René Flageole : Inventer sa vie
René Flageole, entre pop léchée et dérision, s’invente une vie avec le spectacle Dans mon film à moi, un faux documentaire entrelardé de chansons soignées et contemplatives. Prometteuse prestation.
René Flageole est sympathique, un rien débonnaire, une voix suave qui nous avait séduit sur la pièce-titre de son second album, Les Cahiers d’un singe (2003). On y découvrait des chansons contemplatives, une plume fine, des arrangements atmosphériques. Le chanteur y allait d’une référence à King Crimson et terminait le cd par une superbe reprise de Léo Ferré: On n’est pas sérieux quand on a 17 ans (Roman), un poème de Rimbaud. Une interprétation en or, rare, qui situe bien le bonhomme, attachant artisan: "Ça me prend du temps pour écrire des chansons, je n’en fais pas tous les jours en me levant. Elles doivent d’abord mûrir dans ma tête et puis ça sort d’un bloc."
Son histoire commence en 1995. Flageole trépigne d’enthousiasme en préparant son premier album. Comme la moitié du Québec, il déchante rapidement: "Je fais juste une métaphore, mais l’échec du référendum de 95 est lié dans mon esprit à celui de mon premier album, la fin du party, la gueule de bois. J’ai erré, je suis devenu démotivé. J’étais très candide, je pensais que ça allait marcher tout de suite. Ça n’a pas été le cas… La désillusion a été grande."
Puis, Flageole rencontre les propriétaires du bar montréalais Le Verre Bouteille. Située en plein Plateau-Mont-Royal, cette salle fait beaucoup pour les artistes locaux, la scène alternative (Les Chiens, Philippe B, etc.). On engage le chanteur comme serveur, qui finit par organiser les lundis soirs des jam-sessions avec ses amis musiciens. Le naturel revient vite: "Afin de ne pas rouiller, pour s’exercer. Ça m’a remis dans le bain de la chanson. Martin Leclerc, avec qui j’avais fait mon premier album, était maintenant chez GSI Musique et il m’a demandé si je voulais retravailler avec lui. J’ai dit oui, naturellement, alors que je m’apprêtais à produire le disque moi-même, avec des bouts de ficelles." L’accueil critique est bon, Flageole reprend confiance et développe un style plus personnel avec Les Cahiers d’un singe.
Pour se démarquer et attirer l’attention, Flageole monte un spectacle sous forme de "documenteur", une idée farfelue et originale qui parodie les musicographies: "Je réfléchissais sur la façon dont je pourrais écrire et monter un vrai spectacle. Et un soir, j’ai revu un film de Woody Allen, Sweet and Lowdown, l’histoire fictive d’un guitariste. Je me suis dit que je pouvais peut-être m’inventer un parcours. Puis, avec David Pierrat, réalisateur de mon clip Je suis un loup, on a pensé à un concept avec des images." Des images de sa vie, réelle ou fantasmée, seront présentées sur un écran entre les chansons. Un projet qui irait à merveille sur un DVD: "C’est sûr que si le spectacle pognait beaucoup, j’aimerais vraiment ça faire un DVD, parce que l’on peut aller tellement loin avec ce concept-là, les Special Features pourraient être des menteries…" Ça risque ne pas être triste.
Le 26 janvier
Au Lion d’Or
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