Magdalena Kozena : Le paradoxe Kozena
Musique

Magdalena Kozena : Le paradoxe Kozena

Magdalena Kozena est l’invitée de marque des Violons du Roy. Au terme d’une tournée nord-américaine, la cantatrice nous présente un programme qui met en valeur Rameau et Gluck. Discussion baroque.

Que peut-on dire de Magdalena Kozena? Née en Tchécoslovaquie, elle est, avec Cecilia Bartoli, la mezzo-soprano la plus connue à travers le monde. L’image et le talent de cette artiste belle et intelligente sont le porte-étendard de la plus importante étiquette de disques classique: Deutsche Grammophon. Carrière internationale oblige, elle parcourt la planète pour chanter et jouer dans les salles de concert les plus prestigieuses: Metropolitan Opera, Vienna Konzerthaus ou encore Concertgebouw. Elle est diva par obligation, prima donna de la scène lyrique, adulée et admirée. Ah oui! Elle est l’épouse du chef d’orchestre le plus influent dans cette sphère restreinte: Sir Simon Rattle, en poste au Philharmonique de Berlin. Sur ce dernier, prière d’être discret. Et bien sûr, on accorde tout à une diva, au risque d’être persona non grata. Car y avoir accès, c’est un privilège.

Mais il serait étriqué de s’attarder davantage à cette dimension de l’artiste. Lui appartient-elle vraiment? La mezzo-soprano de 32 ans possède un talent inouï et un charisme qui relègue aux oubliettes le mythe de la Castafiore. Une voix particulière aussi, pourvue d’un soprano clair et transparent. Pour l’interprétation, elle se démarque par un naturel désarmant dans cette ère astreignante de rigueur musicologique. Il n’y a aucune barrière de langue pour l’interprète. Un atout majeur, qui l’amène à interpréter un répertoire diversifié: "C’est beaucoup de travail, explique-t-elle dans un français impeccable, un intérêt personnel aussi. Quand j’étais petite, le socialisme imposait le russe à l’école, ce qui faisait déjà une seconde langue. À la fin du régime, l’ouverture vers le monde nous amenait à être curieux. La langue française et l’allemand. Il y a un intérêt littéraire aussi, mais c’est une facette du métier qui se développe constamment. Le texte est primordial dans l’interprétation, il détermine les couleurs et le style."

Depuis maintenant huit ans, Magdalena Kozena collabore avec l’élite de la scène baroque européenne. Harnoncourt, Goebel, McCreesh et Marc Minkowski, chef d’orchestre français, fondateur de l’ensemble Les Musiciens du Louvre. "Minkowski est très important pour moi, précise-t-elle. C’est une collaboration qui m’a plongée dans cet univers de fins connaisseurs aux styles très distincts, par moments… scientifiques. C’est l’idéal quand on est plus jeune de se commettre dans ce répertoire. On s’amuse beaucoup, on est créatif avec sa voix."

Une forme de créativité collégiale, à la limite de l’improvisation, qui sied bien à Magdalena Kozena. "Pour la musique baroque, on travaille souvent en petit ensemble, à l’inverse de ces grandes productions en salles comme le Théâtre du Châtelet, par exemple, où votre prestation est scrutée à loupe. C’est très sérieux. Le moindre faux pas et oups! La musique baroque se prêterait bien à un bar, avec un contact plus spontané et libre, comme le jazz. Cela refléterait l’esprit du jeu présent dans cette musique." Accessible en quelque sorte.

Le 2 mars à 20 h
À l’église Saint-Dominique
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