Normand Guilbeault Ensemble : Ensemble, c'est tout
Musique

Normand Guilbeault Ensemble : Ensemble, c’est tout

Le Normand Guilbeault Ensemble explore sans cesse le vaste répertoire de Charlie Mingus, qui est une formidable invitation à s’exprimer librement. Le contrebassiste québécois nous parle de la nature du projet.

Même s’il mène plusieurs projets de front (Riel, Visions de Kerouac), Normand Guilbeault tient à maintenir vivant le projet consacré à la musique de Mingus. L’ensemble est formé de Jean Derome (saxophones, flûte), Ivanhoé Jolicœur (trompette, bugle), Mathieu Bélanger (clarinettes), Claude Lavergne (batterie, voix) et de Guilbeault. Ce dernier retrace pour nous l’origine du projet: "J’ai entendu Mingus sur disque pour la première fois en 1979. Je l’ai trouvé très spécial dans le son, dans l’approche. L’idée du projet remonte aux années 94-95. J’ai approché Jean, puis Mathieu et Ivanhoé. À l’origine, le batteur était Michel Ouellet. Nous avons donné un concert au Gesù puis réalisé un premier disque sur Justin Time. Avec ces 10 ans d’expérience (à raison de cinq à six concerts par année), nous avons acquis une maturité qui nous permet d’être plus à l’aise, d’atteindre la souplesse et la liberté auxquelles la musique de Mingus nous invite. Nous gardons à l’esprit l’idée que Mingus égale énergie. C’est une musique à la fois viscérale ("groundée", pleine de fougue) et intellectuelle."

Les musiciens du Normand Guilbeault Ensemble naviguent avec frénésie à l’intérieur du répertoire de Mingus. Ils respectent l’esprit du maître tout en ajoutant des couleurs personnelles. La formation semble s’inspirer de celle du Mingus de la fin des années 50 (avec Eric Dolphy et Booker Little): "Dès le départ, nous avons eu l’idée d’un quartet sans instrument harmonique. Cela créait une plus grande ouverture. Mingus a laissé un grand héritage. Nous voulons explorer cette large palette: il y a des moods mexicains, des moods latins. Chez Mingus, il y a plusieurs changements de métrique, différentes atmosphères dans la même pièce. Au prochain show, nous allons faire Prayer for a Passive Resistance. La priorité, c’est de travailler en équipe. Les musiciens qui ont joué avec Mingus ont beaucoup apporté."

À la fois instrumentiste, compositeur et arrangeur, Charlie Mingus est l’un des créateurs de jazz qui ont le plus contribué à faire avancer cette musique. Pithecanthropus Erectus et All the Things You Could Be by Now If Sigmund Freud’s Wife Was Your Mother suggèrent le passage du hard bop au free-jazz: "Mingus, c’est très politique. Il fait une sorte de statement. Sa musique exprime à la fois la dénonciation du racisme et la recherche d’une certaine spiritualité. Pensons à Better Get It in Your Soul. Ellington a été l’une de ses grandes sources d’inspiration. Duke l’a amené à un autre plateau. Mingus a aimé travailler autant avec des big bands qu’avec de petites formations. C’est un pivot des années 50-60, entre deux époques, le hard bop et le free. Je pense à la pièce Tonight at Noon, qui est très éclatée. Mingus n’est pas qu’un esprit revendicateur. C’est aussi un tendre. Il se défendait d’être Noir ou Blanc, mâle ou femelle. Comme contrebassiste, là aussi, il est unique. Ce que j’aime surtout chez Mingus, c’est sa grande musicalité."

Le 17 février à 20 h
Au Grand Théâtre
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