Gilles Valiquette : Bonheur d’occasion

Pour un papier comme celui-ci, un journaliste a besoin d’une quinzaine de minutes d’entrevue environ; or, celle avec Gilles Valiquette durera exactement 74 minutes! Celui qui s’est retrouvé guitariste sur plus de la moitié des chansons du Top 40 québécois à l’été 72 est une encyclopédie vivante de la musique à lui tout seul. Il nous raconte sa passion, comment il est devenu auteur-compositeur-interprète ayant enregistré 12 albums (sans compter les boîtes pleines de cassettes de chansons inédites); réalisateur des premiers albums de Plume, Pierre Flynn, Richard Séguin et compagnie; enseignant dans une école de musique qu’il a lui-même fondée (le Collège Musitechnic), militant pour les droits d’auteur, administrateur siégeant à presque tous les c.a. d’organismes oeuvrant dans l’industrie de la musique et père tout à la fois.

Il se penche aussi, durant l’entretien, sur comment il se fait que sa chanson La Vie en rose, écrite en un après-midi, s’est retrouvée pendant deux ans dans le Top 10 des chansons les plus jouées au Canada, ce qu’aucun artiste canadien, qu’il soit anglophone ou francophone, n’a réussi; sur comment, il y a 25 ans, il a pu avoir l’intuition d’inventer son propre langage codé, deux ans avant que le système international MIDI ne fasse son apparition et que les microprocesseurs n’envahissent la musique…

Comment se fait-il que malgré tout cela, Gilles Valiquette demeure tout de même plutôt discret, tellement qu’on a l’impression qu’il n’est pas reconnu à sa juste valeur?

Depuis ce jour de 1964 où, grâce à sa mère qui le sortit du bain pour lui faire entendre un nouveau groupe "dans le vent", les Beatles (pour la première fois à la radio, un mois avant le reste du monde libre au Ed Sullivan Show), Gilles Valiquette consacre sa vie à la musique, qui s’est avérée pour lui un moyen d’expression – et un gagne-pain – sans pareil. À la musique mais plus précisément à la chanson. "J’ai été touché par ça, que veux-tu. Tout mon travail d’artisan est là: pondre un premier jet, couper dans le gras pour que ça dure trois minutes environ, faire passer une idée ou une émotion dans une langue que le monde pouvait comprendre. Ç’a toujours été ça, le défi. Si j’étais jeune aujourd’hui, j’aurais utilisé probablement le même langage que Beck. Mais je viens d’une autre époque et comme artiste, tu ne peux juste être que ce que tu es. Alors je fais des chansons."

Malgré sa feuille de route remarquable et ses 40 ans de métier, Valiquette doit, s’il veut partir en tournée avec son nouveau spectacle acoustique bâti autour de Pour l’occasion (enregistré pendant une émission de la série Les Acoustiques à Musimax), donner des showcases à des programmateurs de salles, comme une verte recrue. "C’est la nouvelle donne du métier, alors je suis patient. De toute façon, je suis déjà très, très fier de cet album, et comme il a été créé avec soin, il va faire son chemin. C’est un bel instantané de ce que je suis comme musicien. Écrire des chansons, c’est comme mettre des enfants au monde, elles ont leur vie propre. Faire un album comme Pour l’occasion, c’est comme réunir toute sa famille et s’apercevoir que tout le monde a bien changé. L’exercice a été très enrichissant pour moi."

Bien de son temps, Gilles Valiquette avoue candidement se servir de son album pour faire la promotion de son site Web (www.gillesvaliquette.com), qu’il considère comme un projet artistique à part entière…

Gilles Valiquette
Pour l’occasion
Trilogie Musique