Philibert Bélanger : Morceaux et petites perles
Musique

Philibert Bélanger : Morceaux et petites perles

Morceaux et petites pièces, c’est un bijou d’album constitué de 10 perles créées et soigneusement assemblées par Philibert Bélanger…

Quand Philibert Bélanger est venu me porter le démo de Morceaux et petites pièces au bureau, je me suis dépêchée de déballer ce trésor. J’avais déjà vu Philibert à quelques occasions en spectacle: au Pif en chanson, au Petit Théâtre de Sherbrooke, à la Commission des liqueurs, aux Correspondances d’Eastman… Chaque fois, les chansons de ce garçon timide mais charismatique m’avaient accrochée. D’abord Alice, puis Avril. Ensuite La Pluie et La vie est court métrage. Le démo m’en a fait découvrir les autres: Les jours sont à nous, D’elle, Les Bagnoles, Ombres mécaniques

Ancien guitariste de Vincent Vallières, Philibert Bélanger s’est décidé à diffuser son travail d’auteur-compositeur-interprète. Comme un orfèvre dans son atelier, il a enregistré son disque dans son studio, aménagé dans une petite pièce chez lui. Le tout sonne impeccable ou, à tout le moins, très pro. Il est d’ailleurs très content du résultat. "Ce que je voulais, c’est offrir quelque chose qui s’écoute bien". Tellement bien qu’on en devient vite accro.

Quand il nous révèle que ça fait deux ans qu’il chante et compose ses chansons, on a peine à le croire, mais on est heureux qu’il ait si bien appris des autres. Fan de Daniel Lanois et influencé par The Edge, Philibert a accompagné Olivier Brousseau puis Vincent Vallières en tant que guitariste. "Les deux m’ont appris la force d’une bonne chanson", constate-t-il. Avec Vallières, Philibert a fait partie de la tournée Bordel ambiant et créé quelques-uns des riffs les plus accrocheurs de l’album Chacun dans son espace. Quand Vincent est déménagé à Montréal, Philibert n’a pas eu envie de continuer à être son guitariste sans qu’on lui paie les frais de transport Sherbrooke-Montréal.

Grand bien lui en fit, car il commença à composer de son côté et à accompagner David Bergeron. Après avoir entendu ses chansons, le lauréat de Petite-Vallée et de Granby l’encouragea à poursuivre sa démarche créatrice.

MÉLO DIEU

La plus grande force de Philibert Bélanger réside dans ses mélodies, dans cette façon unique d’écrire des lignes accrocheuses en étirant les voyelles ou en les découpant pour les associer à une consonne, le plus souvent un D, un H ou un T. Amant des choses simples et amoureux des sons, il admet avoir une certaine facilité à composer des mélodies qui restent en tête.

Quand il parle de ses textes, il dit ne pas faire de la grosse poésie. "Mais ça m’évite des lourdeurs", observe-t-il. Sa plume est imagée et son sens de la formule, éprouvé. Dans l’une des premières chansons qu’il a composées, La Pluie, il compare une femme à une feuille d’automne. Une femme que l’on pourrait croire volage ou non, c’est selon.

Alors brille, feuille d’automne et d’orange/Insouciante, tu es le joyau de ces bois/Alors glisse, feuille d’automne et des airs/Dans la boue, pieuse, tu finiras/Mais la vie tu sais te perdra…

"J’aime que les gens s’approprient des chansons […] Tu pourrais comprendre ce que tu veux et ça serait bien correct". Du coup, il avoue ne pas bien comprendre l’anglais et ne pas toujours chercher à savoir ce qui est dit dans les chansons anglophones qu’il écoute. "Tant qu’il y a une esthétique, c’est valable pour moi." Plus tard, il critiquera tout de même l’une de ses rimes. Celle qui amorce Alice:

Alice s’en est allée au pays des merveilles/Là où les tournesols font la cour au soleil…

On a déjà vu pire. Et quand on apprend que la chanson est inspirée de l’histoire vraie d’une fille qu’il connaissait et qui est morte frappée par un train pendant un trip d’héro, on est happé à notre tour. N’ayant pas soupçonné le drame caché derrière cette chanson dansante.

Alice! Où s’en va ton train-ain?/Wo-oh Alice! Toute seule sur ton chemin-in…

SES ARTISANS

Reconnaissant pour le travail des gens qui l’entourent, Philibert estime qu’il ne serait jamais parvenu à un son aussi riche sans ses musiciens. Le batteur Étienne Dupuis-Cloutier a été le premier recruté. "On écoutait les White Stripes et on s’est dit qu’on pourrait reproduire le même genre d’énergie", rigole-t-il. Peu à l’aise de tout assumer vocalement sur scène, Philibert est allé chercher un autre allié, le guitariste Charles-Antoine Gosselin. Sa voix, plus douce et plus haute que celle de Philibert, s’y fond, comme le cuivre qui fusionnerait avec l’étain pour former du bronze. Enfin, il a approché un de ses collègues de travail, Sylvain Lussier, guitariste pour Flying Figures, mais bassiste pour ce projet-ci. Chacun est arrivé avec un bagage musical différent. Pour Étienne, c’était l’électro, Charles-Antoine, le folk, et Sylvain, le rock. "Je suis chanceux d’avoir ces gars-là", souligne le chanteur, qui s’accompagne souvent au lap steel. "J’ai l’impression qu’on profite tous du fait qu’on travaille ensemble."

DIAMANT BRUT

Morceaux et petites pièces, c’est un peu comme la découverte d’un diamant brut qui laisserait présager l’ouverture d’une mine prospère.

Lorsque l’auteur de l’album s’autocritique, il s’attarde à sa façon de chanter et considère qu’il fausse parfois. Mais tandis qu’il aborde ce sujet, attablé dans son café fétiche de la rue Montréal, le nom d’Éric Goulet des Chiens surgit. Puis ceux de Neil Young et de Bob Dylan.

Sa voix enveloppante mais imparfaite, Philibert l’assume et l’a même voulue très présente sur cet album. Et c’est tant mieux, car ce choix nous permet d’apprécier la valeur de ses mots et de voir surgir des images alors que le rythme de la musique nous envahit.

Contrairement à tellement d’autres musiciens, Philibert ne tient pas à vivre de sa musique. L’important pour lui, c’est de trouver du temps pour créer. Pour ce faire, il a choisi de travailler à temps partiel et de donner quelques cours de guitare. "Ce que j’aimerais, c’est que ça intéresse du monde, qu’une petite équipe se crée autour de moi. Pour booker des shows, par exemple…"

"Mais faut pas s’en faire accroire, poursuit-il. C’est pas parce que c’est bon que ça va marcher. Le confort ne va pas de soi."

Philibert
Morceaux et petites pièces
Indépendant

Lancement
Le 12 octobre
Au Loubards