Interpol : Broyer du noir
Musique

Interpol : Broyer du noir

Interpol fera salle comble au Métropolis pour la deuxième fois en moins d’un an. Suivront quelques mois sabbatiques, une pause dont la formation a besoin… Encore plus qu’on pouvait l’imaginer.

Lorsque le luxueux autobus d’Interpol foulera le sol montréalais cette semaine, il ne restera plus que quatre concerts à la tournée américaine du quatuor. Presque un an jour pour jour après la sortie d’Antics, l’heure sera alors au repos pour la troupe new-yorkaise marquée par la noirceur dépressive de Joy Division. Un hiatus amplement mérité puisque Interpol vient de passer le fatidique test du deuxième effort avec succès. Certains (moi le premier) ont beau trouver qu’Antics manque de mordant comparé au sublime Turn on the Bright Lights, force est d’admettre que le compact a permis au groupe de consolider sa position sur la scène mondiale plutôt que de le tirer vers les abîmes de l’oubli.

Joint au téléphone alors qu’il se trouvait dans une chambre d’hôtel à San Francisco, le bassiste Carlos Dengler n’affichait pourtant pas l’enthousiasme d’un musicien comblé. "La tournée terminée, nous prendrons une pause… Une longue pause. Je ne peux pas parler pour les autres, mais j’ai terriblement besoin de cet arrêt pour me ressourcer. Je n’aime pas les tournées. Je ne veux pas vivre dans un autobus tous les jours. J’en ai assez de me réveiller chaque matin dans une nouvelle ville. Je ne veux pas jouer sur scène tous les soirs. Ce n’est pas comme ça que j’imagine ma vie. Je peux supporter ce nomadisme quatre mois par année, mais là, c’est trop. Depuis les trois dernières années, nous vivons dans nos valises dix mois sur douze. Il est temps que ça cesse."

Venant d’un groupe qui a avalé plus que sa part d’asphalte depuis sa fondation, ce discours n’a rien de particulièrement étonnant. Par contre, lorsqu’on interroge Carlos sur le plaisir que lui procurent sur scène les pièces d’Antics, une certaine inquiétude tend à se dessiner. "Présentement, toutes les questions portant sur ma vie professionnelle m’embêtent. Même si je ne me considère pas en dépression, je suis tellement brûlé que j’y vois du noir partout. Mon point de vue s’en trouve altéré, et mon pessimisme distord la réalité."

Il faut aussi dire qu’Interpol ne compose pas sur la route. Outre une pièce inédite (Direction) offerte à la populaire série télévisée Six Feet Under, la formation n’a rien pondu de neuf depuis l’enregistrement d’Antics. "Je crois que ça joue aussi sur mon moral. Lorsque est venu le temps de partir en tournée pour Turn on the Bright Lights, nous avions plusieurs bonnes pièces en banque qui ne s’étaient pas retrouvées sur l’album. Nous les gardions pour la scène. Ce ne fut pas le cas pour la tournée d’Antics. Mais c’est justement l’idée d’accoucher de nouvelles chansons qui m’aide à m’accrocher. La durée de notre pause reste pour l’instant inconnue, mais je sais que le plaisir de jouer reviendra lorsque nous prendrons à nouveau le temps de composer. Je rechargerai alors mes batteries pour préparer notre prochain périple partout sur le globe."

Une preuve que le sombre répertoire d’un groupe peut même affecter le moral de ses membres.

Le jeudi 29 septembre
Au Métropolis
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