Bill Dixon : Improvisation libre
Bill Dixon, trompettiste, compositeur et professeur, a participé activement à la naissance du free jazz au début des années 60. Entrevue sur les thèmes de l’engagement dans la production, de l’enseignement et de l’improvisation.
Le deuxième volet de la série Tryptique, mise sur pied par le saxophoniste Michel Côté, permettra au public québécois d’entendre le célèbre trompettiste Bill Dixon. Après une série de concerts fructueux qu’on surnomma The October Revolution in Jazz, Dixon tenta de rassembler les forces en présence pour mettre sur pied à New York une coopérative de production de disques et de concerts, la Jazz Composer’s Guild. À ce moment, ce geste revêtait un caractère éminemment politique: "À l’époque, l’industrie du spectacle en jazz s’orientait beaucoup vers les boîtes de nuit. Les producteurs ne prenaient pas beaucoup de chances. Il s’agissait d’amener les musiciens à prendre conscience de leur pouvoir. La Jazz Composer’s Guild représentait une force politique pour négocier avec l’industrie."
Sur le plan musical, Dixon n’hésitera pas à rendre hommage au grand trompettiste Booker Little: "La pièce Requiem for Booker Little est très évocatrice de la façon dont il abordait la musique. Ce fut un improvisateur remarquable qui créait des lignes mélodiques uniques." Il travaillera souvent aussi dans des contextes novateurs, comme un quartette incluant deux contrebassistes: "Cette pratique remonte à aussi loin que Duke Ellington. Dans les premières années du New Thing, le piano était très dominant. J’ai utilisé deux contrebassistes dès le début des années 60. Cet instrument permet de donner à la musique une forme plus coulante. Les deux derniers contrebassistes avec qui j’ai joué de cette manière sont William Parker et Barry Guy."
Plusieurs observateurs critiques ont reproché à Bill Dixon d’être resté en retrait volontairement. Dès 1968, il se consacre à l’enseignement. De 1974 à 1996, moment où il prend sa retraite, il dirige le département de black history du Bennington College au Vermont: "Les gens pensent souvent que celui qui enseigne ne sait pas jouer. Or, j’ai toujours enseigné, principalement à New York. L’enseignement m’a permis de poursuivre mon travail de création sans faire de compromis, acceptant vraiment ce qui m’intéressait."
Pour Bill Dixon, l’improvisation est une forme d’art sans frontières. En 1998, il publie un coffret de six CD, Odyssey, cinq contenant des œuvres en solo, le sixième regroupant des entretiens: "L’improvisation, ce n’est rien de nouveau. La musique existe seulement si elle est jouée. Ce qui importe, c’est comment vous l’exécutez. La musique représente alors un défi de chaque instant."
À 80 ans, Bill Dixon est encore en pleine forme. Il pratique toujours six à sept heures par jour. Son travail de lithographie l’a amené à présenter ses œuvres à Villeurbanne, en banlieue de Lyon, en 1994. Il est venu au Québec à deux reprises: à Victoriaville, avec Cecil Taylor et Tony Oxley, en mai 2001, puis récemment à l’Université McGill dans le cadre d’une semaine de l’impro. À la Bibliothèque Gabrielle-Roy, il formera différents duos avec Michel Côté (saxophone), Pierre Côté (contrebasse) et Alexandre Grogg (pianiste).
Le 19 novembre à 20 h
À la Bibliothèque Gabrielle-Roy
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