Mariza : Coup du destin
Musique

Mariza : Coup du destin

La grande interprète Mariza, tout en restant fidèle aux racines du Fado, tente de l’exprimer de façon personnelle. Elle nous accompagne dans l’écoute des chansons de son nouvel opus, Transparente.

"J’ai grandi dans un quartier de Lisbonne où tout le monde chantait du Fado", affirme d’entrée de jeu Mariza. Bien qu’elle ait vécu presque toute sa vie au Portugal, la chanteuse est née en Afrique et aime évoquer avec tendresse l’image de sa grand-mère. Les mots de la chanson-titre de l’album, Transparente, célèbrent cette filiation: "Entre la terre et le divin / Ma grand-mère noire savait / Ces choses du destin…Je vois une chevelure tressée et le chant nonchalant du Fado/Dans un châle de cheveux bouclés / Comme dans un conte de fées / Les tam-tams sont guitares". Aussi n’est-il pas surprenant d’entendre Mariza saluer la mémoire d’une autre figure féminine importante pour elle, Amélia Rodrigues: "J’ai grandi en l’écoutant à la radio. La tradition orale est importante. Amélia était une véritable icône. Je rends hommage à tout ce qu’elle m’a apporté."

Comme le Blues ou le Tango, le Fado exprime souvent le cafard, la désillusion, le sentiment de perte, mais aussi l’ivresse, le dépassement: "Le Fado chante la plupart des émotions: la mélancolie, la tristesse, le deuil, mais, en même temps, le sourire, la joie".

Le mot fado est synonyme de "destin" et traduit souvent la valse-hésitation entre le passé et le futur: "Chacun d’entre nous choisit son Fado et sa façon de le vivre, de l’exprimer". L’émotion amoureuse occupe une place centrale dans le Fado et Mariza nous la fait sentir d’une façon admirable dans deux chansons en particulier, Des mots sont des baisers et Deux Larmes de rosée: "L’amour est l’émotion la plus profonde qui soit. Rien alors ne peut vous séparer de l’autre, qu’il s’agisse d’un amant, d’un parent, d’un enfant". C’est ainsi qu’elle interprète un fort beau texte de Fernando Pessoa, Il y a une musique du peuple, qui dit simplement son amour des petites gens: "Chez nous, nous buvons le plus souvent en groupe, pour l’énergie qui se dégage. Cette chanson célèbre le plaisir d’être ensemble".

Des interprètes comme Bevinda, Misia et Mariza parviennent, chacune à leur manière, à faire le pont entre tradition et modernité, à conjuguer le Fado au présent. Dans une chanson comme Fado portugais bien à nous, le Fado supplie d’être retrouvé: "Au XXIe siècle, le Fado, comme tous les autres genres de musique, continue à se développer. C’est une musique vivante, qui respire, comme les gens, la ville, la société". Chanter le Fado n’est pas une fuite en arrière ni un rêve éveillé, c’est un acte d’enracinement dans le présent. Les mots de Refus ont presque valeur de manifeste: "Si être fadiste c’est être lune/ Et le soleil perdre de vue/ Être statue qui s’insinue/ Alors je ne suis pas fadiste". Mariza trouve peu à peu sa propre voie: "Quand j’étais jeune, les chanteurs interprétaient des fados traditionnels. Maintenant, chaque auteur exprime ce qu’il ressent. De plus en plus, j’arrive à exprimer mon Fado d’une façon qui m’est propre. Et c’est un grand honneur, pour moi, de transmettre la culture du Fado, de faire un pont entre le Portugal et le reste du monde". Mariza se réjouit de voir le public s’élargir et de rejoindre les jeunes: "Dans un concert récent, le public était constitué de générations complètement différentes; pour la plupart, autour de 25, 35 ans. Les Portugais essaient de plus en plus d’encourager leur propre culture."

Le 30 septembre
Au Théâtre Outremont
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