Alpha Blondy : Prendre racine
Alpha Blondy a importé le son reggae qu’il avait découvert dans les rues de Brooklyn à Abidjan. Qu’on l’admette ou non, c’est en grande partie à lui que l’on doit sa survie au cours des 25 dernières années…
Le chanteur reggae ivoirien sera de retour à Montréal en mars, cette fois dans le cadre d’un spectacle-bénéfice contre le racisme. Une cause parmi tant d’autres pour cet ambassadeur musical? "En tant que messager de la paix, combattre le racisme fait partie de mes cordes! affirme Blondy de son appartement parisien. C’est une cause très noble; on va commencer par ça, puis ensuite on passera à autre chose…" Commencer? N’est-ce pas précisément ce qu’il fait depuis ses tout débuts, veiller à rapprocher les peuples, les cultures et les religions avec ses chansons déclinées dans plusieurs langues?
L’idée derrière sa plus récente compilation Akwaba, parue à l’été 2005 en Europe, fut proposée par sa maison de disques: "Puisqu’il y avait une compilation pirate qui circulait, les MP3 et tout ça, on m’a proposé de faire des remix avec de jeunes talents, des jeunes qui font du hip-hop, you know… des jeunes qui ont grandi au son de la musique d’Alpha Blondy, vraiment. Il y a Magic System qui a repris Ya fohi, les Neg’ Marrons qui ont repris Cocody Rock, Lester Bilal qui a refait Sweet Fanta Diallo, Saïan Supa Crew qui a fait Wari… J’ai apprécié que de jeunes artistes fassent ça pour moi", avoue le chanteur.
"Le reggae est porteur d’espoir; c’est une musique qui glorifie l’Afrique, et c’est en plein ce que je voulais: avoir un public international pour pouvoir véhiculer mon message. Le reggae était vraiment la musique indiquée pour moi." Mais comment la relation Afrique-Antilles s’articule-t-elle? "La Jamaïque est un pays africain des Caraïbes, c’est tout. Les mêmes personnes, la même nonchalance, la même bouffe…" Faut tout de même avouer que le reggae, intimement et ultimement influencé par la mère patrie, est typiquement jamaïcain, non? "J’ai inventé le reggae africain, you know, le reggae dans la langue africaine auquel on ajoute des instruments africains comme la kora, le djembé, l’oud du Maroc… Notre contribution n’a pas été de calquer ce qui existait déjà, c’est plutôt un genre d’extension, comme l’a déjà dit Marley. Il avait dit dans sa prophétie que quand le reggae arriverait en Afrique, il prendrait une autre dimension. Notre contribution à l’épanouissement du reggae mondial, c’est de l’avoir africanisé."
Et quand on considère le tournant urbain qu’a pris la musique jamaïcaine à l’aube des années 80 après la mort de Bob Marley, on réalise rapidement que l’essor du reggae africain a peut-être maintenu le genre roots en vie… en attendant que la Jamaïque y revienne elle aussi, éventuellement. "Oui, on peut dire que nous sommes le second souffle de ce courant musical, parce que le dancehall et le reggae bassement commercial qu’on entend aujourd’hui ont pris le dessus sur le roots rock reggae! Mais heureusement, on commence à revenir à ce son. J’adore le jeune chanteur Junior Kelly, qui a un style très roots. Des gens comme Beres Hammond, Freddie McGregor… et Damian, le fils de Bob. Vraiment, le roots fait une remontée." Justement, ce spectacle-bénéfice nous permettra également de découvrir une, sinon la meilleure formation roots américaine, Groundation, de passage pour la toute première fois à Montréal.
Le 17 mars
Avec Groundation, Kaliroots, La Chango Family et bien d’autres
Dans le cadre de la Semaine d’action contre le racisme
Au Medley
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