Letang (de plus en plus en demande, le duo franco-canadien a travaillé sur bien des albums, dont ceux de Manu Chao, entre autres). Et quand j’ai fait l’album de duos avec Jane Birkin, j’ai été amené à travailler avec Françoise Hardy. Ça ne s’est vraiment pas bien passé, elle n’a pas du tout aimé mon travail, il n’y avait pas de chimie, elle a même écrit une lettre à la maison de disques pour dire que mes arrangements étaient "atrocement vieille chanson française"! Ça m’a donné toute une leçon de vie, comme quoi les accidents et les rencontres fortuites, parfois, ça vaut mieux que les vieux fantasmes."

Surtout quand ces rencontres ont lieu avec des artistes tout aussi singuliers que lui: Gonzales travaille présentement au projet solo de Teki Latex de l’excellent trio de rap français TTC, après avoir bossé dur sur l’hilarant et inclassable Robots après tout de Philippe Katerine, à paraître cet automne. Au retour de son passage à Montréal, c’est le nouveau Feist qui l’occupera. Ne manquez pas son baptême dans sa ville d’origine.

Le 3 octobre
En clôture du Festival Pop Montréal
À La Tulipe
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