Son enfance et son adolescence, le chanteur de Plywood 3/4, Dany Placard, les a passées à Laterrière. "On passait l’hiver à faire du ski-doo et l’été à rouler en motocross dans les pits de sable, se souvient-il. On jammait sur du Metallica dans les garages, pis on écœurait les plus jeunes. On avait ben du fun." Léger pincement au cœur.
C’est au Café Cambio que nous pourrons assister au show de Dany Placard où il nous fera entendre ses dernières chansons: un verbe authentique et jamais pompeux. Son nouveau disque solo, baptisé Rang de l’église, ne témoigne pas d’une rupture marquante avec l’ambiance Plywood 3/4. Sombres, tantôt glauques, mystérieuses et nostalgiques, les pièces du compact s’inspirent de la folk américana de Tom Waits, Calexico et Howe Gelb (Giant Sand). Quelques références à Miles Davis (dont une courte reprise du Concerto d’Aranjuez de Joaquin Rodrigo que le trompettiste avait interprété) viennent également jeter un peu de grisaille sur la facture somme toute moins mouvementée que celle de Plywood.
Les thèmes abordés sont la fuite de la réalité, la vieillesse et l’espoir d’un rêve (souvent insaisissable) bien ancré dans un spleen omniprésent. "Je crois que c’est le sentiment général qui règne à Laterrière, répond Dany. Beaucoup de monde a quitté le village; les gens qui y restent se sentent abandonnés. Mon frère vit encore là, et tout semble si triste et monotone. Il n’y a plus rien à faire, et comme la télévision satellite et Internet se rendent là-bas, tout le monde vit devant son écran."
L’idée d’un personnage en quête d’exutoire, Dany l’avait aussi exploitée sur Beauté mécanique, le dernier disque de Plywood 3/4: isolé dans son garage, un homme occupe ses journées à fabriquer la créature de ses rêves. Un leitmotiv? "Je dois être aussi en quête d’un idéal, affirme le compositeur qui précise toutefois n’être pas si malheureux de son sort. Je travaille présentement en ébénisterie sur un chantier de construction. Chaque jour, je me demande combien de temps encore je devrai faire ça. Je suis une personne anxieuse, il faudrait que tout aille toujours mieux. Vieillir me fait aussi peur. Je vois mon père qui, à 52 ans, ne peut plus travailler à cause d’un accident. Il a passé 18 ans au sein d’une compagnie qui ne l’a même pas remercié lors de son départ (la chanson Les Mains dans l’huile y fait référence). Je trouve ça déprimant de le voir écouter Quebecor à la TV, pris dans sa maison à Laterrière."
Et pourtant, comme tous ces gens qui sont toujours ici et qui sont las de ce discours défaitiste qui trop souvent, comme une vague sombre, lèche notre estime régionale, il a cet attachement au coin qui le pousse à revenir. Comme plusieurs artistes qui ont dû s’exiler, la blessure du déracinement et le triste constat d’une région qui souffre sont autant de prétextes pour la création. "J’m’en retourne à Chicoutimi, j’m’en retourne à la maison", comme dit sa chanson. Un retour presque initiatique au pays où le ciel arbore encore "un paquet étoiles"…
Le 25 novembre à 21h
Au Café Cambio
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