Tryo : Ils étaient quatre…
Musique

Tryo : Ils étaient quatre…

TRYO passe trois soirs au Métropolis pour souligner son dixième anniversaire. Une belle occasion de voir le groupe en concert avant que celui-ci ne prenne une longue pause pour se ressourcer…

Tels les mousquetaires, ils sont quatre alors qu’on les pensait trois: Mali, Guizmo, Manu et Daniel forment depuis dix ans la troupe Tryo, à la suite d’une rencontre fortuite à la Maison des Jeunes et de la Culture de Fresnes (France), en 1995. Après deux années de spectacles, Tryo lance un premier album autoproduit, Mamagubida, qui mélange reggae et textes engagés (qu’on nommera alors "reggae akoustik"), une espèce d’hybride entre Renaud et Bob Marley. Aidé par un énorme bouche-à-oreille, Mamagubida se vend à 600 000 exemplaires! "C’est un vrai conte de fées, cette histoire, relate le percussionniste du quatuor, Daniel. C’est magique. Ça a pris une ampleur à laquelle on ne s’attendait pas du tout. On a vu évoluer tout ça avec beaucoup d’amour et beaucoup de respect."

Suivent Faut qu’ils s’activent en 2000, l’excellent Grain de sable en 2003 et De bouches à oreilles, en 2005, un album double live. En dix ans, c’est plus de 1 200 000 albums (dont 50 000 au Québec) que réussira à vendre Tryo. Pas mal pour un groupe qui s’autoproduit!

Il faut dire que Tryo s’inscrit tout à fait dans cette mouvance contestataire citoyenne altermondialiste et engagée qui a vu le jour dans la dernière décennie, parce que, comme le fait remarquer Daniel, "on n’a plus le choix. Il y a dix ou quinze ans, on parlait de problèmes d’environnement et de société à venir… Aujourd’hui, nous sommes en plein dedans, on ne peut plus rien nier. On n’a qu’à regarder comment agit le président des États-Unis, que j’ai peine à considérer comme un être humain."

Même s’il est toujours porté par la volonté d’offrir aux gens un rapport au monde où l’engagement se vit et se chante au quotidien, Tryo a beaucoup changé en dix ans. "Musicalement, c’était très instinctif, au début. Alors on s’est penchés sur la musique, on a trouvé de nouvelles sonorités, tout en maintenant le fil conducteur: les trois voix et l’importance de la mélodie. Côté écriture, disons qu’elle était plutôt adolescente il y a dix ans; aujourd’hui, elle est plus mature, plus tournée vers le monde. Même notre présence scénique s’est transformée. Cela dit, on garde notre essence: harmonies vocales des trois voix, textes engagés, et un côté festif et léger."

C’est d’ailleurs l’une des forces de Tryo: ils ont toujours su parler de choses graves sur un ton très léger. "L’humour et l’ironie sont la meilleure façon qu’on a trouvée pour faire passer notre message. Et puis, on se défend de n’être que ça: on n’est pas qu’engagés. On a des préoccupations graves, chacun de nous avait ces préoccupations avant d’être dans Tryo d’ailleurs, mais nous avons aussi, comme tout individu, un côté plus loufoque, plus léger." Comme les Mini-Wheats, quoi: un côté sain, un côté givré…

Daniel a-t-il l’impression que sa musique peut faire une différence dans l’évolution du monde? "On n’a pas cette prétention. On n’est que des musiciens. Par contre, à l’échelle humaine, elle change les choses. Il y a peut-être une seule personne sur les 5000 qui viendront nous voir en concert ce soir chez qui il va y avoir un déclic, mais c’est déjà une grande victoire. Le plus important, c’est la prise de conscience individuelle. Et puis, vous savez, on n’est pas complètement ce qu’on chante, même si on tend quotidiennement à l’être. Moi, je ne me fais jamais inviter dans un tipi à manger des haricots verts devant un feu de bois! On a vendu des disques, on vend nos places dans les concerts, on fait aussi du commerce. L’important est de rester intègres et de respecter notre public. Là-dessus, j’ai la conscience limpide!", s’exclame-t-il dans un éclat de rire.

Après une décennie endiablée, le groupe a décidé de faire une pause de deux ans sans donner de concert, sans écrire de chanson (un moment d’arrêt qu’ils suspendent quelques mois pour entamer cette série de concerts dixième anniversaire). Pourquoi? "Ouais, on a même vu que sur notre forum, il y a des rumeurs de séparation qui couraient! Rassurez-vous, on ne va pas se barrer. On est bien ensemble, il y a une belle amitié entre nous. On a déjà fait une année de pause, on va en faire une deuxième, car chacun de nous a besoin de se ressourcer, d’aller de l’avant avec ses projets plus personnels. On a tous besoin de vivre des choses de notre côté. On est des individus très forts et très différents. Mais on va se retrouver dans un an, maximum dix-huit mois, pour retravailler ensemble, c’est certain. On est producteurs et on fait ce qu’on veut. C’est important pour notre équilibre humain et notre santé, cette pause. Et vous savez, les tournées anniversaires, c’est fatigant!"

Les 14, 15 et 18 décembre
Au Métropolis
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