KT Tunstall : Une fille et sa guitare

Elle est même persuadée que ç’aurait été une erreur de lancer un premier disque il y a quelques années: "Si j’avais enregistré mon album avant, même à 25 ans, il n’aurait pas été aussi honnête, aussi bon (que ne l’est Eye to the Telescope), car ce n’est qu’au cours des cinq dernières années que j’ai réellement découvert ce que j’aimais, ce que je voulais faire, et comment je voulais que ça sonne. Je suis tellement soulagée d’avoir pris cette route", assure KT (pour Katie).

L’artiste, qui a grandi à St. Andrews, un petit village d’Écosse, auprès d’un père physicien et d’une mère enseignante pas très versés dans la musique, raconte que des journalistes lui ont offert de ne pas mentionner son âge dans leurs articles, pour ne pas l’embarrasser. Sa réaction a été vive: "Quoi? Si je ne voulais pas que les gens sachent mon âge, je mentirais. Mais pourquoi le ferais-je? Je suis fière de mon expérience. Quand j’écris une chanson, je sais de quoi je parle", estime KT. Même si elle est persuadée qu’à 20 ans, c’est possible d’écrire un album fantastique, elle pense aussi qu’il y a des leçons qui ne s’apprennent qu’au fil des années: "Miles Davis disait: "Parfois, il faut beaucoup de temps pour apprendre à être soi-même", et c’est ce que j’ai fait durant la vingtaine", dit-elle.

Ainsi, après ses études, KT s’est jointe au groupe de St. Andrews The Fence Collective. Pendant près de cinq ans, elle a joué avec eux de la musique folk traditionnelle, jusqu’à ce qu’elle réalise que son style personnel avait évolué dans une direction différente. "Je me suis alors installée à Édimbourg et, pendant trois ans, j’ai fait partie du trio rock Red Light Stylus. Quand j’ai réalisé que mon style avait de nouveau changé, je suis allée à Londres pour tenter ma chance toute seule. J’avais 27 ans. J’ai appelé Simon, un a&r de ma connaissance – qui tentait de la convaincre depuis plusieurs années de s’installer à Londres -, pour lui dire que j’étais prête à signer un contrat avec un label. Simon est devenu mon gérant et, trois mois plus tard, je signais une entente de publication avec Sony", raconte KT. Grâce à cette entente, qui n’incluait ni l’enregistrement, ni le lancement de son futur album, elle s’est consacrée à l’écriture de chansons et a rencontré ses musiciens de tournée.

Puis, le moment venu de signer un contrat, tous les labels, sauf Relentless (une filiale de Virgin/EMI), lui disent qu’elle est trop vieille. "Je ne voulais pas signer avec Relentless, car leur spécialité n’était pas mon style", raconte KT. Elle accepte toutefois d’apprendre à mieux connaître les gens de l’étiquette en devenant chanteuse invitée pour le groupe klezmer hip-hop Oi Va Voi. Un an plus tard, convaincue de la loyauté de Relentless, elle signe leur offre et enregistre Eye to the Telescope sous la supervision du réalisateur Steve Osborne (U2, New Order).

KT admet que la musique qu’elle écrit est très différente de ce qu’elle écoute: "Les gens s’attendent à ce que notre musique ressemble à nos influences, mais je ne veux pas me conformer aux attentes, car c’est la pire erreur. J’ai fini par accepter le fait que ce que j’écris est accessible, même si, quand je rentre à la maison, j’écoute Tom Waits et PJ Harvey. Il faut saisir ce que les chansons nous dictent, les respecter", estime celle qui croit de toute façon que si jamais elle écrit un chef-d’œuvre, ce ne sera pas avant son quatrième ou cinquième album. D’ici là, elle peut se réjouir: Eye to the Telescope a même récolté une nomination au dernier Mercury Prize (remporté par Antony and the Johnsons), qui récompense chaque année les meilleurs auteurs-compositeurs britanniques: "Peu importe si les gens détestent mon album, je pourrai toujours dire qu’il a été finaliste pour le Mercury Prize!" s’exclame KT.

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