Stacy Rowles : De père en fille
Stacy Rowles chante et joue de la trompette avec une égale émotion et beaucoup de retenue. Elle a bien appris la leçon de son père, le légendaire pianiste Jimmy Rowles, véritable maître de l’espace.
Jimmy Rowles commence sa carrière au sein de grands orchestres comme ceux de Benny Goodman et de Woody Herman. Il deviendra vite l’accompagnateur de choix des plus grandes voix du jazz: Billie Holiday, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan, Peggy Lee, Carmen McRae. Il affectionnera particulièrement les petits ensembles comme les trios sans batteur (avec contrebassiste et guitariste ou saxophoniste). Bien qu’enraciné dans le piano swing des années 30 (Duke Ellington, Teddy Wilson), il sera associé aux pianistes majeurs des années 50 (Tommy Flanagan, Hank Jones, Wynton Kelly). Il possède un sens du rythme remarquable. Stacy Rowles reconnaît en son père son véritable mentor: "Ce que je retiens de lui, c’est le choix de ses notes, son goût sûr. Il avait l’habitude de dire que ce qui compte, ce n’est pas les notes que tu joues, mais celles que tu suggères."
Nous lui devons l’un des plus beaux standards de jazz, The Peacocks. C’est avec lui que Diana Krall, dont Stacy dit qu’elles sont "comme des sœurs", a appris l’essentiel. Stacy et Jimmy Rowles ont enregistré ensemble Tell It Like It Is, Looking Back et Me and the Moon.
Sur ce dernier disque, ils interprètent des pièces de James P. Johnson, de Gershwin, d’Ellington (Portrait of a Lion) et de Billy Strayhorn (Something to Live For). Stacy Rowles raconte comment elle en est venue à la trompette et à quel point le contexte familial l’a choyée: "J’ai commencé à jouer à l’âge de 12 ans. Avec la vieille trompette de mon père. Il m’a enseigné les gammes. Le nombre de mélodies que j’ai entendues à la maison est incroyable. Je trouve encore des feuilles de musique partout. Des notes de Ben Webster! J’ai accès à un véritable trésor, à un grand héritage culturel. Je chante exactement comme lorsque j’improvise à la trompette. Je chantais bien avant de jouer de la trompette, quand j’oubliais les mots d’une chanson, par exemple. Pour mon père, les paroles étaient très importantes, les syllabes sur lesquelles mettre l’accent."
Rowles voue une grande admiration à Clark Terry. Son jeu présente des affinités avec celui des grands trompettistes de la période "cool" (Miles Davis, Chet Baker, Shorty Rodgers). Économe, concis, il laisse la place au silence.
Stacy Rowles a participé à plusieurs projets réunissant des femmes musiciennes: le grand orchestre Maiden Voyage et différents quintets, Jazz Birds, The Swinging Ladies et Velvet Glove. Ce dernier groupe, formé par la contrebassiste torontoise Rosemary Galloway, a produit Round One et Coming Out Swinging. "À ce moment [le début des années 90], précise Rowles, c’était important, sur le plan musical, de prendre position. Maintenant, avec la réussite de plusieurs femmes, cette idée est un peu dépassée." Pour les deux soirées au Largo, Lorraine Desmarais et Rosemary Galloway se joindront à Stacy Rowles. Le batteur torontois Terry Clarke complétera la formation.
Les 5 et 6 octobre à 20 h
Au Largo Resto-Club
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